[#8 – Irlande – Ecosse 2024] de Loch Buie Ă  l’üle sacrĂ©e Iona

[#8 – Irlande – Ecosse 2024] de Loch Buie Ă  l’üle sacrĂ©e Iona

De bon matin nous levons l’ancre au moment de l’étale et Ă  quelques encablures du chĂąteau Moy, dans le Loch Buie (Ăźle Mull). La nuit dans ce loch ouvert au sud-ouest a Ă©tĂ© moyennement agrĂ©able : en cause une petite houle du sud arrivĂ©e avant le vent prĂ©vu dans la mĂȘme direction et qui fait que Milagro a eu la fĂącheuse tendance Ă  se maintenir travers Ă  cette houle (et Ă  nous bercer, certes, mais nous nous en serions passĂ©!).

Entre le dĂ©marrage moteur, la levĂ©e du mouillage, le nettoyage du lot de graviers et vase qui maculait la chaĂźne et l’ancre, et l’envoi des voiles pour n’avancer que grĂące Ă  elles, nous Ă©tablissons un nouveau record du temps d’utilisation minimale du moteur : 20 minutes ! C’est sous artimon et yankee que nous sortons du loch, au prĂšs Ă  5,5 noeuds : Ă  quoi bon forcer ?

Les prĂ©visions sont bonnes (Sud 3 Ă  5 Ă©voluant 2 Ă  4 durant quelques heures, avant de passer 3 Ă  5 puis de changer de direction pour Nord-Ouest 4 Ă  6 au sud de l’üle Mull. Nous profitons de la marĂ©e descendante pour rester Ă  bonne distance de la cĂŽte sud malgrĂ© une allure travers. Cette partie de l’üle situĂ©e entre le Loch Scridain (au nord) et la fin du Firth of Lorn (au sud) forme une pĂ©ninsule appelĂ©e Ross of Mull. Plus nous nous dirigeons vers l’ouest plus les fonds deviennent complexes, avec de nombreux rĂ©cifs entre lesquels passer pour atteindre notre objectif : Iona.

Les falaises de basalte (encore des orgues!) ont par endroit pris la forme de grottes et d’arches sculptĂ©es par l’érosion, et sont entrecoupĂ©es de magnifiques cascades et de criques de couleur turquoise. Abstraction faite de la tempĂ©rature de l’eau (14 dĂ©grĂ©s), cette couleur nous inciterait Ă  la baignade ! InterpelĂ©s par la beautĂ© du paysage, nous changeons de cap pour nous approcher au portant de la cascade de Malcolm’s Point, avant de reprendre notre route vers l’ouest.

Progressivement apparaissent les passages plus exigeants, dont ceux des Torran Rocks signalĂ©s par la cardinale Bogha nan Ramfhear et l’entrĂ©e vers le sud du Sound of Iona. Une fois encore, de nombreux moments de solitude (et de rire Ă©videmment) ponctuent nos indications de noms des rochers, baies, Ă©cueils, Ăźles et caps ! Nos rencontres avec des locaux ne parlant pas gaĂ©lique nous ont tout de suite rassurĂ©s quand nous avons Ă©voquĂ© ce point avec eux : ils bredouillent eux aussi ! Pour vous faire une petite idĂ©e, nous vous invitons Ă  jeter un oeil Ă  la carte de cette zone!

Carte de navigation Ross of Mull - Iona, du CCC du Kintyre Ă  Ardnamurchan.

Carte extraite de la 3e édition du guide du Clyde Cruising Club, du Kintyre à Ardnamurchan (p.180)

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Nous entrons dans le chenal sĂ©parant le Ross of Mull de Iona Ă  la voile (au portant, 5,5 noeuds). Seul voilier Ă  la voile dans le chenal en cette fin d’aprĂšs-midi, nous nous refusons de gagner le nord Ă  l’aide du moteur. Nous prĂ©fĂ©rons prendre le temps de bien Ă©tudier la carte et de chercher les repĂšres visuels Ă  terre pour rĂ©aliser la traversĂ©e du chenal en nous basant exclusivement sur les alignements (cathĂ©drale, Bull Hole,
) et indications du sondeur, plutĂŽt que de suivre les Ă©crans. Nous rĂ©alisons plusieurs relĂšvements au compas et manoeuvres d’empannage dans des passages relativement Ă©troits pour contourner des sondes d’un grand banc de sable et rochers comprises entre 10cm et 1m60, puis l’üle Eilean nam Ban et ses couleurs incroyables sur notre tribord. A la sortie l’espace s’ouvre Ă  nouveau et nous rejoignons le mouillage de Port na Fraing et sa plage de sable blanc, rien que pour nous et sur 7m de fond ! (ceux de Martyrs’ Bay ou de Bull Hole sont plus frĂ©quentĂ©s). Les 4 Ă  6 Beaufort prĂ©vus arrivent en fin de journĂ©e et nous sommes bien Ă  l’abri dans le chenal, sous le vent d’Iona.

AprĂšs une nuit reposante, nous partons en annexe vers le quai du ferry de Martyrs’ Bay pour visiter ce lieu sacrĂ© de l’histoire Ă©cossaise dont nous avait parlĂ© Vicky Gunn, chercheuse en histoire mĂ©diĂ©vale que nous avions rencontrĂ© Ă  Loch Melfort.

Iona ferry pontoon

Iona est une petite Ăźle ouverte sur l’Atlantique avec pour seul terre Ă©mergĂ©e vers l’ouest Ă  cette latitude les dangereux parages de Skerryvore (aprĂšs eux c’est le Canada). Elle est bordĂ©e de rĂ©cifs dont les noirs rochers contrastent avec des plages de sable blanc. DotĂ©e d’un petit village comprenant tous les services essentiels (dont une petite Ă©cole primaire) et plusieurs artisans (potiers, sculpteurs sur bois, joaillers, vanniers, tisseurs
), Iona est considĂ©rĂ©e comme l’un des principaux lieux spirituels d’Ecosse. Nombreux sont ceux qui y viennent en pĂšlerinage et/ou pour trouver le calme lors de retraites spirituelles.

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Pourquoi cette petite Ăźle est-elle donc si importante ? C’est ce que nous allons vous partager plus en dĂ©tails grĂące aux informations transmises par Vicky, lors de notre visite puis des lectures et recherches qui s’en sont suivies.

Le premier constat est que l’importance culturelle et historique d’Iona est complĂštement disproportionnelle Ă  sa taille. HabitĂ©e au moins depuis l’Âge du Bronze comme le montrent le site de BlĂ r Buidhe, ce n’est qu’à partir du VIe siĂšcle que l’importance d’Iona est documentĂ©e. Plusieurs toponymes lui sont associĂ©s, dont “Ì”, “Ì Challuim Chille” (Iona de St Columba pour Ă©viter les confusions), “Eilean Idhe” (l’üle de Iona) et “Ì nam ban bĂČidheach” (Iona de la belle femme en gaĂ©lique), et ses habitants s’appellent les Idheach.

En 563 arrivĂšrent du nord de l’Irlande et Ă  la voile Columba et ses douze disciples. Ils fondĂšrent la deuxiĂšme mission de christianisation de l’Ecosse, un siĂšcle et demi aprĂšs la prĂ©cĂ©dente menĂ©e par Ninian sur l’üle Whithorn en 397 et dont les prĂ©ceptes auraient Ă©tĂ© diffusĂ©s jusqu’aux Ăźles Shetlands. Le choix d’établir une Ă©glise et un monastĂšre sur Iona Ă©tait stratĂ©gique puisque cette Ăźle Ă©tait situĂ©e sur une voie navigable permettant de relier Inverness et l’Irlande, mais aussi tout le monde celte. Comme Holy Island et Portmahomack, Iona devint rapidement un pĂŽle de diffusion de la version celte de la religion chrĂ©tienne et de nouvelles idĂ©es et crĂ©ations (dont enluminure/calligraphie, musique, peinture et artisanat d’art). Le faire depuis cet endroit Ă©tait trĂšs efficace car il Ă©tait situĂ© sur un axe d’échanges culturels et commerciaux principal de l’époque. La petite communautĂ© installĂ©e lĂ  dĂ©veloppa Ă©galement une Ă©conomie de subsistance avec une importante activitĂ© agricole (cultures cĂ©rĂ©aliĂšres et Ă©levage), de pĂȘche et de construction. Ils n’étaient pas non plus complĂštement autonomes puisque pour un usage liturgique ils faisaient venir du vin, des pigments et des huiles du sud de la France ! Durant 34 ans, Columba dĂ©veloppa des liens Ă©troits avec la royautĂ©, convertissant par exemple le roi Bruce et les Picts au christianisme, Ă  la suite d’un combat spirituel qu’il gagna contre le rĂ©fĂ©rent de leur royaume. Columba aida Ă©galement, jusqu’à sa mort en 597, Ă  l’établissement d’un royaume indĂ©pendant en Ecosse de l’ouest : l’Argyll. La plupart de ces informations est parvenue jusqu’à nous grĂące Ă  AdomnĂ n, diplomate, successeur et biographe de St Columba ayant dirigĂ© la mission durant 25 ans, au VIIe siĂšcle. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages majeurs pour comprendre cette Ă©poque dont La Vie de Saint Columba (“Vita Sancti Columbae”, env. 690) et La Loi des Innocents (“Lex Innocentium” de 697).

Aux VIIIe et IXe siĂšcles, les Vikings attaquĂšrent Ă  plusieurs reprises Iona, attirĂ©s par les trĂ©sors du monastĂšre. En 825 eu lieu l’un des pires raids viking : l’abbĂ© Blathmac et les moines l’accompagnant furent torturĂ©s dans le but de leur faire avouer le lieu oĂč Ă©taient cachĂ©es les reliques de St Columba, un poĂšme indiquant qu’ils reposeraient dans un coffre recouvert d’or et d’argent. Suite Ă  l’absence d’aveux, ils furent massacrĂ©s dans une baie nommĂ©e ensuite Martyrs’ Bay. La peur de ces raids et leur rĂ©pĂ©tition Ă©taient telles que s’en Ă©tait dĂ©jĂ  suivit un exode de nombreux religieux qui avaient pris le soin d’emporter avec eux les plus importantes reliques (dont les os de St Columba) et un autre trĂ©sor: le Livre de Kells (créé Ă  Iona 200 ans aprĂšs la mort de St Columba, ce livre est considĂ©rĂ© comme l’un des plus remarquables ouvrages religieux de l’époque et est dĂ©sormais visible au Trinity College de Dublin). MalgrĂ© ces attaques continues, le monastĂšre resta actif et ce n’est qu’au Xe siĂšcle que la frĂ©quence des raids diminua, lorsque les Vikings installĂ©s dans les HĂ©brides se convertirent au christianisme, adoptant St Columba comme leur saint patron. Plusieurs pierres tombales gravĂ©es et conservĂ©es dans le musĂ©e montrent l’influence viking avec des inscriptions runiques.

Au XIe siĂšcle Iona et la plupart des Ăźles de l’ouest Ă©cossais Ă©taient sous le pouvoir du roi de NorvĂšge. La distance compliquant grandement les possibilitĂ©s de gouverner la rĂ©gion, ce dernier confia cette tĂąche Ă  un guerrier gaĂ©lico-norvĂ©gien : Somerled. Ce dernier devint le premier Seigneur des Îles, prenant le contrĂŽle d’une rĂ©gion s’étendant du Kintyre aux HĂ©brides extĂ©rieures et ayant pour descendants les MacDougalls of Lorn, MacDonalds of Islay et MacRuairis of Garmoran, plusieurs d’entre eux ayant jouĂ© un rĂŽle essentiel dans les manoeuvres politiques et guerres d’indĂ©pendance du XIVe siĂšcle.

Lors de notre excursion Ă  terre et pour nous rendre Ă  l’abbaye, nous avons traversĂ© les ruines d’un couvent et suivi la rue des morts (“SrĂ id nam marbh”), une rue pavĂ©e de granit rose reliant la baie des Martyrs avec le tombeau de St Columba situĂ© au centre de l’abbaye bĂ©nĂ©dictine construite au XVe siĂšcle. Cet itinĂ©raire n’est autre que celui empruntĂ© par les pĂ©lerins et lors des processions dĂ©diĂ©es aux sĂ©pultures d’acteurs importants du monde gaĂ©lique dans le cimetiĂšre Reilig Odhrain entourant la chapelle St Oran construite au XIIe siĂšcle (la plus vieille structure intacte de l’üle). Dans ce cimetiĂšre reposeraient 48 rois d’Ecosse (dont Macbeth / Mac Bethad), des membres du clan MacDonald Seigneur des Îles ayant pour certains des ascendants Norse (MacKinnons, MacLeans et Macleods) et, dans la petite chapelle d’une simplicitĂ© dĂ©concertante, les corps des plus importants seigneurs et chefs de guerre des Ăźles de l’ouest Ă©cossais. De nombreuses pierres tombales anciennes sculptĂ©es sont encore dans ce cimetiĂšre et d’autres ont Ă©tĂ© dĂ©placĂ©es pour mieux les prĂ©server dans le musĂ©e ou le cloĂźtre de l’abbaye. Les premiĂšres croix sur les tombes, assez conventionnelles aujourd’hui, seraient apparues Ă  Iona aux environs de l’an 600, comme le montre les plus anciennes croix ornĂ©es de symboles sophistiquĂ©s et aux designs variĂ©s, comme le montrent les diffĂ©rents exemples vus dans le musĂ©e adjacent Ă  l’abbaye.

St Oran Chapel

Nous sortons ensuite de ce cimetiĂšre pour nous rendre sur le promontoire rocheux (“Torr an aba”) faisant face Ă  l’abbaye et d’oĂč Columba travaillait. Cet emplacement offre une vue imprenable sur le Sound of Iona, l’extrĂ©mitĂ© du Ross of Mull et la petite chapelle abritant le tombeau de St Columba situĂ©e juste derriĂšre la rĂ©plique d’une imposante croix en granit sculptĂ©e et dĂ©diĂ©e Ă  St Jean (l’originale est dans le musĂ©e). Cette abbaye a Ă©tĂ© construite aprĂšs l’arrivĂ©e au XIIIe siĂšcle de moines bĂ©nĂ©dictins et de soeurs augustiniennes invitĂ©s par Ranald, Seigneur des Îles et descendant de Somerled, pour revitaliser la vie religieuse sur l’üle et moyennant des moyens de subsistances plus consĂ©quents. Plusieurs attaques armĂ©es vinrent saboter ce nouveau monastĂšre, plusieurs chefs religieux irlandais n’acceptant pas de perdre leur connexion et leur influence sur Iona. A la suite du traitĂ© de Perth (1266) entre la NorvĂšge et l’Ecosse, Iona revint au royaume d’Ecosse et devint progressivement un important lieu de pĂšlerinage, jusqu’à la RĂ©formation de 1560 qui signa la fin des monastĂšres en Ecosse.

Plusieurs tentatives de restauration ont ensuite Ă©tĂ© menĂ©es, sans succĂšs, conduisant progressivement les bĂątiments Ă  l’état de ruines Ă  la fin du XIXe siĂšcle, comme l’attestent plusieurs photographies prises avant d’importants travaux. Le 8e Duc d’Argyll, propriĂ©taire de l’üle, commissionna un architecte pour consolider les ruines puis cĂ©da l’abbaye, le cimetiĂšre et le couvent au Iona Cathedral Trust en 1899. D’importants travaux de rĂ©novation furent lancĂ©s et 6 ans plus tard, un premier office pu dĂ©jĂ  ĂȘtre rĂ©alisĂ© dans l’église partiellement rĂ©novĂ©e. Les dĂ©cennies suivantes furent dĂ©diĂ©es Ă  la restauration du monastĂšre et de toute la partie ouest du cloĂźtre, sous l’impulsion de la Iona Community, une communautĂ© chrĂ©tienne travaillant pour la paix et la justice sociale et ayant des membres dispersĂ©s dans le monde entier. En 2000 le Iona Cathedral Trust finit par cĂ©der l’abbaye, le cimetiĂšre, l’église Saint Ronan et le couvent au monuments historiques d’Ecosse. La cathĂ©drale est aujourd’hui en bon Ă©tat et entretenue grĂące aux fonds issus des visites et de dons.

Iona LL

Bref, vous l’aurez compris, Iona est le lieu Ă  ne pas manquer lorsque vous vous rendez aux HĂ©brides, c’est un peu le “St Jacques de Compostelle” Ă©cossais et quitte Ă  faire le pĂšlerinage, celui-ci se fait selon nous plutĂŽt Ă  la voile qu’à pieds. MĂȘme si vous n’ĂȘtes pas passionnĂ©.e d’histoire, la beautĂ© du monument et de ses environs sont marquants, ils ouvrent une parenthĂšse qui vous transporte Ă  diffĂ©rentes Ă©poques et permettent de porter ensuite un autre regard sur ces Ăźles. Iona crĂ©e un vĂ©ritable espace pour l’imaginaire, faisant finalement Ă©cho Ă  ce que nous recherchons aussi dans la navigation et les longues dĂ©connexion du tumulte qu’elle procure, en harmonie avec car dĂ©pendants des Ă©lĂ©ments. Cette sensation se retrouve aussi rĂ©sumĂ©e dans les mots du compositeurs Felix Mendelssohn, en 1829, mentionnĂ©s sur l’un des murs de la sortie du cloĂźtre : “When in some future time I shall sit in a madly crowded assembly with music and dancing round me, and the wish arises to retire into the loneliest loneliness, I shall think of Iona.” (traduction : “Quand dans le futur je serai assis au sein d’une assemblĂ©e follement bondĂ©e, avec de la musique et des danses autour de moi, et que se fera sentir le dĂ©sir de me retirer dans la solitude la plus solitaire, je penserai Ă  Iona.”)

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N’ayant pas vu le temps passer, ce n’est que tard dans l’aprĂšs-midi que nous rejoignons Milagro, grignotant rapidement quelque chose avant de lever l’ancre pour profiter des bonnes conditions pour rejoindre Staffa puis Ulva avant la tombĂ©e de la nuit.

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Petit bonus : les lumiÚres du couchant sur les récifs et embruns au sud de Iona quelques semaines plus tard, au retour des ßles Treshnish.


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Pour aller plus loin, voici nos sources :

  • “Pocket Scottish History”, ouvrage collectif dirigĂ© par James Mackay, Lomond Books, Broxburn, 2019.
  • “About Mull, Iona, Ulva, Staffa, Treshnish isles”, dirigĂ© par Rosalind Jones, St Columba Gruline, Argyll, ?.
  • “Iona Abbey and Nunnery”, Peter Yeoman et Nicki Scott, Historic Scotland Alba Aosmhor, Édinbourg, 2022.
  • “Kintyre to Ardnamurchan” Clyde Cruising Club, Imray, Cambridgeshire, 2020.
  • “Hebridean Voyages : an anthology of sea crossings to the western islnads of Scotland, 1822-1955” Colin Tucker, Acair, Stornoway, 2023.
  • “A Journey to Scotland and the Hebrides” Samuel Johnson et James Boswell, Everyman’s Library, Londres, 2002 (1909)
  • “The Placenames of Scotland” Iain Taylor, Birlinn, Édinbourg, 2022.
  • “Mull family names for ancestor hunters” Jo Currie, Brown et Whittaker, Tobermory, 2017.
  • https://www.dailymail.co.uk/sciencetech/article-4682486/Archaeologists-prove-wooden-hut-used-St-Columba.html
[#6 – Cap au nord 2024] Escale à Loch Melfort

[#6 – Cap au nord 2024] Escale à Loch Melfort

C’est en fin de journĂ©e que nous arrivons tranquillement Ă  la voile Ă  l’extrĂ©mitĂ© Est du Loch Melfort, jetant l’ancre dans un fond vaseux bien collant (pour la chaĂźne et le pont aussi d’ailleurs
). A peine arrivĂ©s, Damien reçoit un appel d’un de ses amis et ancien Ă©lĂšve, Christian, en route depuis Leeds pour nous rejoindre Ă  bord pour la soirĂ©e ! PassionnĂ© par l’Ecosse, il est une source intarissable d’idĂ©es de lieux Ă  visiter, tous plus reculĂ©s, intĂ©ressants et sauvages les uns que les autres. Les cartes papier et celles de la tablette se sont progressivement retrouvĂ©es garnies de petits points supplĂ©mentaires et d’annotations. S’ajoute Ă  cela une petite liste de livres Ă  consulter
 De quoi rĂ©pondre Ă  nos envies d’explorer et d’apprendre pour des semaines voire des mois
 !

Loch Melfort Karukinka 052024 4

Le lendemain matin, Ă  l’arrivĂ©e au petit ponton de l’hĂŽtel de Kilmelfort avant de faire route avec Christian vers Oban pour un avitaillement en produits frais, une deuxiĂšme belle surprise nous attend : la rencontre avec Vicky et Margaret, toutes deux occupĂ©es sur leur magnifique petit voilier. Nous pensions prendre le bus pour revenir d’Oban, c’est finalement Vicky qui passera nous chercher directement au supermarchĂ© ! Lors de ce trajet sinueux entre lochs et collines, nous l’invitons, ainsi que Margaret, Ă  venir visiter notre “huge sailboat”, qui appartient Ă  l’association Karukinka. S’ensuivent les questions sur le pourquoi du comment de l’association, du navire, des recherches de Lauriane et de notre venue en Ecosse
 et elle nous apprend qu’elle est chercheuse en histoire mĂ©diĂ©vale Ă  l’universitĂ© de Glasgow.

C’est aprĂšs le dĂ©jeuner du lendemain qu’elle vient nous faire un magnifique cadeau : plusieurs heures de cours d’histoire mĂ©diĂ©vale Ă©cossaise dans le carrĂ© de Milagro ! Carte Ă  l’appui, rĂ©fĂ©rences historiques, informations sur l’histoire cachĂ©e de lieux et de dynamiques de peuplement,
 nous n’en perdons pas une miette. “Ici l’histoire a Ă©tĂ© faite par les navigateurs, Ă  la voile” . Cette remarque pleine de bon sens compte tenu de la morphologie des lieux nous rappelle qu’effectivement, les Ă©changes d’idĂ©es, les influences culturelles, les batailles, les invasions de toutes parts, les processus de colonisation, les vagues de rĂ©formes religieuses, les Ă©volutions technologiques,
 ont existĂ© grĂące Ă  la voile (et Ă  la rame
).

Notre parcours, de la Bretagne Ă  la NorvĂšge via l’Irlande et l’Ecosse n’est autre que celui d’un axe d’échanges majeur depuis des milliers d’annĂ©es. PrĂ©sence celte puis romaine, premiĂšres missions chrĂ©tiennes (VIe siĂšcle), guerres tribales entre les Picts et d’autres groupes, invasions vikings, fonctionnement clanique trĂšs ancrĂ© dans la culture Ă©cossaise
 Chaque Ăźle, des HĂ©brides aux Shetlands, porte en elle des histoires chargĂ©es de vent et d’embruns que l’érosion efface progressivement Ă  notre vue mais que des archives prĂ©cieusement gardĂ©es au fil des siĂšcles sauvent de l’oubli. C’est un vĂ©ritable travail de fourmi que Vicky Gunn et nombre de chercheurs en histoire Ă©cossaise rĂ©alisent pour comprendre le territoire Ă  diffĂ©rentes Ă©poques. Ils donnent du sens Ă  ce qui nous entoure, des mĂ©galithes aux ruines de chĂąteaux, nous invitant Ă  nous documenter toujours plus.

La bibliothĂšque de Milagro s’est donc Ă  nouveau Ă©toffĂ©e de quelques ouvrages supplĂ©mentaires, sans parler de ceux que Vicky prĂ©voit de nous recommander d’avoir Ă  bord, et c’est sous peu qu’un dictionnaire gaĂ©lique-anglais embarquera pour nous aider Ă  comprendre ce que signifient les noms des lieux oĂč nous naviguons. Un rdv est pris : Ă  notre prochain passage Ă  Loch Melfort, c’est sĂ»r nous irons rendre visite Ă  Vicky et Margaret !

Avant de reprendre notre route vers le nord, le week-end passĂ©, est venu le temps des retrouvailles pour Damien : le retour Ă  Kames Fish Farm. C’est anxieux qu’il est venu se prĂ©senter Ă  l’accueil de la ferme : aprĂšs 20 ans sans nouvelles, les gĂ©rants de cette entreprise familiale seraient-ils encore lĂ  ? La ferme aurait-elle Ă©tĂ© rachetĂ©e par des sociĂ©tĂ©s norvĂ©giennes, comme de nombreux Ă©levages de poissons Ă©cossais ? Damien se prĂ©sente et c’est alors qu’un homme d’une trentaine d’annĂ©es lui sert la main : Andrew, celui avec qui Damien s’était occupĂ© des lapins, jouĂ© aux jeux vidĂ©o avec son frĂšre Charles et lui,.. quand il Ă©tait tout petit ! Dans la foulĂ©e Andrew appelle son pĂšre, Stuart, l’entrepreneur Ă  l’origine de cette ferme et avec qui travaillait Damien. Quelques minutes plus tard, il arrive et nous fait visiter l’écloserie, le bureau de contrĂŽle Ă  distance de la sĂ©curitĂ© des cages dispersĂ©es dans les Ăźles, la distribution de nourriture en cliquant derriĂšre un Ă©cran, la sĂ©lection des spĂ©cimens plus aptes Ă  s’adapter au changement climatique
 Toujours en quĂȘte d’amĂ©lioration, il nous apprend aussi qu’il a dĂ» faire face Ă  une catastrophe sanitaire s’étant abattue sur sa ferme il y a plusieurs annĂ©es (une fiĂšvre aphteuse venue de NorvĂšge), l’obligeant Ă  abattre l’ensemble de ses saumons plutĂŽt que de tomber dans les excĂšs largement documentĂ©s des dĂ©rives des Ă©levages. Kames n’élĂšve donc plus de saumons comme il y a 20 ans, mais des truites, et en nombre qui donne le tournis : quand Damien y travaillait, la ferme commercialisait entre 200 et 300 tonnes de saumons par an, et aujourd’hui c’est plus de 3000 tonnes de truites exportĂ©es jusqu’aux USA.

Nous sommes ensuite repartis à bord de Milagro, non sans curiosité pour le mystérieux voisin chilien évoqué lors de nos échanges avec les locaux.

Certains partent d’Europe vers l’Argentine ou le Chili, en Patagonie ou ailleurs, pour refaire leur vie, et d’autres font le chemin dans l’autre sens, comme le milliardaire chilien fondateur du FFP (Fondation Pour le ProgrĂšs). Connu au Royaume-Uni pour avoir achetĂ© un lodge (Kilchoan) Ă  plusieurs millions de livres, ce membre de la secte des LĂ©gionnaires du Christ a fait sa renommĂ©e locale en organisant la reforestation des collines avoisinantes et en faisant construire une chapelle inspirĂ©e de celle d’Iona, sur les rives de Loch Melfort. Pour cela il a fait appel Ă  des artisans locaux et soignĂ© son image, une image trĂšs Ă©loignĂ©e de celle qui est la sienne Ă  plusieurs milliers de kilomĂštres de lĂ  : ancien militaire dans les annĂ©es 70, il multiplia les dĂ©clarations en faveur de Pinochet (“son Ă©norme gratitude”), n’hĂ©sitant pas Ă  affirmer que pour lui, les droits sociaux n’existeraient pas. Ses propos au Chili, aux antipodes de l’image renvoyĂ©e ici, auront largement suffit pour que nous nous abstenions de faire l’escale suggĂ©rĂ©e dans la baie faisant face Ă  sa chapelle. Nos amis chiliens, qui subissent les effets dramatiques du libĂ©ralisme extrĂȘme menĂ© depuis des dĂ©cennies dans leur pays, sont nombreux Ă  souffrir des dĂ©cisions et idĂ©es dĂ©veloppĂ©es par cet homme et ses partisans.

Loch Melfort Karukinka 052024 1

Ce ne sont pas ses activités locales et cette chapelle qui nous feront oublier les ombres et la violence du pinochetisme.

Laissons cette chapelle dans notre sillage, avec un nouveau chapitre qui s’ouvre dans l’étrave de Milagro : cap sur Mull !

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PS: l’Ecosse nous plaĂźt tellement que nous avons fait le choix de revoir notre programme pour y rester plus longtemps et simplifier la venue de ceux qui veulent nous rejoindre, sans galĂ©rer avec la logistique. Vous verrez donc (ici) que nous proposons Ă  partir de samedi prochain 5 sĂ©jours d’une semaine simplifiĂ©s : dĂ©part et arrivĂ©e Oban ! Depuis Glasgow (vols directs depuis Paris, Nantes, Bordeaux, Lyon
) il faut compter 3h de train direct ou de bus dans les Highlands (un voyage dans le voyage !) pour nous rejoindre au port de Oban. Pour ceux qui voudraient Ă©viter l’avion, cette destination est aussi accessible en train depuis la France (comptez 12h depuis Paris).

Bref, si vous avez besoin d’aide pour vous organiser, nous ne sommes pas une agence de voyage mais nous sommes lĂ  pour vous aider et serons ravis de vous accueillir pour partager ces lieux oĂč , comme le montre notre derniĂšre petite vidĂ©o aux Treshnish Isles : il n’y a pas foule !

[Cap au Nord – 2024] C’est parti ! Milagro descend la Loire avant de faire route vers l’Irlande

[Cap au Nord – 2024] C’est parti ! Milagro descend la Loire avant de faire route vers l’Irlande

A la mi-journée le mercredi 3 avril 2024, Milagro et son équipage ont quitté Nantes, larguant les amarres au ponton Belem.

La saison 2024 est donc lancĂ©e, avec une premiĂšre Ă©tape vers Dublin, suivie de plusieurs Ă©tapes en Ecosse puis en NorvĂšge, avec un retour prĂ©vu via l’Islande et l’Irlande Ă  l’automne prochain.

(c) Barbara Clerc

Amis nantais, nous vous donnons rendez-vous aprĂšs ce pĂ©riple, Ă  l’hiver 2024-2025, avec toujours plus d’expĂ©riences et son lot d’histoires Ă  raconter ! D’ici-lĂ , profitez encore quelques jours de l’exposition photographique et sonore Ă  l’AlmacĂ©n, 4 rue de l’Arche sĂšche Ă  Nantes (jouxte la Place Royale)

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(c) Barbara Clerc

Milagro, le navire de Karukinka, est en escale Ă  Nantes, ponton Belem au premier trimestre 2024

Milagro, le navire de Karukinka, est en escale Ă  Nantes, ponton Belem au premier trimestre 2024

AprĂšs convoyage depuis la Grande Motte en dĂ©cembre/janvier, le voilier Milagro et son Ă©quipage sont arrivĂ©s Ă  Nantes, ponton Belem, pour une escale mĂȘlant prĂ©paration technique et rencontres avec le public jusqu’Ă  fin mars 2024.

Sont au programme :

  • une exposition mĂȘlant sons et photographies;
  • des confĂ©rences et rencontres dĂ©diĂ©es Ă  la Patagonie et au Finnmark
  • L’installation d’un nouveau chauffage, la rĂ©fection de quelques hublots, la rĂ©vision du matĂ©riel de sĂ©curitĂ© et quelques optimisations des manƓuvres, en vue d’un dĂ©part fin mars vers l’Ecosse (HĂ©brides, Orcades et Shetlands) et la NorvĂšge (Troms et Finnmark).

Informations pratiques : https://karukinka-exploration.com

Au plaisir de vous rencontrer Ă  bord (+33 6 72 83 03 94, contact@karukinka.eu) !

Milagro Nantes Belem 012024
Milagro, le navire de Karukinka, est en escale Ă  Nantes, ponton Belem au premier trimestre 2024 23