Il s’agit d’une initiative présentée par la conseillère municipale Cintia Susñar, à la demande du groupe de femmes selknam « Khol Hol Naa ». Elle sera débattue en commission à partir de la semaine prochaine et vise à reconnaître « les femmes qui ont lutté et qui continuent de lutter pour les droits des peuples autochtones ».

À travers un projet d’ordonnance, la conseillère municipale Cintia Susñar propose que l’on donne à un groupe de rues de Río Grande des noms de femmes autochtones selknam, répondant ainsi à une demande de l’Agrupación « Khol Hol Naa ».
Source: https://criticasur.com.ar/nota/28986/proponen_denominar_calles_de_rio_grande_con_nombres_de_mujeres_originarias_selknam/?rand=912 / traduit de l’espagnol par les bénévoles de l’association Karukinka
Parmi les arguments de sa proposition, Susñar affirme que « l’identité d’une ville se construit en valorisant ses origines », c’est pourquoi « dans le but de renforcer la culture de la ville, nous devons reconnaître, nommer et faire connaître les origines de notre culture, avec ses femmes qui ont été un pilier fondamental pour toute organisation de la société ».
En ce sens, l’élue considère que « nous devons encourager ce type d’actions afin que tous les représentants de notre ville reçoivent l’hommage et la reconnaissance qu’ils méritent », soulignant que « les premières femmes ont été des pionnières sur notre terre, et c’est ainsi que nous devons leur accorder la reconnaissance qu’elles méritent, afin de mettre en valeur leur travail, leur dévouement et leurs milliers de traces si fécondes dans notre quotidien ».
Par ailleurs, Susñar a mis en avant l’Agrupación « Khol Hol Naa », assurant qu’elle « travaille sans relâche pour que ses valeurs et principes soient transmis de génération en génération », ajoutant que « dans les temps que nous vivons, il est plus qu’important de donner la place qui revient aux femmes qui, par leurs efforts, ont forgé notre histoire ».
Six artères, actuellement sans nom, seront incluses dans le projet :
Calle s/n 418: Virginia Ángela Choquintel Napoleón
Calle s/n 438: Enriqueta Gastelumendi:
Calle s/n 439: Elvira Oray
Calle s/n 440: Rosario Imperial
Calle s/n 442: Herminia vera hilioyen
Calle s/n 443: Covadonga
La demande de Khol Hol Naa
Dans la note adressée à Susñar, les membres de l’Agrupación « Khol Hol Naa » (qui signifie « le retour des femmes » en langue selknam) ont indiqué que l’objectif est de « consolider le genre féminin et, surtout, nos racines », assurant que l’on cherche ainsi à rendre hommage « à toutes nos sœurs qui ont lutté et qui luttent encore pour les droits des peuples autochtones ».
« C’est pourquoi l’idée a toujours été de préserver et de sauvegarder la culture selknam, qui a été exclue pendant des années. Nous voulons faire valoir respectueusement notre histoire et celle de chacune de celles qui ont subi les pires atrocités et mauvais traitements », ont-elles indiqué.
Enfin, depuis l’entité, elles ont souligné que « compte tenu du contexte actuel de la ville, alors que nous célébrons notre centenaire, nous souhaitions demander cordialement de donner le nom de nos femmes autochtones à des rues, des places, des placettes, des ronds-points ou tout autre espace public ».
« Dans le contexte actuel, la femme a gagné une place méritée, réalisant d’importants progrès pour notre société, mais nous ne pouvons pas oublier nos sœurs qui ont lutté pour notre terre, où elles ont subi les pires actes de violence, d’abus et où elles ont été totalement vulnérables face à l’invasion », ont-elles affirmé.
Qui sont les femmes selknam proposées pour cet hommage ?

Virginia Ángela Choquintel Napoleón
est née le 20 juillet 1942 à la Mission salésienne de Río Grande, où elle a été pensionnaire, a effectué ses études primaires et a vécu une grande partie de sa vie. Elle a été témoin de la fin des peuples autochtones de la Terre de Feu, qui, à cette époque, ne comptaient plus que quelques survivants du génocide selknam, du métissage et des maladies importées par les Blancs.
Elle gardait très peu de souvenirs de son enfance. Elle se rappelait que son père, Natalio Choquintel, qui vivait dans une maison de la Mission salésienne, l’emmenait tous les après-midis faire du cheval. De sa mère, Magdalena Saenes, elle ne se souvenait de rien, car celle-ci avait succombé aux maladies apportées par les Occidentaux alors que Virginia n’avait que 4 ans. Virginia est décédée le 2 juin 1999 à Río Grande, à l’âge de 56 ans
Enriqueta Gastelumendi
« La India Varela » (1913-2004) est née un jour d’hiver, fille d’une mère selknam et d’un père basque espagnol. Elle a été femme, mère, grand-mère et, par-dessus tout, une femme qui nous a légué son art, ses œuvres ou, comme elle disait, « ses petits travaux » qui semblaient avoir une vie propre, cette vie transmise de l’identité fuégienne, incarnée dans le lenga, se transformant d’un arbre tombé en sang de la terre devenu art, sculptant différentes œuvres, par exemple : le Christ ona parmi tant d’autres créations. Enriqueta est décédée le 29 août 2004.

Elvira Oray
Elle est née à Río Grande le 4 août 1934, fille d’Adela Parra (selknam) et de Ramón Oray, appartenant à la lignée de Lola Kiepja. À l’âge de 6 ans, elle fut amenée, avec le groupe de femmes de la famille, à vivre à la Mission salésienne, où elles furent ensuite séparées. Elvira a subi toutes sortes de violences, étant vulnérable du fait d’être « orpheline » et autochtone. À sa majorité, elle s’est mariée avec Sabino Salamanca et ils ont eu six enfants. Elle a travaillé à l’abattoir CAP et au Centre sportif municipal. Elle est décédée le 7 juillet 1987 à Río Grande

Rosario Imperial
Selknam, propriétaire de la première pension de Río Grande, où séjournaient des gens de la campagne et des « paisanos » selknam. C’était un lieu où ils se réunissaient pour parler leur langue. Elle est décédée en 1970.

Herminia Vera Hilioyen
Herminia Vera Hilioyen, selknam, fille de Matilde Hilioyen (selknam) et d’Antonio Vera, est née le 27 octobre 1922 à l’estancia Viamonte, où elle a passé son enfance. Par la suite, elle a été envoyée à Punta Arenas pour commencer l’école primaire, puis elle est revenue à la Mission salésienne où on lui a dispensé l’enseignement de l’époque. Elle s’est mariée à 21 ans et a eu 10 enfants. Herminia a toujours gardé à l’esprit qu’elle avait traversé des périodes de discrimination, ce qui a conduit à ce que ses origines soient cachées. Elle était reconnue pour sa chaleur humaine et sa gentillesse envers toute personne qui dialoguait avec elle. Herminia est décédée le 5 juillet 2014

Covadonga
Femme du peuple selknam, également connue sous le surnom de « chonga ». Elle a été arrachée à son habitat à l’âge de 10 ans pour être mise en servitude, se faisant aimer pour sa sympathie et sa gentillesse. Elle a appris à lire et à écrire, parlait allemand et espagnol. On la voyait très à l’aise et joyeuse avant sa mort soudaine (tuberculose) en 1899. Sa mort a toujours été entourée de doutes, car il a été découvert qu’elle transmettait des informations à un jeune cacique tehuelche.
