“Ils réalisent un acte pour le “Dernier jour de liberté des peuples autochtones d’Amérique” (Realizan acto por el “Último día de la libertad de los pueblos originarios de América” Info Fueguina, 14 octobre 2023)

“Ils réalisent un acte pour le “Dernier jour de liberté des peuples autochtones d’Amérique” (Realizan acto por el “Último día de la libertad de los pueblos originarios de América” Info Fueguina, 14 octobre 2023)

“L’activité s’est déroulée dans le cadre du Cycle Cérémoniel des Journées de la Paix et de la Dignité, impulsée par la Secrétaire de Gestion, Promotion et Renforcement des Droits et de l’Organisation Communautaire. La proposition était de commémorer les 530 ans de résistance. Il s’agit d’une activité validée par Ordonnance Municipale depuis 2016.

https://www.infofueguina.com/tu-ciudad/ushuaia/2022/10/14/realizan-acto-por-el-ultimo-dia-de-la-libertad-de-los-pueblos-originarios-de-america-67826.html

Traduction en français d’un article paru en espagnol dans le journal Info Fueguina, le 14 octobre 2023.

“Le but était de commémorer les 530 ans de résistance”, a-t-il été signalé par la Municipalité de la capitale, et il s’est démarqué par la présence, durant cet évènement, de Margarita Maldonado, femme Selk’nam, et de Victor Vargas Filgueira, homme Yagan, lesquels ont participé à la cérémonie et ont commémoré le départ de Catalina Filgueira, aussi membre de la communauté Yagan, ainsi qu’à l’expression de percussions, Tambores del Sur, qui a accompagné les activités.

“Ces cérémonies nous rappellent l’importance de la liberté et de pouvoir l’exercer pleinement, a souligné la secrétaire de Culture et Education, Belén Molina, laquelle a commenté que “suivant la ligne de cette gestion municipale, nous accompagnons et célébrons les activités qui nous conduisent à réfléchir sur notre histoire et visibiliser nos racines.”

La Secrétaire de Gestion, Promotion et Renforcement des Droits et de l’Organisation Communautaire, Vanina Ojeda, a expliqué, à son tour, que “ceci est une reconnaissance aux peuples indigènes en leur dernier jour de liberté en Amérique”.

“Historiquement, le 12 octobre a symbolisé le progrès, alors qu’il a été le début de 130 ans d’assujettissement sur les peuples autochtones” a observé la fonctionnaire.

En ce sens, elle a considéré que “c’est une date de réflexion, durant laquelle, accompagnés par les membres des peuples autochtones, nous partageons et visibilisons leurs voix, resignifiant cette date, marquant le commencement de siècles de luttes et résistance que tant de pays continuent encore de célébrer comme le Jour de la Race”.

“Pas de justice environnementale sans justice sociale” (Bleu Tomate, 26/08/2023)

Arles accueille du 21 au 27 août, la 4e édition du festival Agir pour le Vivant. Projections, conférences, ateliers, balades ou cafés citoyens : autant d’occasions de faire émerger une société du vivant. « Nous serons un peuple quand ? » Tel était le thème de la conférence qu’a suivi Bleu Tomate.

Quels sont les liens entre le climat et le racisme, le colonialisme ou la pauvreté ? Pour Fatima Ouassak, politologue et militante écologiste, « il existe en France un processus de désancrage des populations assignées à certains territoires, qui subissent spoliation et dévastation. On leur répète que cette terre n’est pas la leur, et ils ne sont pas considérés légitimes à discuter des projets qui les concernent ».

Déficit de démocratie ici…

La militante de citer en exemple l’installation de data centers ou de nouvelles autoroutes.  Egratignant au passage certains artistes ou militants écologistes prompts à soutenir les luttes lointaines mais peu engagés pour les quartiers et leurs habitants racisés.

affiche Agir pour le Vivant 2023

Une parole non reconnue et non entendue également sous d’autres cieux. Lauriane Lemasson est ethnomusicologue. Elle travaille depuis des années avec les peuples de la Terre de Feu. Survivants d’un génocide qui les a vus disparaitre à 95%, ils ont été classés à l’époque entre les animaux et les humains, donc « sous-humanisés ». Les colons se sont accaparé leurs territoires, voués aux estancias d’élevage.

… Et ailleurs

Et même si le droit international reconnait aujourd’hui le droit des peuples sur leurs territoires, ils ont beaucoup de mal à monter des dossiers pour prouver leur antériorité sur ces espaces qui leur sont aujourd’hui interdits.

La jeune chercheuse donne l’exemple d’un gigantesque projet de fabrication d’hydrogène et d’ammoniac (dit vert, car à partir de l’énergie éolienne). Aucune concertation avec les représentants des peuples autochtones, mis devant le fait accompli.

La responsabilité du colonialisme

« Le colonialisme rime avec la destruction de la planète » explique Arturo Escobar. Le célèbre anthropologue, chercheur-activiste voit quatre moments dans son histoire. La découverte de l’Amérique du XVe au XVIIe siècle, avec la destruction non seulement des peuples eux-mêmes, mais aussi de leur culture et de leurs connaissances.

justice sociale et environnementale en débat à Arles

Une assistance fournie a suivi les interventions avec intérêt ici à la Chapelle du Méjan ©JB

Puis au XVIIIe, s’impose une vision scientifique qui sépare l’humain de la nature et les blancs européens des autres humains auxquels on ne reconnait justement pas de conscience.

Avec le XIXe siècle vient le capitalisme, économique mais aussi comme un concept de vie. Il voit l’humain individualiste, agressif et compétitif. Au XXe enfin, la pensée libérale arrive au bout de son cycle. Elle affiche « un cosmos patriarcal, séparatiste et dominateur sur l’autre », explique le scientifique.

Alors, quand fait-on peuple ?

Fort de ces constats, quelles solutions ? Chacun des intervenants a apporté sa pierre à la réflexion, devant un public nombreux, dans une chapelle du Méjan surchauffée par la canicule extérieure.

Fatima Ouassak l’exprime comme un cri : « On a besoin d’autonomie, de liberté, laissez-nous respirer ! On est chez nous, on veut transmettre notre langue, notre culture, notre religion, c’est notre droit ».

Dans ces territoires où la classe ouvrière et les personnes racisées ont si peu accès au débat démocratique et renoncent souvent au bulletin de vote, « on doit avoir des partis, des syndicats, des collectifs », poursuit la militante écologiste engagée à Bagnolet. Et se saisir du pouvoir politique, car « les AMAP, le tri et les jardins partagés on fait déjà, mais cela ne suffit pas ».

Agir pour le Vivant à Arles août 2023

Le thème du festival en 2023 : « Climat et inégalités sociales »

La 2e conquête du désert

En Patagonie et bientôt en Finlande avec les Samis, Lauriane Lemasson agit, sac à dos. Elle documente les territoires pour aider les communautés à faire valoir leurs droits. Ici, elle trouve les traces d’un lieu rituel, là une montagne connue pour être repère entre deux migrations saisonnières. L’ethnomusicologue étudie les rapports entre les sons, les habitants et les territoires.

Sentir-penser pour penser-agir

Pour Arturo Escobar, il faut changer de paradigme et penser différemment. Il met pour cela en avant le concept de « sentir-penser », (créé par le sociologue colombien Orlando Fals-Borda). « Il revient à chacun de nous à présent d’apprendre à sentir-penser avec les territoires, les cultures et les connaissances des peuples ». Manière pour l’anthropologue, de se connecter avec les flux de l’univers.

Sa réponse à la pensée libérale est de travailler à plusieurs mondes.    « Un non à la globalisation, et plusieurs oui ». Oui aux luttes ancrées, enracinées dans les territoires, aux alternatives locales et radicales, aux actions des collectifs en réseaux. En citant la lutte contre l’extractivisme, Arturo Escobar rappelle que la technologie numérique est particulièrement gourmande de minerais extraits dans le Sud global.

Cannes 2023 : « Eureka », Lisandro Alonso en chamane de la condition indigène (Le Monde, 21/5/2023)

D’une originalité extravagante, le nouveau long-métrage du cinéaste argentin, avec Viggo Mortensen et Chiara Mastroiani, navigue entre le monde des vivants et celui des morts.

Par Mathieu Macheret Publié le 21 mai 2023 à 12h57, modifié le 24 mai 2023 à 14h47

Le réalisateur argentin Lisandro Alonso, à Cannes, le 20 mai 2023.
Le réalisateur argentin Lisandro Alonso, à Cannes, le 20 mai 2023. CHLOE SHARROCK/MYOP POUR « LE MONDE »

CANNES PREMIÈRE – HORS COMPÉTITION

Le Festival de Cannes ressemble parfois tant à une foire au sujet porteur qu’un film sans sujet immédiatement identifiable a priori, où le spectateur doit faire son chemin, paraît tout à coup une bouffée d’air frais. Cette grande respiration, cette année, c’est à Eureka, film-fleuve de l’Argentin Lisandro Alonso, présenté en Sélection officielle section Cannes Première, qu’il sera revenu de l’insuffler. Neuf ans après le western pampero Jauja (2014), ce nouveau film, d’une originalité extravagante, partage avec la matière du songe la capacité de se transformer à vue, de franchir le temps et l’espace comme à saute-mouton.

On connaissait jusqu’alors Lisandro Alonso comme astre frondeur du « nouveau cinéma argentin », apparu au début des années 2000, son versant frugal et rustique (La Libertad, entièrement consacré aux travaux d’un bûcheron), avec une claire appétence pour les territoires reculés (Liverpool (2009), odyssée au fin fond de la Patagonie), à tel point qu’ils jouxtent celui des morts (Fantasma, 2006). Avec Eureka, on le redécouvre comme un cinéaste américain au sens premier : parce qu’il se penche sur la condition indigène, non pas localement, à l’échelle d’une tribu, mais de façon transcendante, à celle d’un continent entièrement bouleversé par l’histoire coloniale.

La suite est réservée aux abonnés : https://www.lemonde.fr/culture/article/2023/05/21/cannes-2023-eureka-lisandro-alonso-en-chamane-de-la-condition-indigene_6174216_3246.html

En Argentine, le combat d’un vétéran des Malouines pour récupérer sa carte militaire (Le Monde, 11/5/2022)

Le document appartenant à Edgardo Esteban, fait prisonnier par les Britanniques en 1982 à l’issue de la capitulation de Buenos Aires, une blessure toujours à vif dans le pays, avait été repéré sur un site de vente aux enchères au Royaume-Uni.

Par Flora Genoux (Buenos Aires, correspondante) Publié le 11 mai 2022 à 03h20, modifié le 11 mai 2022 à 09h43

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Edgardo Esteban, ému, brandit sa carte militaire, à l’issue d’une cérémonie de remise officielle, organisée au ministère des affaires étrangères, à Buenos Aires, le 21 avril 2022.
Edgardo Esteban, ému, brandit sa carte militaire, à l’issue d’une cérémonie de remise officielle, organisée au ministère des affaires étrangères, à Buenos Aires, le 21 avril 2022. INSTAGRAM @EDGARDOJESTEBAN

LETTRE DE BUENOS AIRES

Les yeux brillants, Edgardo Esteban, 59 ans, brandit sa carte d’identité militaire, le point final à « un puzzle de quarante ans », selon ses déclarations, à l’issue de cette cérémonie filmée, organisée au ministère des affaires étrangères, à Buenos Aires, le 21 avril. Sur le précieux papier, une photo de lui en noir et blanc, en tenue de soldat. Il a 18 ans et les cheveux coupés à ras, à son grand dam – ce fan de Queen préférait les porter longs, comme la jeunesse de cette époque. Le tampon de l’armée est apposé, au-dessus de la mention de son groupe sanguin, A +, et de la date de la délivrance du document, le 2 juin 1981.

L’Argentine est alors en pleine dictature militaire, depuis le coup d’Etat de 1976, et c’est cette pièce d’identité que le jeune Edgardo Esteban porte sur lui quand il décide de rejoindre, comme soldat, l’archipel des Malouines, en avril 1982, à environ 500 km des côtes de la Patagonie argentine, un peu « comme une aventure », comme « s’[il allait] sur la Lune ». Avant de découvrir, à même pas 20 ans, « le mot mort », durant cette guerre qui oppose pendant soixante-quatorze jours, du 2 avril au 14 juin, l’Argentine au Royaume-Uni. Sous contrôle britannique depuis 1833, auparavant argentines, ces îles ont toujours été revendiquées par Buenos Aires. En 1982, la junte militaire, alors malmenée par une économie moribonde, voit là l’occasion de fédérer le pays autour d’une cause commune. Bilan : 649 morts côté argentin, 254 côté britannique. Une défaite qui accélère la chute de la dictature et le retour à la démocratie, en 1983.

« Je suis un homme qui aime la vie, mais cette blessure de la guerre, que je pensais fermée, s’est ouverte de nouveau avec intensité. [Ce document] me ramène à son souvenir », confie Edgardo Esteban, journaliste, actuellement directeur du Musée des Malouines et de l’Atlantique Sud, à Buenos Aires. Une carte d’identité volatilisée pendant des décennies, qui a voyagé à son insu depuis cet archipel situé à 12 000 km de Londres jusqu’au Royaume-Uni, avant de…

La suite de cet article est réservée aux abonnés : https://www.lemonde.fr/international/article/2022/05/11/en-argentine-le-combat-d-un-veteran-des-malouines-pour-recuperer-sa-carte-militaire_6125556_3210.html

« Sauvages, au cœur des zoos humains », de Barnum aux expositions universelles (L’Obs, 5/4/2022)

« Sauvages, au cœur des zoos humains » (arte)
« Sauvages, au cœur des zoos humains » (ARTE)

Pascal Blanchard et Bruno Victor-Pujebet racontent comment ces manifestations populaires ont propagé le mythe de l’inégalité des races et justifié le fait colonial.

Par Guillaume Loison

Publié le 5 avril 2022 à 17h00·Mis à jour le 5 avril 2022 à 17h45

Zoo humain, l’expression est certes anachronique – elle est apparue dans les années 2000 -mais elle sied parfaitement à ces manifestations populaires nord-américaines et européennes qui, du début du XIXe siècle jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, ont mis en scène diverses ethnies issues des empires coloniaux dans des foires et autres expositions universelles. Par-delà l’humiliation publique et les mauvais traitements – la plupart des individus exhibés périssaient de froid, de maladie -, le spectacle propagea le racisme autant qu’il justifia l’investissement des politiques coloniales de l’époque.

Baromètre de la pensée raciste

Avec une foule impressionnante d’images d’archives, ce documentaire fouillé, pédagogique et émouvant retrace l’évolution de ce phénomène oublié, du moins négligé par une génération d’historiens ( « Comme tout ce qui se rapporte à la culture populaire » , précise-t-on ici). Des premières attractions du forain Phineas Barnum, prince du « freak show » américain – où Aborigènes et Pygmées, fondus dans une troupe de handicapés occidentaux, étaient assimilés à des monstres humains -, à ces cartes postales vivantes, entre la crèche géante et le parc d’attractions livrant au visiteur blanc un folklore exotique dévitalisé au début du XXe siècle, le zoo humain n’est pas un genre monolithique. C’est au contraire un baromètre ultra-précis de la pensée raciste, de ses tréfonds primitifs à son polissage relatif : après avoir fantasmé ces populations comme cannibales, il s’agit par la suite de les érotiser, puis de les présenter comme assimilables à la civilisation.

L’autre atout du film tient à sa manière de mettre en relief une poignée de destins individuels, démarche qui prend à rebours le principe d’effacement du zoo humain. De « Petite Capeline », enfant de 2 ans issue de Patagonie succombant à une bronchite au Jardin d’Acclimatation – place forte du genre en France -, à cet Aborigène dont on retrouve, des décennies après sa mort, la dépouille momifiée au sous-sol d’une entreprise de pompes funèbres de Cleveland, tous recouvrent ce soir un éclair de dignité.

Mardi 5 avril à 20h55 sur Arte. Documentaire de Pascal Blanchard et Bruno Victor-Pujebet (2018). 1h30. (Disponible en replay jusqu’au 3 juin 2022 sur Arte.tv).

Par Guillaume Loison