Ce mardi, le gouvernement national a décrété la fin de l’urgence territoriale indigène, abrogeant la loi 26160 et ses extensions. Cette mesure, formalisée par le décret 1083/2024, met en échec la protection des terres traditionnellement occupées par les communautés indigènes d’Argentine et donne le feu vert aux expulsions, donnant la priorité aux intérêts privés et étatiques sur les droits des peuples indigènes.
Source : https://argentina.indymedia.org/2024/12/10/el-despojo-legalizado-el-estado-anula-la-ley-26160-y-deja-a-las-comunidades-indigenas-sin-proteccion/ Traduit de l’espagnol par l’association Karukinka
Cette décision représente un revers historique dans la lutte pour la reconnaissance et la défense des territoires ancestraux. La loi 26160, adoptée en 2006, est apparue comme une réponse à des décennies de dépossession, de marginalisation et de violence envers les communautés autochtones. Son objectif était de suspendre les expulsions et de réaliser une enquête territoriale pour garantir la sécurité juridique des territoires. Cependant, l’État n’a jamais respecté cette obligation de manière globale, laissant des milliers de communautés dans une situation de vulnérabilité permanente.
Le discours officiel : délégitimation et racisme structurel
Le gouvernement a justifié l’abrogation de la loi en arguant qu’elle générait une « insécurité juridique » et affectait les droits des « propriétaires légitimes ». Dans les considérants du décret, les communautés ont été qualifiées de « fragmentées », les accusant de faire un « usage abusif » de la réglementation. Ces déclarations délégitiment non seulement les droits territoriaux des peuples autochtones, mais perpétuent également les récits racistes qui criminalisent la lutte pour la terre.
En outre, une prétendue augmentation des conflits territoriaux a été soulignée, attribuant la responsabilité aux communautés autochtones sans mentionner le rôle de l’extractivisme, des politiques néolibérales et de la violence structurelle qui ont intensifié ces affrontements. Le discours gouvernemental rend invisibles des décennies de résistance pacifique et d’organisation communautaire contre un système qui donne la priorité aux intérêts commerciaux et au pillage des ressources naturelles.
La violence de la dépossession : expulsions et impunité
Avec l’abrogation de la loi 26160, des expulsions massives sont autorisées et affectent non seulement les communautés autochtones, mais également leurs modes de vie, leurs visions du monde et la préservation du territoire en tant qu’espace de vie collective. Ces expulsions sont, par essence, une forme de violence d’État qui répond aux intérêts du capital immobilier, minier et agroalimentaire.
Les organisations autochtones et de défense des droits de la personne ont souligné que cette mesure augmenterait les conflits sociaux et approfondirait les inégalités structurelles qui affectent les peuples autochtones. Le droit à la terre n’est pas seulement une question juridique, mais aussi une lutte pour l’autodétermination et la survie culturelle dans un contexte de colonisation persistante.
Un combat qui transcende le décret
L’abrogation de la loi 26160 ne fera pas taire les voix des communautés autochtones, confrontées à la dépossession, à la criminalisation et au génocide depuis l’arrivée des colonisateurs. Aujourd’hui plus que jamais, la nécessité de continuer à lutter pour la pleine reconnaissance des territoires ancestraux est réaffirmée, d’exiger que l’État respecte les droits consacrés dans la Constitution nationale et les traités internationaux et de dénoncer les politiques qui perpétuent l’exclusion et le racisme structurel.
Depuis les territoires, les communautés résistent : parce que la terre n’est pas qu’une ressource, elle est vie, mémoire et avenir.