
[Canaux de Patagonie 2025] Le carnet de bord de Sébastien (partie 1)

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Sommaire
Mardi 28 Janvier 2025 : départ de l’expédition en voilier dans les canaux de Patagonie chilienne
Réveil difficile ce matin, la nuit a été courte et la journée précédente riche, comme toujours la veille d’un départ pour 18 jours d’expédition en voilier dans la réserve de biosphère du cap Horn : ravitaillement, avitaillement… une foule de choses qui ne peuvent bien-sûr se faire qu’au dernier moment à Ushuaia !
8h donc, petit-déjeuner, et il y a du monde pour ce petit-déjeuner. En effet, hier nous avons accueillis 5 nouveaux équipiers : Annick et Jacques les gersois du bord, Pascal le grenoblois, Alain le vannetais et Françoise la parisienne ; le point commun: ils sont tous d’heureux retraités ! Avec Aude, qui décidément ne veut plus quitter le bord, Damien, Lauriane et moi-même nous serons 9 membres à bord !
L’installation étant faite, le rituel se met en place : faire les formalités auprès des autorités locales d’Ushuaia : à chaque voyage, il faut passer par la préfecture navale, l’immigration et la douane, tant du côté argentin que du côté chilien !




A l’issue de ces formalités, nous avons le droit à une visite de contrôle, comme cela nous est déjà arrivé à Bahia San Blas lors de notre croisière hauturière le long de la Patagonie argentine depuis Buenos Aires. En général, il s’agit principalement du contrôle des papiers du bateau, des moyens de communication et des moyens de sauvetage… et ça se passe toujours bien !
Avec toutes ces obligations, nous ne quittons Ushuaia qu’à 13h, pour une arrivée à 18h à Puerto Williams, la ville la plus au sud du monde, sur l’île Navarino (province du cap Horn et de l’Antarctique chilien), après une navigation tranquille. Mouillage devant la ville, faute de place au port de pêche et à proximité du mythique Micalvi, bateau-ponton et patrimoine historique local bien connu des voileux qui passent dans le coin avant d’aller dans le grand Sud. Un peu plus tard un autre voilier français, présent depuis fort longtemps dans la région, jette l’ancre à nos côtés : le Podorange.






Mercredi 29 Janvier 2025 : en attendant les formalités -> randonnée sur l’île Navarino !
Ce matin, et puisque nous voilà au Chili, c’est reparti pour les formalités d’entrée dans le pays avec les différentes autorités. Du coup, journée à terre pour tout le monde : Lauriane et Damien partent effectuer le marathon des formalités, Alain et Annick vont se promener sur la grève le long du canal Beagle et Pascal, Françoise, Jacques, Aude et moi partons faire le sommet « scolaire » au-dessus du village : le Cerro Bandera. Ce sommet, de 600m d’altitude, permet d’avoir une belle vue panoramique sur les environs.
L’accès à ce sommet est une exception dans la région : en effet, c’est un des seuls où il y a un sentier aménagé, bien tracé, ce qui rend la montée aisée. La majeure partie du temps ailleurs, les itinéraires il faut se les tracer, la nature est omniprésente et ne se laisse découvrir qu’après de vrais efforts !
C’est une belle montée qui devient agréable après avoir quitté une piste pour 4X4 : nous traversons la superbe forêt fuégienne, puis les petits arbustes touffus battus par les vents avant d’accéder au niveau minéral, où seules des mousses réussissent à survivre, à l’approche du sommet. Le ciel est couvert mais sans vent et il y a une très bonne visibilité. Différents points de vue permettent d’admirer, à des altitudes variées, le canal et les sommets environnants.






Chacun à son rythme, tout le monde se retrouve au sommet matérialisé par un cairn surmonté d’un drapeau chilien. De ce sommet, on voit différentes traces qui laissent supposer de nombreuses possibilités de randonnées, sur de nombreux jours, pour aller découvrir cette île ; ça donne des fourmis dans les jambes…!
Le temps étant clément, c’est un pique-nique suivit d’une petite sieste réparatrice, qui précèdent la descente qui se fait par le même chemin, et qui va se terminer dans un petit salon de thé très cosy. Retour à bord vers 18h30 pour une soirée tranquille, après cette belle journée de balade.
Jeudi 30 Janvier 2025 : cap à l’Ouest dans le canal Beagle, vers l’île Hoste
Réveil 6h, départ 7h, car ce matin nous avons de la route : nous retournons plein Ouest, pour passer devant Ushuaia puis continuer vers l’île Hoste. La navigation est calme, au moteur faute de vent. En début d’après-midi, c’est la surprise : le vent se lève et souffle en tempête, avec des rafales à 45 nœuds, le canal Beagle montre son visage sous mauvais temps, et c’est impressionnant. Une seule solution plutôt que de lutter bêtement au moteur vent dans le nez, aller se mettre à l’abri : direction la caleta Letier (péninsule Dumas, île Hoste, fjords chiliens). L’endroit est superbe, avec une petite baie bien protégée et la forêt qui vient mourir sur le rivage. La manœuvre de mouillage par contre, va être moins idyllique…
L’ancre ne croche pas, la quantité de kelp au fond est telle qu’elle l’en empêche. Elle remonte couverte d’une montagne de ce kelp mélangé à un peu de vase. Il faut tout couper et faire tomber avant de refaire une tentative de mouillage, c’est fatiguant et salissant !! Finalement une nouvelle tentative se solde enfin par un succès : Milagro est enfin mouillé en toute sécurité ! Ouf !!


Et c’est tant mieux, car le coup de vent, qui n’avait pas été annoncé, est violent : les bourrasques à 40 nœuds, sont puissantes et soudaines, inclinant Milagro sur le flanc, à l’abri dans sa baie. Dans le canal c’est pire : les rafales dépassent largement les 50 nœuds, le canal est blanc, les crêtes des vagues sont arrachées par le vent créant un brouillard blanc au-dessus des flots. L’armada chilienne annonce l’interdiction temporaire de la navigation dans le chenal et les ports d’Ushuaia et Puerto Williams sont fermés.

L’endroit est rude mais superbe, avec les différentes criques, la forêt et les montagnes qui dominent le tout.
Vendredi 31 Janvier 2025 : premiers coups d’oeil vers les glaciers de la cordillère Darwin et mouillage dans une baie de l’île Gordon
8h du matin petit tour matinal sur le pont : c’est magnifique ! Le vent est tombé, même le canal est calme. Moment de quiétude délicieux, seuls au fond de cette caleta.
Nous partons vers l’Ouest, l’île Hoste sur notre gauche, la Terre de Feu sur notre droite, et au loin les glaciers de la cordillère Darwin scintillent au soleil… Les paysages qui défilent sont superbes : des chenaux avec de part et d’autre la dense forêt fuégienne subantarctique, les montagnes et, pour chapeauter le tout, des glaciers. C’est extraordinaire d’être au cœur d’un des derniers endroits de la planète où la Nature est toute puissante et l’Homme quasi-absent.
Direction le bras Sud du canal: nous longeons toujours sur bâbord les rivages de l’île Hoste, mais sur notre tribord, les côtes de l’île Gordon succèdent à celles de la Terre de Feu. Nous longeons alors des glaciers d’altitude, qui hélas sont grandement réduits par le réchauffement climatique : comme pour les montagnes, les zones polaires sont les plus touchées par les bouleversements liés au réchauffement climatique.
Nous bifurquons dans un fjord non hydrographié sur nos cartes et que nous remontons sur plusieurs km pour aller mouiller à son extrémité, au pied d’une cascade et d’un torrent en provenance d’un glacier en pleine fonte. Ce dernier nous domine de toute sa masse et sa fraîcheur : nous sommes dans la caleta Eva Luna. Le lieu est sublime et le bonheur d’y revenir se lit sur le visage de Lauriane qui y avait réalisé plusieurs enregistrements et images lors d’une expédition précédente (2018).




Une petite promenade le long de la grève me ramène moi aussi quelques années en arrière : la forêt fuégienne, dense, difficilement pénétrable et le sol saturé d’eau avec ses tourbières, est fidèle à mes souvenirs. Toupie, notre fidèle mascotte à quatre pattes s’en donne à coeur joie, ce ne sont pas les morceaux de bois qui manquent pour jouer au lancer-ramener sur la rive !

La soirée est calme et nous nous reposons pour continuer dès demain vers l’ouest… La suite dans un prochain post ;-)
Karukinka vous invite à écrire les prochaines pages de cette épopée unique, là où les cartes portent encore la mention énigmatique “non hydrographié”. Rejoindre Karukinka, c’est bien plus qu’adhérer à une association : c’est embarquer dans une aventure humaine et maritime exceptionnelle qui réconcilie exploration moderne et mémoire ancestrale.
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