[Cap au Sud #7] TraversĂ©e de l’Atlantique 1/2 : du Cap Vert Ă  l’archipel de Sao Pedro et Sao Paulo (BrĂ©sil)

Nous avons quittĂ© la baie de Tantum, sur l’Ă®le Brava (Cap Vert) le mardi 19 novembre Ă  midi. Le waypoint est mis sur le traceur et nous annonce la couleur : 1858mn de Salvador de Bahia, en route directe et sans contourner la bosse de Natal. En rĂ©alitĂ© il faut prĂ©voir 2000mn. Il fait beau et chaud : depuis notre arrivĂ©e au Cap Vert nous vivons en short et t-shirt, et il en sera de mĂŞme jusqu’Ă  l’autre bout de l’Atlantique. Les prĂ©visions nous poussent Ă  faire route au Sud/Sud-Ouest pour Ă©viter la grande zone sans vent s’Ă©tendant depuis le sud de l’Ă®le volcanique Fogo. Nous hissons GV et artimon et dĂ©roulons le yankee. Milagro roule et nous nous trainons un peu Ă  4,5 noeuds. Nous dĂ©cidons quelques heures plus tard de sortir le spinnaker, passant cette fois Ă  une vitesse moyenne de 8 noeuds.

Spinnaker Milagro Karukinka
Manoeuvre de spinnaker – Voilier Milagro (Karukinka)

En fin de journĂ©e nous prenons la mĂ©tĂ©o sur le site de l’Organisation MĂ©tĂ©orologique Mondiale pour la zone nous concernant : CAPE VERDE de la Metarea II. Est/Nord-Est 3/4, parfois 5 près des Ă®les et mer peu agitĂ©e. Les milles dĂ©filent, nous faisant passer de la zone du Cap Vert Ă  la zone SIERRA LEONE, les conditions restent les mĂŞmes, nous croisons rarement de gros navires au loin, comme le tanker Abdias Nascimentos, et le calme n’est troublĂ© que par le gĂ©nĂ©rateur qu’il nous faut parfois mettre en route pour recharger les batteries.

Le surlendemain du dĂ©part, nouvelle avarie : la poulie de la drisse du spinnaker se rompt et fait un grand plongeon. il nous faut agir vite pour affaler, le risque Ă©tant que la drisse s’use rapidement et se coupe Ă  la sortie de tĂŞte de mât. Autrement dit, faute de rĂ©a pour la guider, le spi tire la drisse vers le bas et elle rague dans la fente du mât. Nous affalons donc la voile et dĂ©roulons le yankee. Faute de l’appui du spi par petit temps (8-10 noeuds de vent) et avec la houle sur le travers nous nous traĂ®nons et Milagro roule. Ce n’est que le lendemain matin que la situation s’amĂ©liore, avec plus de vent (12-20 noeuds). Les prĂ©visions mĂ©tĂ©o ne changent pas pour la zone SIERRA LEONE, hormis de gros orages au sud de la zone mais qui ne nous concernent pas. En dĂ©but d’après-midi la houle ayant diminuĂ©, Etienne grimpe au mât pour remplacer la poulie de spi et nous rapporte ensuite ce qu’il reste de la poulie prĂ©cĂ©dente : le support en inox du rĂ©a… A 17h nous voilĂ  de nouveau spi en tĂŞte, Ă  7 noeuds et la vie Ă  bord redevient très confortable.

Hamac sous spi Milagro Karukinka
En hamac sous spi, avec le linge qui sèche – Voilier Milagro (Karukinka)

Depuis notre dĂ©part la tempĂ©rature du bateau est rapidement montĂ©e Ă  29 degrĂ©s (et plus…) Ă  bord… Autant dire que cuisiner se rĂ©vèle une idĂ©e aussi peu motivante que de prĂ©parer une fondue sous 35 degrĂ©s! Adieu gâteaux, pain maison, pâte Ă  tarte… bref : tout ce qui nĂ©cessite un four. L’objectif principal est de ne pas rĂ©chauffer le bateau plus qu’il ne l’est dĂ©jĂ . A dĂ©faut de pouvoir cuire longuement des aliments au four, nous nous lançons dans des essais de cuisine « locale ». Parmis ceux-ci des foufous Ă  base de farine de manioc (pour le façonnage il nous manque encore quelques transat pour que ce soit maĂ®trisĂ©), accompagnĂ©s de choux rouge cuit Ă  la noix de coco avec une sauce crĂ©meuse au citron vert parfumĂ©e Ă  la noix de muscade. Nous improvisons !

Foufous manioc Milagro Karukinka
Façonnage des foufous par François et Juliane – Voilier Milagro (Karukinka)

Ă€ notre grand dĂ©sarroi, les fruits et lĂ©gumes que nous avions achetĂ© au marchĂ© de Praia se sont rĂ©vĂ©lĂ©s d’une piètre capacitĂ© de conservation. Ils ont très vite pourri et pour en jeter le moins possible, nous avons cuisinĂ© ce que nous avons pu. Nous avons tout de mĂŞme dĂ» faire quelques entorses au bannissement du four et des cuissons longues pour Ă©couler l’Ă©quivalent de deux rĂ©gimes de bananes ! François s’est retrouvĂ© Ă  passer un saladier de pâte Ă  pancakes bananes, soit une petite activitĂ© hammam d’une heure de bon matin! Et Lauriane s’est chargĂ©e de faire un fondant banane-chocolat version famille nombreuse qui aura durĂ© une journĂ©e. Nous avons transpirĂ© mais nous nous sommes rĂ©galĂ©s ! Toupie et Parebat souffrent eux aussi de la chaleur et ont de fait le droit Ă  plusieurs trempages par jour.

MalgrĂ© un frigo consĂ©quent, nous avons du faire très attention Ă  cuisiner la juste quantitĂ© afin qu’il n’y ait pas restes. La chaleur fait très vite passer les denrĂ©es. Aucun risque pour le scorbut, les cales de Milagro Ă©tant richement fournies en conserves de lĂ©gumes, fruits et pâtĂ© HĂ©naff. Seules les quelques provisions fraĂ®ches supplĂ©mentaires de Brava rĂ©sisteront, avec un premier prix difficile Ă  dĂ©cerner entre le chou frisĂ©, les carottes et les betteraves.

La vie Ă  bord est rythmĂ©e par les quarts : 3h chacun avec 2h en commun, l’heure seul.e est au milieu du quart. Damien et Lauriane continuent quant Ă  eux leur alternance toutes les trois heures. La journĂ©e, il y a souvent quelqu’un qui est sur le pont en plus, Ă  lire ou contempler l’horizon. La nuit, cette heure seul.e est un cadeau. Joie de la partager parfois avec Damien ou Lauriane. Durant ces pĂ©riodes il nous faut rester Ă©veillĂ©s puisque nous assurons la sĂ©curitĂ© du bord pendant que les Ă©quipiers se reposent, vaquent Ă  de multiples occupations, profitent de l’ombre et rĂ©visent le matelotage de base.

Matelotage Milagro Karukinka
Matelotage dans le cockpit – Voilier Milagro (Karukinka)

RĂ©gulièrement se fait entendre un : « dauphins !! » et tout le monde sort Ă  la hâte, enfile un gilet de sauvetage et s’avance Ă  la proue du navire pour les voir jouer Ă  l’étrave. C’est toujours magique de les voir glisser, se croiser, plonger après avoir frĂ´lĂ© le bateau et parfois sauter hors de l’eau en se laissant retomber sur le cĂ´tĂ©. Nous avons aussi quelques visites de poissons volants qui malheureusement pour certains s’échouent sur le pont. Nous admirons rĂ©gulièrement leurs dextĂ©ritĂ© en vol pour Ă©chapper aux prĂ©dateurs. Des fous de bassan viennent Ă©galement nourrir leur curiositĂ© en jouant dans les voiles et nous accompagnent durant tout le trajet. L’un d’eux nous gratifiera d’ailleurs d’un bel autographe sur la grand voile! Pas très grave en gĂ©nĂ©ral mais, Ă  4m de haut, impossible Ă  nettoyer! 

Depuis St Nazaire jusqu’Ă  l’équateur, ce sont 44 degrĂ©s de latitude qui ont Ă©tĂ© franchis. Si au dĂ©but le dĂ©compte ne semble pas important, Ă  l’approche de LA ligne nous nous rĂ©jouissons de cette avancĂ©e vers ce passage symbolique. Un changement majeur a eu lieu pendant ce trajet, nous sommes passĂ© du Nord au Sud. Dans un premier temps, nous avons passĂ© l’équateur mĂ©tĂ©orologique plus au nord que l’équateur gĂ©ographique. C’est, pour simplifier les choses, la zone de changement des vents avec, entre les deux zones nord et sud une zone appelĂ©e le pot au noir et connue pour son absence de vent et pour jouer avec la patience des voileux qui le traverse. Pour notre part, nous aurons du vent tout du long grâce Ă  un routage bien menĂ© par Damien !

Au petit matin, Lauriane est venue réveiller les derniers endormis : la ligne sera franchie dans quelques minutes! Le temps d’enfiler une tenue adéquate et nous voilà tous sur le pont pour regarder le GPS afficher 00’00.000. C’est court, c’est éphémère et c’est joyeux. Ça y est nous sommes dans l’hémisphère sud! Dans la mer, pas de ligne pour indiquer le passage mais notre skipper voulait tout de même marquer le coup. Donc nous voilà à 7h30 tous en maillot de bain sur le pont, Toupie et Parebat aussi (sans maillot de bain…). Le baptême consiste alors à remplir chacun son tour un seau d’eau et à se le verser sur la tête. Entre la température de l’eau et celle de l’air, nous ne nous sommes pas fait prier pour passer à l’action! Toupie et Parebat ont aussi eu le droit à la douche, avec le contenant adapté à leurs tailles !

Passage Equateur Karukinka Milagro VHF
Passage de l’Ă©quateur ! Voilier Milagro (Karukinka)
Seau deau Equateur Milagro Karukinka
BaptĂŞme de l’equateur – Voilier Milagro (Karukinka)
Passage Equateur Karukinka Milagro Toupie
Toupie a franchi l’equateur ! Voilier Milagro (Karukinka)
Parebat Passage Equateur Milagro Karukinka
Et Parebat aussi ! Voilier Milagro (Karukinka)

S’en est suivi un petit dej de fĂŞte et le soir nous avons dĂ©bouchĂ© le champagne de Papy Bernard, offert spĂ©cialement pour le passage de la ligne, avec un apĂ©ro dĂ©licieux, le tout au milieu de l’Atlantique, la joie simple d’un moment rien qu’Ă  nous.

Apero equateur Milagro Karukinka
Champagne et apĂ©ro dĂ®natoire pour fĂŞter le passage de l’equateur – Voilier Milagro (Karukinka)

Au dĂ©part de Brava, nous avons eu l’espoir de croiser les VendĂ©e globistes, ce sera peine perdue Ă  quelques heures près pour le Roi Jean Le Cam. Milagro Ă©tait Ă  la hauteur de Charal mais les coureurs sont passĂ©s bien plus Ă  l’ouest de nous et les deux passant Ă  l’Est du Cap Vert sont partis sans prendre le temps de nous attendre ! 

Pour notre part, et pour passer au plus vite ce mauvais Ă©pisode du rĂ©sumĂ© de notre transat, abordons tout de suite le sujet du spinnaker, pour bien vite passer Ă  autre chose. C’était pendant une belle nuit de novembre, après les rĂ©parations Ă  Praia, nous Ă©tions heureux d’avancer grâce Ă  cette belle voile blanche et bleue, Ă  plus de 8 noeuds de moyenne. Les milles s’enchaĂ®naient et le confort Ă  bord Ă©tait parfait (i e pas de roulis). Tout allait bien jusqu’à l’arrivĂ©e de cet affreux nuage que l’Ă©quipière de quart n’a pas vu arriver, Ă  l’abri sous le bimini. Tout est allĂ©e très vite. D’un coup le vent a changĂ© de sens, 180°. Le spi a commencĂ© Ă  se deventer puisque les changements brusques sur un navire de 45 tonnes mettent du temps Ă  changer sa direction. Damien et Lauriane ont sautĂ© de leurs couchettes pour intervenir et, Ă  la vue de ce nuage très menaçant, le premier de la sorte depuis le dĂ©part, affaler au plus vite. Les premières gouttes de pluie arrivant, Lauriane interpelle tout le monde pour qu’un Ă©quipier se charge de fermer tous les hublots et panneaux de pont, et que les autres viennent au plus vite sur le pont pour aider Ă  affaler le spi, la chaussette bloquant, il fallait une personne Ă  la barre, une Ă  l’Ă©coute et deux Ă  la proue pour tirer sur le va-et-vient de la chaussette. Le renfort tardant, impossible Ă  deux de tirer sur cette fichue chaussette qui reste bloquer en tĂŞte de mât et de gĂ©rer en mĂŞme temps l’Ă©coute, une dizaine de mètres sĂ©parant les deux postes. La force du grain augmente et tous les efforts pour dĂ©bloquer la chaussette restent vains. D’un coup le spi s’Ă©ventre au moment oĂą le renfort arrive sur le pont, une partie de la voile tombe Ă  l’eau, et l’autre partie part s’emmĂŞler dans les haubans, la faute Ă  un vent changeant continuellement de direction sous une violente pluie. Nous rĂ©cupĂ©rons l’intĂ©gralitĂ© du spi Ă  bord et l’amarrons sur le pont, contre le filet des filières. Tout le monde va bien, l’essentiel est lĂ . MalgrĂ© cela, l’ambiance est pesante. Faute de pouvoir dĂ©rouler le yankee, nous mettons en marche le moteur et attendons le lever du jour pour retirer les morceaux restĂ©s coincĂ©s en haut du mât. Au petit matin, nous sommes tous encore sous le poids de ce qui ressemble Ă  un mauvais rĂŞve. Nous rangeons le coeur lourd cette voile dans son sac, quasi convaincus qu’elle est irrĂ©parable et qu’il faudra lui inventer une nouvelle histoire pour qu’elle serve Ă  autre chose qu’Ă  nous faire glisser au portant. Fermons le sujet, nous le rĂ©ouvrirons une fois l’avenir de cette voile dĂ©cidĂ©.

Ă€ dĂ©faut de concurrence avec les navires de course ou les cargos, Damien s’est remit dans la peau d’un rĂ©gatier Ă  la première occasion venue, au milieu de nulle part. Après des jours sans autre navire Ă  l’horizon que de rares porte containers et tankers au loin, nous voyons en fin de journĂ©e apparaĂ®tre un voilier Ă  la poupe de Milagro. Son cap nous faisait redouter l’innacceptable : il veut nous passer au vent ! Diantre ce ne sont pas des manières ! Branle bas de combat sur Milagro, tous dans le cockpit, toutes voiles dehors et rĂ©glages aux petits oignons pendant près d’une heure pour obliger ce concurrent Ă  terriblement lofer (serrer le vent), jusqu’Ă  ce qu’il se rĂ©signe Ă  abattre pour nous passer sous le vent. Non mais ! Le navire en question, un voilier tout neuf sorti des Sables d’Olonnes (France) et menĂ© par un Ă©quipage argentin, ne joue pas dans la mĂŞme catĂ©gorie (52 pieds et beaucoup plus lĂ©ger) mais notre Milagro n’a pas dĂ©mĂ©ritĂ©, Ă  9 noeuds, Après notre petite victoire, nous avons essayĂ© de les joindre Ă  la VHF mais, vexĂ©s, personne ne nous a rĂ©pondu!

Regate atlantique Milagro Karukinka
Concurrent d’une rĂ©gate improvisĂ©e en plein Atlantique Sud – Voilier Mialgro (Karukinka)

La nuit suivante nous approchons des Ă®lots (pour ne pas dire rochers) de Saint Pierre et Saint Paul. SituĂ©s Ă  environ 500mn de Natal (cĂ´te brĂ©silienne), ils se composent de plusieurs Ă®lots et rĂ©cifs. Le plus grand d’entre eux, Belmonte, ne dĂ©passe pas les 5500m². DĂ©couverts le 20 avril 1511 par le portugais Garcia de Noronha, ces Ă®lots ont aussi Ă©tĂ© visitĂ©s quelques siècles plus tard par Charles Darwin, lors de son voyage sur le HMS Beagle. Depuis 1988 ils sont rattachĂ©s Ă  l’Ă©tat du Pernambouc et, dix ans plus tard est inaugurĂ©e la Estação CientĂ­fica do ArquipĂ©lago de SĂŁo Pedro e SĂŁo Paulo, un bâtiment de 40m² occupĂ© par 4 chercheurs/militaires qui se relaient tous les 15 jours. D’un point de vue biologique, la vĂ©gĂ©tation y est rare et plusieurs colonies d’oiseaux y habitent, dont des fous bruns et des noddis (bruns et noirs). Ces derniers seront Ă  partir de lĂ  nos compagnons de route nocturnes, jusqu’Ă  Salvador ! Amateurs des oiseaux de Hitchcock, les voici : https://karukinka.eu/wp-content/uploads/2024/12/Noddis-bruns_Milagro_karukinka_122024.wav

Après Ă©tude des cartes et donnĂ©es hydrographiques disponibles, nous laissons franchement tomber l’idĂ©e de s’en approcher de nuit et encore plus pour mouiller. Pour vous faire une idĂ©e de la morphologie des lieux, voici les cartes du service hydrographique brĂ©silien que nous avons pu consulter :

Archipelago Sao Pedro Sao Paulo hidrografia brazil
Carte marine issue du Service Hydrographique brésilien
Archipelago Sao Pedro Sao Paulo hidrografia brazil 1 1000
Carte marine issue du Service Hydrographique brésilien, plus détaillée

La suite d’ici quelques jours ;-)

[Cap au Sud #6] Escale au Cap Vert

[Cap au Sud #6] Escale au Cap Vert

Mi-novembre, nous voici au mouillage dans la baie de Praia, la capitale de l’archipel du Cap Vert, pays indĂ©pendant depuis 1971. La descente vers le sud est dĂ©jĂ  bien entamĂ©e puisque nous sommes dĂ©sormais Ă  la latitude de Dakar (SĂ©nĂ©gal). 

L’arrivĂ©e s’est faite de nuit en longeant les Ă®les de part et d’autre sans les voir. Nous pensions croiser des pĂŞcheurs ou apercevoir des phares mais rien, seuls de rares halos lumineux au loin nous donnaient l’indication de prĂ©sences humaines et pas un nuage pour annoncer les Ă®les. Nous en avons conclu que ces Ă®les Ă©taient prĂ©servĂ©es de la pollution lumineuse et peu habitĂ©es. Cette arrivĂ©e, aux lueurs de la ville endormie et dans le plus grand calme, s’est faite sans mĂŞme rĂ©veiller les Ă©quipers calĂ©s dans leurs couchettes. Avant d’aller se reposer, nous jetons un oeil au grand drapeau du Cap Vert qui surplombe une falaise situĂ©e face au navire. Quelques chiens se rĂ©pondent dans le lointain, rappelant Ă  Toupie qu’elle n’est maintenant plus seule Ă  des milles Ă  la ronde !

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[Cap au Sud #6] Escale au Cap Vert 39

Pendant la première journĂ©e, l’équipage reste Ă  bord, après une grasse matinĂ©e bien mĂ©ritĂ©e et en attendant les formalitĂ©s d’entrĂ©e dans le pays accomplies. En dĂ©but d’après-midi, sous une chaleur Ă©crasante malgrĂ© le vent, un nouvel Ă©quipier nous rejoint : François. C’est la deuxième fois qu’il vient faire un stage Ă  bord puisqu’il Ă©tait de l’Ă©quipe Pornichet-Dublin en avril dernier. Cette fois avec des tempĂ©ratures toutes autres, il est ravi de retrouver sa cabine tribord et l’Ă©quipage du Milagro ! Nous fĂŞtons ça en improvisant des mojitos avec un rhum des Canaries.

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[Cap au Sud #6] Escale au Cap Vert 40
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[Cap au Sud #6] Escale au Cap Vert 41

Puis il faut commencer Ă  remettre en ordre le navire : gros mĂ©nage, lessives et avitaillement en nourriture. Damien et Lauriane se chargent des formalitĂ©s administratives. Elles sont multiples puisqu’il faut se prĂ©senter Ă  la police maritime, puis Ă  l’immigration. Les bureaux n’Ă©tant pas toujours ouverts et aucun horaire indiquĂ©, l’attente se fait parfois longue ! En rentrant de ces dĂ©marches, Lauriane nous trouve un improbable « taxi privé » qui simplifiera grandement nos dĂ©placements : Djonni ! Entre musique Ă  fond et conduite parfois en mode rallye dans les rues de Praia, il y a de l’ambiance !

Nous passons quelques jours Ă  Praia pour se reposer et s’acclimater Ă  la chaleur. Le spinnaker qui avait quelques Ă©gratignures suite Ă  sa baignade imprĂ©vue est rĂ©parĂ© (couture + scotch Ă  voile) afin d’ĂŞtre Ă  nouveau utilisĂ© lors de la transatlantique. Deux Ă©quipiers rentrent en France avant qu’Etienne ne nous rejoigne depuis Bilbao.

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[Cap au Sud #6] Escale au Cap Vert 42

Juliane, la montagnarde du bord, grimpe Ă  plusieurs reprises en haut du mât pour vĂ©rifier la poulie et la sortie de mât avant de passer une nouvelle drisse toute neuve en dyneema (encore merci Toni!). Ce qui s’avère simple prĂ©sentĂ© en quelques mots a quand mĂŞme Ă©tĂ© plus pĂ©nible que prĂ©vu. Le mât de Milagro fait 21m et, la drisse prĂ©cĂ©dente ayant cassĂ©, le restant Ă©tait retombĂ© dans le mât sans pouvoir servir de guide Ă  la nouvelle. D’oĂą l’idĂ©e de faire descendre un petit bout avec un plomb Ă  son extrĂ©mitĂ©. Sauf qu’Ă  deux reprises le plomb bloque au niveau des barres de flèches et impossible de le remonter ou descendre. Après quelques essais la petite camĂ©ra du bord ne nous donne pas non plus de rĂ©ponse au « pourquoi ça bloque » et finalement, après une petite sieste, Damien tente un Ă©nième passage et cette fois ça fonctionne : la nouvelle drisse est en place et pile dans les temps pour prendre l’annexe direction le petit bistrot de la plage afin de boire une Strela Kriola bien fraĂ®che.

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[Cap au Sud #6] Escale au Cap Vert 43

Comme chaque soir nous dĂ©barquons les pieds dans l’eau (et parfois plus avec la houle) et sommes accueillis par le petit groupe d’hommes et leur meute de chiens qui vivent sur cette plage et veillent, contre petite rĂ©munĂ©ration, sur notre annexe. Le jour prĂ©cĂ©dent l’arrivĂ©e d’Etienne nous aurons la chance de dĂ®ner avec une tourterelle blottie au calme dans les mains de Lauriane (elle et les oiseaux…) et au son de la musique cap-verdienne, dont vous pourrez Ă©couter un petit extrait ici (pour les mĂ©lomanes exigeants, c’est une prise de son avec le tĂ©lĂ©phone…).

Le lendemain nous partons au marchĂ© municipal, celui situĂ© sur le Plateau et qui regorge de personnes, de bruits, de produits inconnus et de parfums. Les fruits et lĂ©gumes sont exposĂ©s mais aucun prix n’est affichĂ© ! Notre chauffeur de taxi privĂ© ne nous ayant pas suivi et notre portugais Ă©tant plus que rudimentaire, le prix payĂ© après calcul du change nous paraĂ®t totalement prohibitif, Ă  nous l’Ă©tiquette de touristes ! Nous repartons les sacs remplis de produits locaux : maracuja, farine de manioc, fleurs d’hibiscus sĂ©chĂ©es (pour le bissap), graines de baobab, pommes-cannelle… Au retour, Djonni, notre chauffeur de taxi, viendra Ă  bord et sera refait de pouvoir faire un rĂ©el Instagram depuis le pont du navire : la jeunesse ici a les mĂŞmes prĂ©occupations que sur le vieux continent! Comme Ă  chaque aller-retour nous nettoyons mĂ©ticuleusement tout pour Ă©viter qu’un passager clandestin potentiellement envahissant ne prenne place : le cafard. Ils sont nombreux, Ă  la nuit tombĂ©e, Ă  se faufiler un peu partout autour de nous, d’oĂą notre grande crainte d’en embarquer malencontreusement un Ă  bord.

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[Cap au Sud #6] Escale au Cap Vert 49
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[Cap au Sud #6] Escale au Cap Vert 50

Un dernier grand coup de mĂ©nage est fait pour nettoyer l’intĂ©gralitĂ© du bateau pendant que les formalitĂ©s de sortie du territoire sont faites et nous levons l’ancre en direction du sud de l’Ă®le Santiago pour passer la nuit. Le lendemain matin, après baignade Ă©videmment (l’eau est Ă  28 degrĂ©s…), nous partons en direction de l’Ă®le Brava (4000 habitants) pour un dernier stop avant le BrĂ©sil et en laissant dans notre sillage l’Ă®le volcanique Fogo.

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[Cap au Sud #6] Escale au Cap Vert 52

Cette petite Ă®le est rĂ©putĂ©e pour ĂŞtre l’une des plus belles du Cap Vert et nous confirmons bien que la baie de Tantum est somptueuse avec ses barques colorĂ©es et le village de pĂŞcheurs qui la surplombent. Après pĂŞche d’une magnifique carangue par Etienne, nous nous mettons en route. L’arrivĂ©e dans le village se mĂ©rite, avec une descente de l’annexe Ă  la nage (impossible de dĂ©barquer l’annexe avec la houle) et une montĂ©e sèche sous un soleil de plomb. De lĂ  nous nous rendons dans le centre du village et demandons comment rejoindre Nova Sintra, la « ville » principale, pour visiter et tenter de trouver quelques produits frais encore, ceux du marchĂ© pourrissant dĂ©jĂ  les uns après les autres… En l’espace d’un quart d’heure nous nous retrouvons comme des sardines en boĂ®te dans le minibus scolaire, entourĂ©s d’enfants Ă©trangement silencieux : notre prĂ©sence les rend muets ce qui fait bien rire le chauffeur. Nous voyons dĂ©filer les kilomètres sur des routes escarpĂ©es et pavĂ©es. Plus nous gagnons en altitude plus la vĂ©gĂ©tation devient luxuriante, avec des manguiers, papayers, ipomĂ©es, yuccas, ficus et grands hibiscus. Nous arrivons Ă  destination une demi-heure plus tard et dĂ©couvrons LA boisson cap-verdienne : l’Actimalt. Bien frais sur le chemin du retour, c’est un rĂ©gal ! Puis ce sera retour sur la plage chargĂ©s comme des mules et un chargement de l’annexe assez Ă©pique, tous en maillots et aidĂ©s par les pĂŞcheurs pour passer un Ă  un les sacs de nourriture. Après une bonne nuit nous levons l’ancre accompagnĂ©s par les voeux de bon voyage des pĂŞcheurs que nous croisons au sortir de la baie et avec l’envie de revenir au Cap Vert plus longuement car entre les paysages et l’accueil des habitants, cette Ă©tape est vraiment Ă  ne pas manquer.

Rdv d’ici quelques jours depuis l’autre hĂ©misphère : sous le soleil du BrĂ©sil Ă  Salvador de Bahia!

[Cap au Sud #5] Stage haute mer de Radazul (Tenerife, Canaries) Ă  Praia (Cap Vert)

[Cap au Sud #5] Stage haute mer de Radazul (Tenerife, Canaries) Ă  Praia (Cap Vert)

Nous ne vous parlerons pas du beurre qui était en rupture de stock à bord, >3kg ont été écoulés depuis St Nazaire et nous sommes passés à deux doigts d’aborder des navires que nous croisions sur la route pour récupérer une plaquette !

Nous sommes partis des Canaries tout dĂ©but novembre après avoir laissĂ© Ă  quai nos 2 p’tits suisses et Laurent qui s’en sont retournĂ©s Ă  leurs mères patries et Juliane, une Ă©tudiante de 21 ans, est venue complĂ©ter l’équipage jusqu’au BrĂ©sil. L’équipage qui Ă©tait jusqu’alors majoritairement masculin est devenu fĂ©minin.

SY Milagro Canaries Cap Vert Karukinka
[Cap au Sud #5] Stage haute mer de Radazul (Tenerife, Canaries) Ă  Praia (Cap Vert) 77

Après un départ au moteur faute de vent, nous avons récupéré la veine de vent (n’y voyez pas un manque du métier de Aude, c’est bien le terme technique). Nous marchons au portant; c’est à dire avec un vent arrière ou de travers, ce qui rend le bateau relativement plat en dépit d’un roulis persistant. La houle est d’1-1,5m ce qui rend la vie à bord plus confortable que les semaines précédentes. Et le soleil continue d’égayer nos journées!! On est bien bien bien comme le dit l’expression !

Sailing Milagro Juliane
[Cap au Sud #5] Stage haute mer de Radazul (Tenerife, Canaries) Ă  Praia (Cap Vert) 78

La meilleure preuve que nous allons bien est la consistance de nos assiettes. Du poulet riz nous passons au poulpe à la galicienne et aux empanadas préparés par Lauriane, un maigre à la cuisson parfaite concocté par Damien, des fajitas végétariennes et pancakes à la banane réalisés par Juliane… bref, les présentations et richesses des menus sont bien visibles ! Et nous profitons de la faible zone de trafic pour prendre nos repas tous ensemble, tout en gardant un œil attentif à la veille.

Poulpe Milagro
Poulpe Ă  la galicienne
Empanadas Milagro4
Empanadas banane-chocolat
Empanadas Milagro3
Empanadas aux encornets et empanadas au fromage

Le manque de beurre aux cristaux de sel, qui pourrait faire sourire voire mĂŞme rire, est en soit un vĂ©ritable problème : nous ne pouvons plus faire de crĂŞpes, de gâteaux ou de scones! Mais surtout, retrouver du beurre salĂ© sous les tropiques est peu probable ! Allons-nous pouvoir continuer… ?

Le vent étant bien stable, nous sortons le spinnaker. Pour tous ceux qui ont eu à gréer cette voile, vous en connaissez la signification : beau temps, belle mer et surtout, surtout elle doit être hissée pour longtemps ! Pari réussi car nous faisons de longs bords sous spi, dépassant même les 180mn en 24h. (10-15 nœuds de vent) Il faut préciser que les empannages demandent un peu de logistique et de forces dans les bras! 90 kg de voile à hisser sur chaque bord (il y a 1 drisse par bord), et repasser le bras (il est unique car il n’est pas possible de faire passer la voile devant les 2 voiles d’avant à poste).

Spinnaker Milagro 1
Hisse la chaussette !
Spinnaker Milagro3
Spinnaker du voilier Milagro

Après avoir passĂ© la barre des 300 milles nautiques nous sĂ©parant de l’arrivĂ©e, au petit matin, durant le quart qui ouvre le jour, un grand POUM est entendu et le bateau ralentit brusquement, passant de 8,5 Ă  4 nĹ“uds. Juliane, Lauriane et Aude qui Ă©taient de quart se regardent pour donner une signification Ă  ce bruit totalement inhabituel. Lauriane monte sur le pont et un : « Damien, on n’a plus de spi ! » rĂ©sonne dans le carrĂ©. Ă€ notre grande surprise le spi est Ă  l’eau, le long de la coque de Milagro ! Nous voici lancĂ©s dans une manĹ“uvre qui durera moins d’une heure. Ne pas se prĂ©cipiter, chercher comment rĂ©cupĂ©rer ce spi encore retenu par les points d’amure et d’écoute. Un peu de rĂ©flexion est nĂ©cessaire; l’artimon est affalĂ©, il nous faut empanner pour ne pas que le bateau passe sur le spi, ce qui rendrait la rĂ©cupĂ©ration sĂ©rieusement plus complexe. Ce serait une très mauvaise idĂ©e d’allumer le moteur, au risque d’ajouter des problèmes au problème en coinçant par exemple un bout ou la voile dans l’hĂ©lice… Il faut donc barrer avec la houle et le vent, sans voile Ă  poste, pour maintenir une certaine distance entre le franc bord et la voile. DĂ©cision est prise de larguer l’écoute pour rĂ©cupĂ©rer la voile par l’avant du navire. Après des efforts assez intenses (180m² de voile, quand mĂŞme…), le spi est dans son sac et l’ensemble des bouts sont Ă  bord, l’artimon est de nouveau hissĂ©, le yankee et la trinquette dĂ©roulĂ©s et la route reprend, un peu moins vite certes mais elle reprend. Un cafĂ© coule, nous sommes tous les quatre contents de la tournure des Ă©vĂ©nements : une leçon de voile grandeur nature ! Il est certain que garder son calme est d’une grande aide dans ce genre de situation.

Une quarantaine de grands dauphins viennent jouer à l’étrave, quelques poissons volants sont visibles et d’autres s’échouent sur le bateau, une Océanite du Cap Vert vient aussi jouer les passagères clandestines plusieurs heures sur le pont durant la nuit du samedi au dimanche 10 novembre… mais toujours pas de baleine, ceci malgré nos demandes répétées au capitaine !

Oceanite Juliane
OcĂ©anite du Cap Vert – Juliane Goninet
Dauphins Juliane
Grand dauphin – Juliane Goninet


La nuit reste une partie de plaisir, les constellations égayent toujours nos quarts. Parfois, le ciel est plus voilé mais les étoiles filantes restent bien visibles. C’est aussi l’occasion de croiser des cargos qui laisse Milagro pensif. En effet, nous croisons des navires de 300 m de long et cela nous invite à réfléchir à ce qu’ils transportent pour notre consommation: gaz, pétrole et objets de pacotille; les écolos nombreux à bord se sentent un peu dépassés par cette vision.
Inutile de prĂ©ciser qu’une collision avec ce type de navire nous laisserait aucune chance! La vielle est donc bien nĂ©cessaire d’autant plus qu’ils apparaissent Ă  l’AIS parfois bien après que leurs nombreuses lumières soient visibles. En revanche, les Ă©quipiers de quart hallucinent avec les sons improbables qui sortent de la VHF en veille sur le canal 16 ! Miaulements, rires,… tout y passe !

coucher soleil Milagro
[Cap au Sud #5] Stage haute mer de Radazul (Tenerife, Canaries) Ă  Praia (Cap Vert) 79

François, qui nous rejoint au Cap Vert, apporte un livre sur l’astronomie et sur la navigation de secours : nous allons comprendre le cycle de la Lune qui nous laisse encore pensifs : de rapide apparition et pas de logique dans la progression des quarts et de la position. Ce quart est aussi l’occasion de constater la chance que nous avons d’être lĂ  oĂą nous sommes, prĂ©sents Ă  nous. C’est de la rĂ©galade! Avancer sous spi Ă  7 – 8 nĹ“uds dans le clair de lune et avec une chaleur qui s’amĂ©liore est une rĂ©elle chance. Les quarts de nuits sont aussi propices aux discussions de fond et les Ă©changes sont plus profonds. Chanceuses durant leur quart nocturne en commun, Juliane et Lauriane ont pu voir les voiles de Milagro illuminĂ©es par une chute de mĂ©tĂ©orite !

Quant au quart du matin, après un passage « froid », nous assistons au lever du jour : petit Ă  petit mais assez rapidement la lueur du jour devient clartĂ© et enfin jour. Les couleurs sont changeantes : d’une nuit sombre jaillit doucement un Ă©clat de lumière, le gris s’éclaircit devenant jaune orangĂ© puis enfin jaune… et le soleil fait son apparition. Les premiers rayons du soleil rĂ©chauffent : cela veut aussi dire qu’il est l’heure du petit dej sur le pont en admirant ce spectacle.

Il faut tout de même faire un point poisse dans ce décor de rêve :
– D’abord l’humiditĂ© de nuit qui transperce. Nous devenons poisseux! Ça passe ce n’est pas très grave puisque le teck du bateau n’est mouillĂ© que jusqu’à 11h le matin. Les planches de natations sont d’excellents sous fesses pour ne pas mouiller notre sĂ©ant dans cette humiditĂ©! En passant sous le 20ème degrĂ© nord, cela s’arrange, nous pouvons faire les quarts en shorts.
– Le toilette avant qui Ă©tait bouchĂ©! Nous vous avions passĂ© ce dĂ©tail dans les prĂ©cĂ©dents rĂ©cits mais pour qui a naviguĂ©, une histoire « toilette Â» est obligatoire. Toujours est-il que Damien a eu le courage, Ă  dĂ©faut du plaisir, d’aller dĂ©boucher pour la 4ème fois la pompe dans lequel se coinçait les tampons de la lunette des wc. Les tampons sont aujourd’hui vissĂ©s et nous avons mission de veiller Ă  ce que les 4 restent bien en place!!

ArrivĂ©e de nuit dans la baie de Praia, le rĂ©veil se fait au son de la ville : voitures, chiens et coqs se relaient… entendus depuis le mouillage pour un retour en douceur Ă  terre. Rapidement nous nous mettons Ă  l’ouvrage pour pouvoir repartir dans les prochains jours : Milagro se transforme en laverie et l’avitaillement en produits frais fait le bonheur de nos papilles avides de dĂ©couverte de nouvelles saveurs.

SY Milagro Praia Cap Vert 1
Le voilier Milagro dans la baie de Praia (Cap Vert)

PS : On nous demande dans l’oreillette l’origine de notre Ă©quipier Ă  antennes : Parebat’. C’est un escargot Ă©cossais (un petit gris des Ă®les HĂ©brides s’il vous plaĂ®t) arrivĂ© tout seul en juillet dernier, sur le pont du bateau qui Ă©tait pourtant au mouillage. DĂ©couvert un soir, il Ă©tait prĂ©vu qu’il retrouve la terre ferme le lendemain matin… Sauf qu’entre-temps, Toupie a eu la bonne idĂ©e de se coucher sur lui dans le cockpit… lui rompant la coquille. En consĂ©quence, Lauriane a pris en pitiĂ© ce gastĂ©ropode vouĂ© Ă  une fin sans suspense si remis Ă  terre… et elle lui a fourni le rĂ©gime alimentaire visant Ă  la rĂ©paration de sa coquille avant de le libĂ©rer (farine, coquille d’Ĺ“uf broyĂ©e et verdure variĂ©e). La convalescence Ă©tant finalement assez longue, il a lui aussi embarquĂ© pour la Patagonie oĂą il ne sera pas possible de le relâcher faute de congĂ©nères dans ces contrĂ©es…

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Parebat’, le gastĂ©ropode du bord !
[Cap au Sud #4] Stage haute mer de Vigo (Galice) Ă  Radazul (Tenerife, Canaries)

[Cap au Sud #4] Stage haute mer de Vigo (Galice) Ă  Radazul (Tenerife, Canaries)

Après le dĂ©part de Vigo nous traçons notre route direction les Canaries, et plus prĂ©cisĂ©ment l’Ă®le de Tenerife. Les prĂ©visions de l’AEMET (agence mĂ©tĂ©orologique espagnole) pour les zones qui nous concernent ces prochaines 48h sont :

  • FINISTERRE : Ouest – Nord Ouest 5 Ă  6 occasionnellement 7 la nuit au Sud Ouest de la zone. Mer forte Ă  très forte, augmentant Ă  l’aube Ă  l’extrĂŞme nord de la zone. Houle Nord Ouest 3 Ă  4m, localement 5m. Averses et orages localement.
  • PORTO : Nord Ouest 5 Ă  6, temporairement 7 Ă  l’aube. Mer forte Ă  très forte durant la nuit. Houle Nord Ouest 3 Ă  4m. Averses occasionnelles.
  • JOSEPHINE : Nord – Nord Est 5 Ă  6 tournant Nord Ouest 6 au nord. Mer très agitĂ©e augmentant forte au nord est de la zone. Averses occasionnelles.

Nous partons très vite au large de l’Espagne puis du Portugal. Il faut nous Ă©loigner d’une petite zone sans vent situĂ©e Ă  la cĂ´te au sud de Vigo, tout en nous prĂ©servant d’atteindre une zone de gros temps situĂ©e plus Ă  l’ouest. Par consĂ©quent, nous voguons avec comme points de repère 2 longitudes : entre 9°30 et 10°30 Ouest. La houle est toujours très forte. Sauf imprĂ©vu, nous garderons les 4m de creux pendant quelques jours ! Cette fois-ci, contrairement au golfe de Gascogne, elle est mieux supportĂ©e! Bonne nouvelle pour nous :)

Sous artimon, yankee et trinquette, la vitesse de Milagro oscille entre 5,5 et 7 nĹ“uds, avant que le vent s’installe avant la tombĂ©e de la nuit, nous faisant rĂ©duire un peu le yankee pour filer Ă  plus de 8 nĹ“uds, cap au 210°. L’absence de la Grand Voile nous permet de gagner en stabilitĂ© tout en gardant une bonne vitesse. Nous actualisons nos infos mĂ©tĂ©o sur le site de l’Organisation MĂ©tĂ©orologique Mondiale (WMO) pour plusieurs zones de la METAREA II, dont voici la teneur :

  • PORTO : Nord – Nord Ouest 4 Ă  6, virant Nord ensuite. Mer forte Ă  très forte. Houle Nord Ouest
  • SAO VICENTE : Nord Ouest 5 Ă  6, virant Nord ensuite. Mer forte Ă  très forte. Houle Nord Ouest.

En fin de nuit le samedi 26 octobre le vent devient variable et nous oblige Ă  manĹ“uvrer Ă  plusieurs reprises avant que, passĂ© le petit-dĂ©jeuner les premiers grains pointent le bout de leurs nez Ă  l’Ă©trave… avec des rafales Ă  35-40 nĹ“uds, nous varions rĂ©gulièrement la surface de voile pour garder un confort relatif par mer très forte. Le trafic Ă  l’approche du rail de Lisbonne (DST : Dispositif de SĂ©paration du Trafic) augmente, nous obligeant Ă  accentuer la veille sur le pont et Ă  l’AIS. Les averses s’enchaĂ®nent en milieu de nuit… « Alors, heureuse ? » Deux mots prononcĂ©s dans le cockpit sous des seaux d’eau suffiront Ă  nous faire rire un bon moment… Au petit matin le rail est derrière nous et un vent rĂ©gulier de 25-30 nĹ“uds nous fait Ă©voluer au portant et rĂ©aliser plusieurs empannages dans la journĂ©e, sous artimon et yankee. L’après-midi le beau temps revient et les BN au chocolat sont de sortie dans le cockpit !

La météo pour les prochaines 24h (même source que précédemment) sont:

  • SAO VICENTE: Nord 4 Ă  5, localement 6 Ă  l’ouest de la zone, tournant Nord – Nord Est Ă  l’aube. Mer forte. Houle Nord Ouest.
  • CASABLANCA: Ă  l’ouest de la zone Nord 5 Ă  6, tournant Nord Est ensuite. Mer forte au nord ouest.
  • MADEIRA: Nord – Nord Est 5 Ă  6. Mer forte. Houle Nord.
coucher de soleil Milagro Karukinka2
[Cap au Sud #4] Stage haute mer de Vigo (Galice) Ă  Radazul (Tenerife, Canaries) 87

La fin de journĂ©e et la nuit se dĂ©roulent donc avec 20-30 nĹ“uds de vent, Ă  une vitesse de 8-9 nĹ“uds, avec de jolies pointes Ă  11 nĹ“uds, cap au 215°. Quelques Ă©clairs lointains illuminent le ciel Ă©toilĂ©. La Voie LactĂ©e, en l’absence de pollution lumineuse autre que le traceur du poste de barre et nos feux de navigation, nous semble par moment Ă  portĂ©e de main ! Nous repĂ©rons les constellations principales : Orion, le Taureau, les PlĂ©iades, le Cygne, Draco, Delfinus, CassiopĂ©e… tout en restant très vigilants car le trafic de cargo reste bien visible au loin sur notre bâbord. Dans les Ă©changes entre les Ă©quipiers, c’est toujours les nuits sous les Ă©toiles qui reviennent dans le top des activitĂ©s. La voĂ»te Ă©toilĂ©e, le coucher de soleil et le lever de Lune en berceau, la contemplation de la crĂ©ation pour les croyants, de la beautĂ© fascinante de ce qui nous entoure pour les autres, et savoir que nous sommes les seuls Ă  voir que nous voyons Ă  cet instant. La journĂ©e c’est plutĂ´t s’émerveiller des poissons et cĂ©tacĂ©s qui accompagnent notre sillage. Tout cela contrebalance bien « l’inconfort » du bateau. Le prix Ă  payer est faible et la joie est grande et profonde. En dĂ©but de matinĂ©e la houle diminue et avec 15-20 nĹ“uds de vent chacun sent revenir le calme… temporairement !

De nouveau les prévisions nous promettent du vent :

  • CASABLANCA : Nord – Nord Est 5 Ă  6, tournant Ouest 5 Ă  6 Ă  la fin. Mer forte et visibilitĂ© temporairement mauvaise sous averses orageuses.
  • MADEIRA : Nord – Nord Est 5 Ă  6 diminuant 4 Ă  5 Ă  la fin. Rafales. Mer forte. Houle Nord.

Le lundi 28 octobre ressemble donc pour beaucoup au jour précédent, avec en prime des rafales plus fortes dépassant par moment les 35 nœuds. Durant la nuit nous passons sous la barre es 400mn nous séparant de Santa Cruz de Tenerife et la diminution de la houle se trouvant désormais derrière nous rend la navigation vraiment plus confortable. En milieu de matinée les conditions sont vraiment idylliques : 17-23 nœuds de vent et 7,5 nœuds de vitesse, sous un grand ciel bleu.

sieste au soleil Milagro Karukinka
[Cap au Sud #4] Stage haute mer de Vigo (Galice) Ă  Radazul (Tenerife, Canaries) 88

En fin d’après-midi c’est sous le seuil des 300mn que nous passons, le 2ème ris de l’artimon est larguĂ© et les prĂ©visions laissent prĂ©sager que ces conditions vont perdurer.

La vie reprend Ă  bord. Certains trouvent le temps long, d’autres se rĂ©jouissent de ces parenthèses offertes car il est rare d’avoir autant de temps pour soi. Nous en profitons pour lire, contempler la mer et les nuages, regarder les Ă©toiles et la lune, combler certaines lacunes en astronomie, prendre le temps d’ĂŞtre prĂ©sent Ă  soi en respectant son rythme, sa fatigue et ses envies tout en faisant attention Ă  la vie en collectivitĂ©. Il faut bien avoir en tĂŞte que toutes les actions prennent plus de temps en mer. Un simple riz – poulet – poireaux qui prend maximum 1h Ă  terre demande au moins 2h en mer. Alors ralentir et anticiper devient une nĂ©cessitĂ©. Le temps s’écoule autrement Ă  bord, « au temps suspend ton envol ».

Les journĂ©es du 30 et 31 octobre se suivent et se ressemblent, les sourires sont sur tous les visages et la navigation de « plaisance » est cette fois bien illustrĂ©e par les conditions qui nous entourent. Nous fĂŞtons l’anniversaire d’une Ă©quipière : petit buffet et crème au chocolat maison, avec « LA » bougie Ă©videmment! En fin de journĂ©e nous dĂ©duisons la prĂ©sence de la terre Ă  l’horizon grâce aux nuages qui la surplombe et Ă  21h30 ce 31/10 nous sommes Ă  75 milles nautiques de Santa Cruz de Tenerife. Le vent faiblit drastiquement (<5 nĹ“uds), nous obligeant Ă  mettre en route le moteur. Celle que nous avons devinĂ©e une nuit entière guidĂ©s par son phare prend forme. La chaleur de la terre s’en ressent, le vent se fait plus faible. Ce lever du jour, dans la pĂ©tole et escortĂ©s par plusieurs globicĂ©phales, s’accompagne de nuages lenticulaires sur les sommets et de magnifiques couleurs sur le massif montagneux du nord de l’Ă®le (Anaga) et le sommet du Teide, volcan et point culminant de l’Ă®le (~3700m). Toupie hume l’air, truffe pointĂ©e vers la Terre, de nouvelles odeurs synonymes du retour de ballades diffĂ©rentes que le tour du pont de Milagro.

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[Cap au Sud #4] Stage haute mer de Vigo (Galice) Ă  Radazul (Tenerife, Canaries) 90
Arrivee Tenerife Teide Milagro Karukinka
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A l’arrivée au port, d’un coup, les bruits semblent intenses, vifs, agressifs. Le large manque déjà. Le temps de passer à l’heure espagnole (nous étions restés sur l’heure française de manière à garder le rythme les quarts) et le rangement du bateau s’amorce; nettoyage du pont, frotter les tapis, faire la lessive, faire les courses (chou blanc, nous sommes le 1er novembre dans un pays catholique).

Milagro Radazul Tenerife Karukinka
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Quelques heures plus tard, nous voici autour d’une belle tablĂ©e pour fĂŞter le dĂ©part de 3 joyeux lurons (les deux petits suisses qui s’en retournent Ă  leurs montagnes, Philippe et Jean-Michel, et Laurent l’alsacien). Tous trois laissent place Ă  Juliane, venue des Alpes, et Ă  François, qui nous attend sous peu au Cap Vert, et qui nous accompagneront tous deux jusqu’au BrĂ©sil.

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Si vous voulez nous rejoindre Ă  bord, il reste deux places du BrĂ©sil Ă  l’Argentine !

[Cap au Sud #3] Stage haute mer de La Corogne (Galice, Espagne) à… Vigo

[Cap au Sud #3] Stage haute mer de La Corogne (Galice, Espagne) à… Vigo

Le lundi 21/10, nous quittons la Corogne. Peu de temps après avoir quitté la place du port, plus de sondeur, plus d’anémomètre et plus de pilote ! Un peu fâcheux pour naviguer…

Après des tentatives de rĂ©paration pendant que le bateau sortait de la rade avec pas mal de houle, la sagesse nous fait faire demi tour pour rĂ©gler ça au calme. Nous prenons une place au Club Nautico de Sada oĂą l’accueil y est absolument gĂ©nial. Lauriane, formĂ©e Ă  l’électronique, finit par trouver l’Ă©lĂ©ment dĂ©clencheur de la panne et part en quĂŞte d’une solution en remuant le rĂ©seau local et son rĂ©seau d’amis espagnols. 2h après une solution est trouvĂ©e grâce Ă  la solidaritĂ© des gens de mer et la menace de la fermeture de la fenĂŞtre mĂ©tĂ©o! Un grand drame pour tous les marins! Il faudra aller Ă  Vigo demain chercher le boiter qui fait tout bugger! 

Aude et Lauriane partent de bon matin en direction de Vigo, autant vous dire que le trajet fut joyeux! A 12h30 le boĂ®tier Ă©tait rĂ©cupĂ©rĂ©, accompagnĂ© des prĂ©cieux et gĂ©nĂ©reux conseils de JosĂ© Luis (Stay Center – Vigo). Merci Ă  lui ! Damien anticipe certains entretiens : gĂ©nĂ©rateur, pompe eau de mer de la cuisine,… et rĂ©pare la pompe Ă©lectrique des WC…

Vers 17h30, de retour au bateau avec la pièce, Lauriane s’y remet, lampe frontale vissĂ©e sur le front et pince Ă  sertir et tournevis Ă  la main. C’est reparti pour un tour en fond de cale… Le lendemain matin, après un petit tour dans un restaurant du port et une Estrella Galicia bien fraĂ®che la veille, la nuit porte conseil et la panne qui s’avĂ©rait ĂŞtre double est terminĂ©e, des modifications sur l’installation sont faites pour empĂŞcher la rĂ©pĂ©tition ce genre de dĂ©convenue et tout a retrouvĂ© sa place pour un dĂ©part Ă  17h, non sans un au revoir prĂ©alable Ă  Rafa, le chargĂ© du port, qui nous apporte des polos offerts par le club pour chacun de nous.

RCN Sada
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Cap sur Vigo (Marina Davila Sport) oĂą nous attend le lendemain JosĂ© Luis, le charmant technicien rencontrĂ© la veille, pour faire un point sur l’installation avec Lauriane, en vue d’amĂ©liorer la fiabilitĂ© et la simplicitĂ© de l’ensemble pour la suite des aventures. Il faut dire que l’association Karukinka est la 5ème propriĂ©taire de Milagro et que ce dernier est passĂ© entre plusieurs mains, dans diffĂ©rents pays… faisant que les diagnostics ne sont pas toujours facilitĂ©s par des Ă©tiquettes en suĂ©dois, danois, espagnol et allemand !

Le dĂ©part se fait dans une brume sur la cĂ´te, le paysage apparaĂ®t au fur et Ă  mesure. Quant Ă  la nuit, une lune en berceau vient nous Ă©clairer; les pĂŞcheurs font de mĂŞme. Il faut rester vigilant avec les navires non prĂ©sents Ă  l’AIS, les pĂŞcheurs avancent très vite (plus de 8 nĹ“uds), font des ronds avec des sennes ou dĂ©ploient leurs chaluts ou casiers. 

Une nuit au moteur et une arrivĂ©e Ă  Vigo. Nous nous rapprochons de la frontière portugaise et ça c’est une bonne nouvelle !

[Cap au Sud #2] Stage haute mer de Saint Nazaire (Loire Atlantique, France) Ă  La Corogne (Galice, Espagne) – traversĂ©e du Golfe de Gascogne

[Cap au Sud #2] Stage haute mer de Saint Nazaire (Loire Atlantique, France) Ă  La Corogne (Galice, Espagne) – traversĂ©e du Golfe de Gascogne

Nous sommes partis de bon matin mardi 15/10 pour une traversée plutôt « calme » du golfe de Gascogne; dégolfer est le terme technique. 

  • Les prĂ©visions pour la zone IROISE – YEU nous promettent un vent d’Ouest Ă  Sud-Ouest, 2 Ă  4 virant Est Ă  Sud-Est 3 Ă  4, avant de fraĂ®chir 4 Ă  5 en tournant plus Sud.

Très vite, la terre disparaĂ®t, le champs d’éoliennes en mer de St Nazaire s’efface et nous voici seuls face Ă  l’ocĂ©an avec une route la plus directe possible vers la Galice. Le planning des quarts se met en place : Damien et Lauriane alterneront toutes les trois heures, et le reste de l’Ă©quipage se relaiera. Chaque Ă©quipier sera de veille et Ă  la manĹ“uvre pendant 3h, en binĂ´me avec un autre Ă©quipier et avec un changement par tranche d’1h30.

Stage Bretagne Canaries2024 Association Karukinka
[Cap au Sud #2] Stage haute mer de Saint Nazaire (Loire Atlantique, France) à La Corogne (Galice, Espagne) - traversée du Golfe de Gascogne 99

Si le début du trajet nous permet une route relativement directe, la suite est moins directe. Un besoin de moteur pour combler une pénurie de vent et après c’est le début d’une route beaucoup moins droite! La mer est assez formée avec heureusement une houle longue ce qui rend le bateau plutôt stable; à défaut de nos estomacs! S’amariner disent les marins!!

Grand-Voile, Artimon, Yankee et Trinquette, avec 15 -18 nĹ“uds de vent nous font avancer Ă  7 nĹ“uds sur une mer peu agitĂ©e. Dans l’après-midi, passĂ©e la latitude de l’Ă®le d’Yeu, le vent forcit et Milagro Ă©volue dès lors Ă  8,5 nĹ“uds. La houle augmente et les estomacs commencent Ă  douter de leur capacitĂ© Ă  garder leur contenu… La nuit tombĂ©e, nous prenons 1 ris dans la Grand Voile et 1 ris dans l’artimon afin de pouvoir jouer des voiles d’avant selon l’Ă©volution des conditions. Les prĂ©visions mĂ©tĂ©o, en incluant les zones suivantes de notre pĂ©riple pour la soirĂ©e du 15/10 et la journĂ©e du 16/10 sont :

  • YEU et ROCHEBONNE : Sud-Est 4 Ă  5, parfois 6, s’orientant Ouest 3 Ă  5 Ă  la fin de journĂ©e. Mer peu agitĂ©e Ă  agitĂ©e, devenant agitĂ©e Ă  forte en soirĂ©e. Longue houle d’Ouest 3m Ă  la fin.
  • PAZENN : Sud 3 Ă  5 virant Ouest 4 Ă  5 en fin de nuit. Mer peu agitĂ©e Ă  agitĂ©e, devenant forte Ă  très forte le matin. Longue houle d’Ouest 3-4m le matin.

Il faut profiter des quarts pour barrer, regarder fous de Bassan, pétrels, thons et dauphins, voir la mer se lever et s’abattre sur le bateau, éviter les embruns et les paquets d’eau qui rincent le pont, essayer d’avaler de quoi se substanter; heureusement que Lauriane est une experte en cuisine dans ces conditions car nous ne sommes pas d’une grande aide! Et le soir, profiter d’une lune pleine pour un quart de nuit sous la voûte étoilée : tourner les yeux vers le ciel devient une évidence. Nos pensées sont évidement tournées vers les marins qui nous précèdent et veillent sur nous depuis les astres lumineux de la nuit. Puis, aller se coucher du mieux qu’on peut en entendant la mer frapper sur la coque. S’habiller s’avère tout aussi rocambolesque! 

Vers minuit le 16/10, le vent variable s’accompagne de bancs de brume. Progressivement le vent diminue pour passer sous la barre des 6-7 nĹ“uds, nous contraignant Ă  s’appuyer sur le moteur (1500tr/min) pour retrouver une vitesse convenable de 5,5 nĹ“uds. MalgrĂ© plusieurs tentatives de l’arrĂŞter, il nous faudra compter sur lui jusqu’Ă  13h30, peu de temps après avoir croisĂ© un objet flottant, un baril. La journĂ©e durant nous nous faisons littĂ©ralement doucher par de grosses averses.

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[Cap au Sud #2] Stage haute mer de Saint Nazaire (Loire Atlantique, France) à La Corogne (Galice, Espagne) - traversée du Golfe de Gascogne 100

Deux virements de bord ponctuent la journée, avec un vent de 15-20 nœuds, forcissant ponctuellement 25-30, nous obligeant à sortir de notre torpeur de temps en temps pour réduire ou augmenter la surface de voilure de Milagro. En fin de journée, le vent est plus stable, 18-20 nœuds avec rafales à 25, nous faisant alors avancer à 7 nœuds. et nous passons sous la barre des 200 milles nautiques nous séparant du cap Finisterre.

La météo du bulletin Large de Météo France nous promet pour la nuit suivante et le lendemain (17/10) :

  • PAZENN : Ouest 4 Ă  5, virant Ouest Ă  Nord-Ouest la nuit, temporairement 6 Ă  l’ouest de la zone en fin de nuit, puis redevenant Ouest dans l’après-midi. Mer forte Ă  très forte. Longue houle d’Ouest s’attĂ©nuant 3,5-4m. Pluie et averses, parfois orageuses, s’attĂ©nuant dans l’après-midi.

Peu avant l’aube, la longue houle arrive et nous avançons Ă  8 nĹ“uds, avec 16-18 nĹ“uds de vent. Progressivement le vent forcit pour atteindre 25-30 nĹ“uds constants dans la matinĂ©e : on enroule le yankee et 1 ris supplĂ©mentaire est pris dans la GV. Vers 11h30, un gros grain vient Ă  notre rencontre, les 40 nĹ“uds sont dĂ©passĂ©s et Damien et Lauriane sont Ă  la manĹ“uvre pour affaler la Grand Voile et attendre le retour au « calme » avec artimon 2 ris et la trinquette. PassĂ©e ce petit coup d’adrĂ©naline, nous changeons la garde robe de Milagro : GV 2 ris, artimon 1 ris, 1/2 yankee et 2/3 de trinquette. La panoplie fonctionne : 8,5 nĹ“uds. La journĂ©e s’enchaĂ®ne avec de rares moments passĂ©s Ă  moins de 7 nĹ“uds ! Nous entrons dans les eaux espagnoles et le risotto de crevettes et haricots verts fait du bien aux estomacs peu Ă  peu rĂ©tablis.

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[Cap au Sud #2] Stage haute mer de Saint Nazaire (Loire Atlantique, France) à La Corogne (Galice, Espagne) - traversée du Golfe de Gascogne 101

La nuit tombée, petit point météo pour la nouvelle zone de navigation du 17/10 à 18h au 18/10 à 18h:

  • FINISTERRE : Ouest 3 Ă  5, revenant Sud-Ouest 5 Ă  6 demain matin, fraĂ®chissant localement 6 Ă  7 en fin d’après-midi au nord de la zone. Mer forte, localement très forte au nord au dĂ©but, s’amplifiant forte Ă  très forte en fin d’après-midi. Houle d’Ouest 3,5-4m, diminuant demain matin avant de s’amplifier 4-4,5m Ă  la fin.

Le vendredi matin, force est de constater que la douche de la Corogne s’est bien Ă©loignĂ©e suite aux virements de bord qui ponctuèrent la nuit! Vers 9h30, après avoir croisĂ© deux bateaux de pĂŞche, la cĂ´te galicienne se dĂ©voile Ă  l’horizon.

Le bateau fait des virements de bord Ă  120-130 degrĂ©s (sur de petits bateaux, c’est plutĂ´t 90 degrĂ©s) et MILAGRO ne peut pas remonter Ă  plus de 50-60 degrĂ©s du vent! La douche attendra, on profite du soleil revenu et d’une mer plus clĂ©mente pour enfin prendre l’air! Les virements de bord s’enchaĂ®nent… Doucement mais sĂ»rement, nous atteignons le Cabo Prioriño Chico, porte d’entrĂ©e vers la baie de la Corogne. A 21h30, nous voilĂ  amarrĂ©s au Real Club Nautico pour un week-end sur le plancher des vaches en attendant la bascule de vent. Après un dĂ®ner au restaurant pour fĂŞter notre « dĂ©golfage », c’est au tour d’une bonne douche bien mĂ©ritĂ©e! 

Au programme de ces deux jours d’escale, du repos et une visite rapide de la Corogne, la plus grosse ville de la province et lieu oĂą se trouve la tour d’Hercule, le plus vieux phare au monde.Â