Un monde perdu découvert sous la glace de l’Antarctique : des chercheurs internationaux ont annoncé la découverte d’un monde perdu, potentiellement vieux de plus de 30 millions d’années, situé à plus d’un kilomètre sous la glace de l’Antarctique. Ce paysage ancien aurait pu regorger de rivières, de forêts, et peut-être même d’animaux sauvages.
L’Antarctique n’a pas toujours été un désert glacé. Selon les scientifiques, il abritait autrefois un écosystème luxuriant. « Cette découverte est comme l’ouverture d’une capsule temporelle », a déclaré le professeur Stewart Jamieson, géologue à l’Université de Durham en Angleterre et co-auteur de l’étude, publiée dans la revue Nature Communications.
Des recherches débutées en 2017
Les travaux sur le terrain ont commencé en 2017, lorsque l’équipe a foré le fond marin afin d’extraire des sédiments provenant d’un écosystème enfoui sous la glace.
« La terre sous la calotte glaciaire de l’Antarctique oriental est moins connue que la surface de Mars », a souligné le professeur Jamieson.
C’est en analysant ces sédiments que les scientifiques ont mis au jour un ancien paysage situé à plus d’un kilomètre de profondeur.
Un paysage vaste et préservé
Le paysage découvert se situe dans la région de Wilkesland, dans l’Antarctique de l’Est, et s’étend sur plus de 30 000 km², soit environ deux fois la taille de la Bretagne.
Des traces de pollen de palmiers anciens ont été retrouvées, suggérant que la zone pouvait avoir un climat tropical avant sa glaciation.
Grâce à des outils de pointe, notamment le radar à pénétration de sol, les chercheurs ont identifié des blocs de terrain surélevé mesurant entre 120 et 170 kilomètres de long et jusqu’à 85 kilomètres de large. Ces blocs sont séparés par des vallées pouvant atteindre 40 kilomètres de largeur et près de 1 200 mètres de profondeur.
Un paysage sculpté par les rivières
L’analyse indique que cette formation géologique n’a probablement pas été érodée par la glace, mais façonnée par des rivières. Le paysage aurait donc été formé avant l’apparition de la calotte glaciaire antarctique, il y a environ 34 millions d’années.
Un schéma représentant l’ancien paysage fluvial préservé sous la calotte glaciaire de l’Antarctique oriental. Image crédits nature Communications
Les chercheurs poursuivent leurs études sur cette zone afin de mieux comprendre l’évolution du climat, des écosystèmes anciens et de la calotte glaciaire.
La fragmentation de Gondwana et la naissance d’un relief unique
Lorsque le supercontinent Gondwana a commencé à se disloquer, le mouvement des masses terrestres a engendré de profondes fissures et formé les crêtes imposantes identifiées sous la glace de l’Antarctique. Ce processus tectonique ancien a façonné un paysage complexe qui est resté figé pendant des dizaines de millions d’années.
À cette époque reculée, la région abritait probablement des rivières sinueuses et des forêts denses dans un climat tempéré, voire tropical. Cette hypothèse est étayée par la découverte de pollen de palmier ancien à proximité du site, selon The Economic Times.
Par ailleurs, les sédiments extraits contenaient des micro-organismes marins, évoquant un environnement caractérisé par des mers chaudes et une biodiversité importante.
Un paysage qui évoque la Patagonie… ou les tropiques
« Il est difficile de dire exactement à quoi ressemblait ce paysage ancien, mais selon la période que l’on considère, le climat aurait pu ressembler à celui de la Patagonie moderne, ou même à quelque chose de tropical », a expliqué le professeur Stewart Jamieson.
En d’autres termes, l’Antarctique verdoyant n’est pas uniquement un phénomène hypothétique ou contemporain. Il fut bel et bien une réalité géologique dans un lointain passé.
Un gel brutal qui a figé l’écosystème
Lorsque le climat mondial s’est refroidi, une calotte glaciaire s’est formée, recouvrant progressivement le continent antarctique. Ce processus a interrompu l’érosion active et a gelé le paysage sous-glaciaire, un peu comme un mammouth piégé dans la glace.
« L’histoire géologique de l’Antarctique enregistre d’importantes fluctuations », a déclaré Jamieson. « Mais des changements aussi brusques ont laissé peu de temps à la glace pour modifier significativement le paysage sous-jacent. »
Même lors de périodes de réchauffement climatique, comme au cours du Pliocène moyen il y a environ 3 millions d’années, la glace n’a jamais complètement reculé au point de révéler cette ancienne topographie.
Elle est donc restée préservée, intacte sous la glace depuis des dizaines de millions d’années.
Mieux comprendre le passé pour prédire l’avenir
L’équipe scientifique espère que l’étude de ce paysage enfoui et de son évolution sous l’effet des glaciations successives permettra d’améliorer les modèles actuels sur la fonte des glaces.
« Ce type de découverte nous aide à comprendre comment le climat et la géographie sont étroitement liés, et à quoi nous pouvons nous attendre dans un monde où les températures augmentent », a conclu Jamieson.
D’après le British Antarctic Survey, le réchauffement climatique accélère le déclin démographique de ces oiseaux de l’Antarctique.
Par Le HuffPost avec AFPPartager
Capture d’écran Facebook @Parks and Wildlife Service Western Australia Le réchauffement climatique est la principale cause de déclin des manchots empereurs. (illustration)
ENVIRONNEMENT – Un constat alarmant. Le réchauffement climatique, et en particulier le recul de la banquise dans l’Antarctique, fait décliner « plus vite que prévu » la population des manchots empereurs, dont nombre de colonies ont perdu plus de 20 % de leurs membres en 15 ans, alerte une étude britannique de référence publiée mardi 10 juin.
Ce déclin rapide a été observé par satellites dans seize colonies, situées dans la péninsule antarctique, la mer de Weddell et la mer de Bellingshausen, qui représentent un tiers de la population de la plus grande espèce de manchots au monde, rapporte l’étude du British Antarctic Survey publiée dans la revue Nature Communications : Earth & Environment.
« Nous avons là une illustration très déprimante du changement climatique et un déclin démographique qui se déroule plus vite que prévu, mais il n’est pas trop tard », a déclaré Peter Fretwell, chercheur de cet observatoire britannique qui a dirigé l’étude. Les conclusions de ces nouvelles observations sont « probablement environ 50 % pires » que les estimations les plus pessimistes réalisées à l’aide de modèles informatiques, a-t-il ajouté.
Réchauffement climatique
Première cause à l’origine de ce déclin, le réchauffement climatique amincit la glace sous les pattes des manchots dans leurs zones de reproduction. Ces dernières années, certaines colonies ont perdu l’intégralité de leurs poussins, noyés ou morts de froid lorsque la glace a cédé sous leurs minuscules pattes, avant qu’ils ne soient prêts à affronter l’océan glacial.
L’étude suggère que le nombre de manchots est en baisse depuis le début de la surveillance précise par satellite, en 2009, soit avant que le réchauffement ne réduise la reconstitution annuelle de la banquise, selon Peter Fretwell. Le changement climatique reste le principal facteur du déclin, a-t-il précisé, entraînant d’autres menaces pour les manchots, telles que des précipitations plus importantes ou l’intrusion croissante de prédateurs, comme les orques et les phoques par exemple.
« Il n’y a pas de pêche, pas de destruction de leur habitat, pas de pollution qui cause le déclin de leurs populations. C’est simplement la température de la glace sur laquelle ils se reproduisent et vivent, et c’est vraiment le changement climatique », a-t-il déclaré à l’AFP.
Selon une étude réalisée en 2020, les manchots empereurs, dont le nom scientifique est Aptenodytes forsteri, comptent environ 250 000 couples reproducteurs, tous en Antarctique. Les manchots n’appartiennent pas à la même famille que les pingouins de l’hémisphère nord, plus petits et capables de voler.
Extinction d’ici la fin du siècle ?
L’œuf de manchot empereur est couvé en hiver par le mâle, tandis que la femelle part à la pêche pendant deux mois, avant de revenir nourrir les petits par régurgitation. Pour survivre par eux-mêmes, les oisillons doivent développer des plumes imperméables, un processus qui commence généralement à la mi-décembre, pendant l’été austral.
Le chercheur considère qu’il y a de l’espoir que les manchots se rapprochent du pôle Sud à l’avenir, mais il est difficile de dire « combien de temps ils vont tenir là-bas », précise Peter Fretwell. Des modélisations informatiques avaient déjà prévu que l’espèce sera proche de l’extinction d’ici la fin du siècle si l’humanité ne réduit pas ses émissions de gaz à effet de serre.
Toutefois, à la lumière des dernières découvertes inquiétantes, « il se peut que nous devions repenser ces modèles », a déclaré Peter Fretwell et il est de plus en plus nécessaire d’étudier le reste de la population. « Nous allons probablement perdre beaucoup de manchots empereurs, mais (…) si nous réduisons nos émissions de gaz à effet de serre, alors nous sauverons l’espèce », conclut le scientifique.
Pour le passage au 25 décembre, me voilà en route pour une croisière hauturière, dans un taxi direction un hôtel, depuis l’aéroport Ezeiza de Buenos Aires vers le centre de la capitale argentine, après un vol sans histoire sur Air France de 13h depuis Paris. Sur le périphérique le passage à Noël, se matérialise par de nombreux tirs de feu d’artifice et de fusées d’un quartier à l’autre, et aussi par l’absence quasi-complète de moyen de quitter l’aéroport entre 23h et 01h du matin ! Il ne faut pas arriver en Argentine un 24 Décembre, on ne plaisante pas avec Noël ici.
Le lendemain matin l’Uber de Noël nous dépose, Jacques (le président de l’association) et moi devant la grille du Yacht Club de Buenos Aires, petit havre de verdure et de paix au cœur de cette mégapole et de son quartier chic de buildings en verre. Nous retrouvons Lauriane, Damien, Toupie, Parbat et le bon vieux Milagro, tous fatigués par cette traversée de l’Atlantique. Juste le temps de saluer ceux qui quittent le bord, François et Henri, et direction ma cabine et les quelques mètres carrés qui seront ma maison flottante pour les prochaines semaines de navigation en Atlantique Sud.
Sébastien, Damien, Jacques et Toupie réunis au Yacht Club Argentino (Buenos Aires, Argentine)
Autour du ponton la faune est nombreuse à nous observer : tortues qui bullent en surface, iguanes terrestres d’un mètre de long qui se prélassent au soleil dans l’herbe sèche, cormorans qui poursuivent celui de leur congénère qui a péché un poisson et a le malheur de ne pas l’avoir encore avalé, bref, ça s’active autour de nous et nous en prenons de la graine tous les jours jusqu’à 19h, heure fatidique de l’arrivée de milliers de moustiques en provenance des marais environnants et qui nous obligent à tout fermer et fuir le bateau jusqu’à la nuit tombée.
Un de nos voisins de ponton au Yacht Club Argentino (Buenos Aires, Argentine)
Pendant cette semaine d’entre les fêtes un rythme soutenu se met en place : entretien du bateau à gogo, démarches administratives avec les autorités, préparation de l’avitaillement, réparation du plancher du cockpit qui s’affaisse, installation d’une éolienne, installation (chaotique) d’une sonorisation d’exception dans le carré, laverie, avitaillement en nourriture, carburant et gaz, changement dans l’accastillage, matelotage…et réparation de la grand-voile !
Modification des butées du chariot de GVInstallation d’un support d’antenneRéparation de la Grand-VoileInstallation de l’éolienneSY Milagro au Yacht Club Argentino
En effet, celle-ci a souffert lors de la dernière traversée de 2 déchirures verticales, au niveau de coutures qui nécessitent de la dégréer pour la réparer. Heureusement Clément, professionnel de la voile qui travaille sur les Imoca du Vendée Globe, prend cette réparation en main. C’est long et fastidieux, écrasés par la chaleur de l’été argentin sur une dalle en béton ensoleillée. Nous transpirons à grosses gouttes. Ces travaux sont heureusement coupés par d’agréables pauses repas à la cafétéria du Yacht Club (mention spéciale au restaurant du siège du yacht club qui est magnifique et dont les plats proposés sont excellents).
L’une des pauses bien méritées de l’équipage à la cafétéria du Yacht Club
On décolle du Yacht Club Argentin !
Finalement, la préparation se termine en même temps que l’année 2024 : l’année 2025 commence avec notre départ de Buenos Aires au complet avec Jacques, Philippe, Patrick, Clément, Aude (présente depuis le départ de St-Nazaire !), Lauriane, Damien, Toupie, Parbat et moi. Nous quittons le Yacht Club le 1er janvier 2025, dès que Milagro décolle de sa place au fond vaseux, direction la sortie du Rio de la Plata.
[Cap au Sud #10] de Buenos Aires (Argentine) à Puerto Williams (Chili) Première partie 27Une partie de l’équipage du voilier Milagro
Le delta est absolument gigantesque : les extrémités ne peuvent pas se voir depuis le chenal précisément balisé que nous empruntons. L’eau reste douce jusqu’à très loin au large et turbide, chargée par les sédiments du delta arrachés aux montagnes. Autre particularité : pendant au moins 100 nautiques, la profondeur est très faible et constante : moins de 10m ! Même sans côte à l’horizon, il est possible de mouiller presque partout et le chenal balisé d’accès à Buenos Aires pour les gros navires paraît interminable !
Slalom entre les cargos du Rio de la PlataCargos au mouillage dans le Rio de la Plata (Argentine)
Nous passons la nuit au mouillage face à des mangroves, près de La Plata, ainsi que les deux journées suivantes tout en gagnant vers l’est dans les eaux douces et laiteuses du Rio de la Plata, en attendant qu’un coup de vent passe au large et nous laisse gagner la haute mer. Mère Nature en profite pour nous faire cadeau de quelques ciels somptueux.
[Cap au Sud #10] de Buenos Aires (Argentine) à Puerto Williams (Chili) Première partie 28[Cap au Sud #10] de Buenos Aires (Argentine) à Puerto Williams (Chili) Première partie 29[Cap au Sud #10] de Buenos Aires (Argentine) à Puerto Williams (Chili) Première partie 30[Cap au Sud #10] de Buenos Aires (Argentine) à Puerto Williams (Chili) Première partie 31[Cap au Sud #10] de Buenos Aires (Argentine) à Puerto Williams (Chili) Première partie 32[Cap au Sud #10] de Buenos Aires (Argentine) à Puerto Williams (Chili) Première partie 33
A partir de ce moment-là nous passons à de la navigation hauturière non-stop : des quarts de 3h sont programmés en binômes ; un équipier qui barre et reste sur le pont en continu, et un second qui intervient pour les manœuvres et un soutien « logistique » pour celui sur le pont, afin de rendre la veille plus agréable, le tout avec un glissant de 1h30. Pour ma part je commence avec Damien et finis avec Aude.
Clément à la barre !Toupie, marin aguerrie, profite de Sébastien, un de ses équipiersAude et Clément matelottent dans le carré
Il faut s’habituer à ce rythme particulier d’une navigation hauturière, si différent du rythme terrestre : le temps se distant, les distances aussi, un rythme monotone mais indispensable s’installe. Les prévisions se gâtent et nous décidons de nous réfugier à Bahia San Blas, malgré des données hydrographiques peu engageantes : nous avons parcourus 680 nautiques depuis le départ, à la voile mais aussi au moteur, le temps ayant été particulièrement calme depuis le départ.
Bahia San Blas : notre entrée dans les Quarantièmes Rugissants.
Bahia San Blas est caractéristique de la côte argentine jusqu’à Ushuaia : pas de marina ni de digue ; nous mouillons devant la plage. Les bateaux locaux ne sont que de gros zodiacs qui sont tirés à terre à l’issue de leur sortie, nous comprendrons pourquoi rapidement… La ville, de quelques milliers d’habitants, n’est qu’un front de mer : après 2/3 rangées de maisons, c’est la pampa qui commence… immense.
Il fait très chaud, c’est étouffant. Nous déjeunons dans le seul restaurant ouvert et rapidement il est temps de retourner à bord pour le coup de vent annoncé. Le ciel est déjà très sombre et le clapot grossit : trop tard pour ne pas être trempés ! Le retour en annexe est aussi « sportif » que mémorable. Tout le monde est littéralement rincé, l’eau est à 23 degrés et une moule échappée d’une boîte à pizza trouve son bonheur en faisant des longueurs au fond de l’annexe…
Aussitôt l’annexe remontée, le coup de vent arrive : le vent se met à souffler en continu à 30/35 nœuds, avec des rafales dépassant les 50 noeuds et soufflant les crêtes des vagues et le sable sur la plage. Le ciel est constamment zébré d’éclairs à 360°, c’est impressionnant ! Le bateau roule énormément, un fort courant s’opposant au vent dominant. Le roulis met particulièrement mal à l’aise et épuise. Certains restent apathiques dans leur couchette, comme vidés de toute énergie et la situation va perdurer une grande partie de la nuit.
Moment de convivialité au mouillage, pour ne pas voir le temps qu’il fait dehors…Image d’une bonne nuit au mouillage…Image d’une bonne nuit au mouillage…Image d’une bonne nuit au mouillage…
Au matin et après une courte accalmie le coup de vent reprend, cette fois à 40 nœuds et venant du sud. Milagro roule et tourne en continu autour de son ancre à cause des effets simultanés du vent et du courant de la rivière. La température chute. Ce vent continu est impressionnant et fatiguant : il finit par entrer dans la tête, devenant insupportable. Sacré contraste entre ce vent qui hurle sur le pont et le calme feutré et douillet du carré 2m plus bas. De nombreuses fois nous nous dirons que Milagro est bien le bateau qu’il faut pour l’endroit où nous sommes ! Calme et soleil reviennent vers 18h, promesses d’une nuit réparatrice au mouillage pour laisser retomber la houle formée au large.
Le 10 janvier départ 10h sous le soleil, une bonne brise et encore de la houle qui va faire rouler le bateau… La sortie de la rivière est stressante, avec des bancs de sable aux profondeurs bien différentes des données indiquées sur nos cartes. Nous faisons cap sur Puerto Madryn, ville située dans la baie sud de la péninsule Valdès, péninsule rendue célèbre par la Calypso du Commandant Cousteau dans les années 70 : cette baie est une nurserie à baleines bleues. On verra ça d’ici quelques jours !
« Climbing Through », vous n’en avez jamais entendu parler ? Il s’agit d’un récit publié sur le blog de la marque Arc’teryx, où la guide de montagne et thérapeute Julia Niles revient sur une expédition singulière qu’elle a vécu dans la vallée de Cochamó, au Chili. Plus qu’un simple retour à l’escalade, cette aventure marque pour elle une forme de renaissance. Avec ses mots, elle nous raconte comment l’escalade, longtemps mise entre parenthèses, est redevenue un point d’ancrage dans sa vie. Une histoire intime, avec en toile de fond une grimpe qui aide à retrouver son équilibre.
Retrouver la falaise après des années d’éloignement
Lorsque Julia accepte l’invitation de la grimpeuse pro Émilie Pellerin à la rejoindre pour une expédition en Patagonie, elle ne s’est pas préparée à l’impact que ce retour en falaise allait avoir sur elle. Ancienne grimpeuse très expérimentée, Julia avait depuis longtemps troqué les grandes voies pour une vie bien remplie : celle d’une mère célibataire et d’une femme pleinement investie dans sa vie professionnelle. Une vie à cent à l’heure où l’escalade était devenue un lointain souvenir, un passé qu’elle pensait avoir rangé dans un coin de sa tête. Mais Cochamó, avec ses parois de granite imposantes, ses marches d’approches sauvages et son ambiance brute, aura réveillé en elle quelque chose de profond.
L’escalade m’avait déjà sauvée par le passé ; elle pouvait peut-être me sauver à nouveau. | Julia Niles
Une aventure portée par la solidarité féminine
Ce qui marque Julia au cours de cette expédition, c’est la composition inédite de l’équipe : un groupe presque entièrement féminin, une première dans son parcours. Cette configuration génère une dynamique singulière, loin des modèles parfois dominés par la recherche de performance ou la rivalité. L’ambiance qui s’installe est faite de bienveillance, d’écoute et de respect. Chacune peut exprimer ses doutes, ses émotions, ou sa fatigue sans crainte d’être jugée. Une atmosphère rare, où la vulnérabilité devient une force partagée.
C’était une mission hors du commun. Pour la première fois, parmi tous les tournages, séances photo et expéditions auxquels j’avais participé, nous étions plus de femmes que d’hommes. | Julia Niles
Pour Julia, cette cohésion entre femmes joue un rôle central dans sa redécouverte de l’escalade. Elle y retrouve une pratique attentive aux ressentis et aux besoins de chacune. Ce climat de confiance transforme l’expédition en une expérience marquante, où le lien humain compte autant que la grimpe en elle même.
La montagne comme outil thérapeutique
En tant que psychothérapeute, Julia fait rapidement le lien entre les émotions traversées en paroi et les mécanismes psychologiques mis en oeuvre dans un parcours de reconstruction personnelle.
Là-haut sur la paroi, j’étais plongée dans mes pensées. Tandis que mes yeux absorbaient le paysage magnifique, j’examinais ma vie en démêlant mes problèmes. Je me suis aperçue que j’avais profondément besoin de ça. | Julia Niles
À Cochamó, chaque mouvement, chaque prise, chaque décision engage des ressources mentales importantes — confiance, résilience, gestion de la peur, capacité à accepter l’imprévu. Dans son récit, elle nous rappelle également que la grimpe exige une grande concentration: paradoxalement, loin de s’ajouter à la charge mentale, elle offre au contraire un soulagement, une bouffée d’air frais face à la pression constante du quotidien.
Ralentir pour mieux ressentir
Une autre dimension du récit de Julia tient à la lenteur imposée par l’environnement de Cochamó. Ici, pas de chrono, pas de course à la cotation. L’approche se fait à pied, parfois sur plusieurs jours. Les longues fissures de granite se méritent, les bivouacs en paroi demandent de la patience, beaucoup de patience. Ce rythme ralenti tranche net avec l’agitation du quotidien, et met en avant une pratique de l’escalade plus épurée, presque proche de la méditation.
Je me suis immergée dans le rythme qu’inspire la nature. Au soir, descendant en rappel dans le ciel pourpre, je me suis fondue dans le paysage, comblée, en paix, n’ayant plus besoin de rien d’autre. | Julia Niles
Dans ce retour à l’essentiel, Julia redécouvre le plaisir simple de grimper pour elle-même, sans attente de performance. Une grimpe qui apaise, qui recentre, qui donne du sens. Dans un monde où tout va vite, l’escalade devient pour elle un espace rare où le temps reprend sa juste place.
Une histoire personnelle sans exploit ni paillettes
Climbing Through n’est ni un récit d’exploit, ni un palmarès de performances. C’est une histoire humaine et sincère, ancrée dans la réalité d’une femme qui cherche à concilier passion, travail, maternité et équilibre personnel. C’est également un beau témoignage sur le rôle que peut jouer l’escalade dans les parcours de vie, y compris les plus intimes.
En revenant à l’escalade, Julia Niles nous démontre que la grimpe ne se limite pas à l’effort physique : elle ouvre un espace intérieur, fait de remises en question, d’instants de joie et de reconquête de soi.
Une épidémie de grippe aviaire en 2023 a frappé une colonie d’éléphants de mer du sud dans la région de la Terre de Feu au Chili, entraînant une baisse de 50 % de sa population.
Mais au cours de la saison de reproduction 2024-2025, la population de la colonie s’est rétablie, avec 33 petits nés.
Une alliance entre la branche chilienne de la Wildlife Conservation Society et le département régional de l’environnement surveille cette colonie depuis des années, bravant l’isolement et les conditions météorologiques extrêmes à la pointe sud des Amériques.
Les experts avancent que le site, la baie Jackson, pourrait servir de refuge naturel contre la grippe aviaire grâce à son isolement géographique en tant que fjord.
D’année en année, une colonie d’éléphants de mer arrive dans la baie Jackson, sur les rives de la Terre de Feu à l’extrême sud du Chili, pour muer et se reproduire. Cependant, en 2023, une épidémie de grippe aviaire a dévasté la région, et la population de la colonie a chuté de moitié.
En 2020, lorsque la grippe aviaire a causé des pertes dévastatrices dans les colonies d’oiseaux marins en Europe et en Afrique australe, les experts pensaient initialement que la propagation du virus aux mammifères se limiterait aux carnivores terrestres. Cependant, lors de l’épidémie de 2021 et 2022, le virus a touché des phoques et des baleines en Europe et en Amérique du Nord. En 2023, lorsque le virus est arrivé sur la côte sud-américaine, l’agent pathogène a montré qu’il pouvait causer une mortalité massive chez les mammifères marins. L’éléphant de mer du sud (Mirounga leonina) a été l’une des espèces les plus touchées.
Mais une bonne nouvelle est arrivée en avril 2025, lorsque des chercheurs ont constaté que la population d’éléphants de mer dans la baie Jackson avait doublé pour atteindre 200 individus, dont 33 petits.
« C’est une excellente nouvelle pour la conservation de l’espèce, car Jackson [Bay], du fait qu’elle se trouve dans les eaux intérieures des fjords et des canaux, peut agir comme une barrière protectrice contre les pandémies », déclare Cristóbal Arredondo, vétérinaire et coordinateur du programme terrestre pour la Wildlife Conservation Society (WCS) du Chili. Depuis 2008, WCS Chili surveille cette colonie aux côtés du département de l’environnement de la région de Magallanes, qui englobe la Terre de Feu.
Éléphants de mer dans la baie Jackson. Image avec l’aimable autorisation de Francisco Brañas.
Un refuge contre le virus
La baie Jackson abrite « la plus grande colonie d’éléphants de mer du Chili », selon Javiera Constanzo, vétérinaire et responsable de l’approche One Health pour WCS Chili. La baie est située entre deux aires protégées : la zone marine et côtière protégée à usages multiples Seno Almirantazgo (ou Admiralty Sound), administrée par le ministère de l’Environnement, et le parc naturel Karukinka, une initiative privée de conservation gérée par WCS Chili.
Le parc naturel Karukinka est un vaste refuge naturel qui s’étend sur environ 300 000 hectares (741 000 acres) de divers écosystèmes. Admiralty Sound, qui entoure les côtes de Karukinka, reçoit de l’eau douce de plusieurs glaciers de la cordillère Darwin, une chaîne de montagnes couverte de glace. Comme Admiralty Sound est un grand fjord — une vallée profonde et étroite d’origine glaciaire remplie d’eau de mer — son mélange d’eau douce et d’eau salée le rend très productif. Et en tant que zone protégée par le gouvernement, Admiralty Sound est vital pour la population d’éléphants de mer, explique Constanzo, en interdisant les activités qui pourraient affecter l’espèce.
Surtout, l’isolement de la baie Jackson pourrait en faire un refuge pour la colonie d’éléphants de mer. Cette hypothèse est encore à l’étude, mais « ce que l’on observe est très positif pour la conservation de l’espèce », affirme Constanzo.
Au cours de la saison la plus récente, 33 petits sont nés. Image avec l’aimable autorisation de la WCS
Surveillance réussie après la grippe aviaire de 2023
Les données des émetteurs satellites montrent que certains éléphants de mer de la baie Jackson restent sur place tandis que d’autres migrent depuis d’autres endroits, venant de l’océan Pacifique ou voyageant dans l’Atlantique jusqu’à la péninsule Valdés, au centre de la Patagonie argentine.
En 2023, lors de l’épidémie de grippe aviaire hautement pathogène, il y a eu une mortalité massive d’éléphants de mer en Argentine : selon une étude publiée dans Nature Communications, environ 17 000 animaux sont morts.
À la baie Jackson, les chercheurs n’ont enregistré qu’environ 100 individus dans la colonie cette année-là, soit moins de la moitié du nombre enregistré les années précédentes.
« Nous espérions vivement qu’au cours de la saison suivante, les effectifs de la colonie se rétabliraient », déclare Arredondo. Et c’est ce qui s’est produit. La saison 2024-2025 a dissipé tout doute : 200 éléphants de mer ont été observés dans la baie Jackson en décembre, le mois où la population de la colonie atteint normalement son maximum. Les chercheurs ont également enregistré la naissance de plus de 30 petits éléphants de mer, soit le même nombre qu’en 2023.
Des chercheurs de WCS Chili et du département régional de l’environnement de Magallanes dans la baie Jackson. Image avec l’aimable autorisation de Francisco Brañas
La colonie de la baie Jackson a « maintenant retrouvé ses effectifs après la grippe aviaire », selon Constanzo.
Les experts attribuent le rétablissement rapide de la colonie d’éléphants de mer de la baie Jackson à plusieurs facteurs. D’une part, sa localisation dans les eaux intérieures des fjords et des canaux, loin des autres colonies touchées, a pu servir de barrière naturelle contre la grippe aviaire, réduisant le risque de contagion.
Les chercheurs suggèrent que les éléphants de mer ayant contracté le virus de la grippe aviaire hautement pathogène n’ont probablement pas réussi à revenir à la baie Jackson, mourant probablement avant d’atteindre leur destination.
Environ 200 éléphants de mer ont été vus dans la baie Jackson en décembre 2024. Image avec l’aimable autorisation de la WCS
Surveillance dans une zone extrême
Les vents dans la baie Jackson peuvent atteindre jusqu’à 120 kilomètres par heure, ce qui représente un défi important pour les chercheurs lors du débarquement. Cela n’a cependant pas empêché la biologiste marine Marina Maritza Sepúlveda de se rendre dans la baie Jackson en 2023 avec une équipe de scientifiques chiliens et britanniques. Ils ont équipé plusieurs éléphants de mer de la baie Jackson d’émetteurs satellites, dans le cadre d’un projet en cours soutenu par WCS Chili.
Sepúlveda explique que les émetteurs aident les scientifiques à suivre la colonie alors qu’elle voyage le long du courant du Cap Horn, l’un des courants « les moins étudiés et connus du Chili », et qui est « extrêmement important à comprendre ».
WCS Chili s’est également joint à l’équipe pour surveiller la colonie d’éléphants de mer. Étant donné le coût logistique élevé pour atteindre la zone, chaque occasion de collecter des données est exploitée.
« La présence des animaux sur place nous permet de maximiser les chances de recueillir des données scientifiques précieuses », explique Sepúlveda. Par exemple, des vétérinaires comme Arredondo et Constanzo prélèvent des écouvillons nasaux et anaux pour étudier le microbiome des éléphants de mer, y compris leur charge bactérienne et virale.
La baie Jackson est située dans une zone où la vitesse du vent peut dépasser les 120 km/h. Image avec l’aimable autorisation de la WCS.
Les chercheurs recueillent également des données à l’aide d’une échographie pour mesurer l’épaisseur de la couche de graisse des éléphants de mer, ce qui permet d’évaluer leur condition physique. Ils prélèvent des moustaches et des poils pour analyser l’écologie trophique des phoques et vérifier la présence de métaux lourds, et collectent des excréments pour rechercher des parasites.
Au cours de la saison la plus récente, les chercheurs ont également prélevé des échantillons pour confirmer la présence de la grippe aviaire dans la colonie. Ces échantillons sont actuellement en cours d’analyse.
« Le travail d’équipe nous permet d’optimiser les ressources, de partager les connaissances et de garantir la collecte de données précieuses qui contribuent à la compréhension et à la conservation de cette colonie d’éléphants de mer », explique Arredondo.
Les chercheurs surveillent la colonie d’éléphants de mer de la baie Jackson dans le cadre d’un projet de long terme depuis plus de 16 ans.
Chaque année, entre octobre et avril, une petite équipe parcourt toute la plage et la zone côtière. Lors de ces inspections, les chercheurs classent les éléphants de mer par âge et par sexe, ce qui les aide à comprendre la composition de la population de la colonie. Cependant, selon la position d’un phoque au sol, certains individus ne peuvent pas être identifiés ; dans ces cas, les scientifiques les placent dans la catégorie « sexe non déterminé », explique Constanzo.
Chaque année entre octobre et avril une petite équipe de chercheurs parcourt toute la plage et la zone côtière pour recueillir des informations sur les éléphants de mer. Image avec l’aimable autorisation de la WCS
Les éléphants de mer passent la majeure partie de leur vie dans l’eau et ne viennent à terre que pour se reproduire et muer, un processus qui dure environ un mois. Pendant cette période, ils ne retournent pas à l’eau pour se nourrir. Cela signifie que tout changement qui augmente leur consommation d’énergie est problématique, selon Arredondo. C’est pourquoi les chercheurs veillent à garder une distance de sécurité avec les phoques afin de « ne pas perturber » leur comportement.
En plus de compter les éléphants de mer en personne, ils utilisent également des drones pour cartographier la zone. Cela aide les chercheurs à obtenir des images détaillées de l’emplacement des éléphants de mer.
Francisco Brañas, expert à l’unité des aires protégées du département régional de l’environnement, explique que le traitement de ces images permet aux chercheurs d’obtenir des informations supplémentaires, telles que les mesures individuelles. Les chercheurs peuvent estimer le poids corporel des éléphants de mer et évaluer leur condition physique pour déterminer s’ils disposent de suffisamment de nourriture, selon Brañas.
« Les images capturées par les drones nous offrent une vue plus complète et précise de la colonie », dit-il. La surveillance régulière a été essentielle pour évaluer le rétablissement de la colonie, qui a été décrite pour la première fois en 2006. Cette année-là, 46 individus ont été recensés. Depuis, les effectifs ont globalement augmenté.
L’augmentation spectaculaire de la population d’éléphants de mer dans la baie Jackson témoigne non seulement de la résilience de l’espèce, mais aussi des efforts de collaboration essentiels à la réalisation de ce suivi dans une zone isolée et soumise à des conditions météorologiques extrêmes.
Les éléphants de mer passent la majeure partie de leur vie dans l’eau et ne viennent à terre que pour se reproduire et muer. Image avec l’aimable autorisation de Pablo Lloncón.