En Argentine, une lagune devenue rose, polluée par des produits chimiques

Le sulfite de sodium, qui permet aux nombreuses entreprises de pêche opérant en Patagonie de conserver les langoustines avant exportation, est à l’origine de ce phénomène.

Le Monde avec AFP Publié le 26 juillet 2021 à 10h35

Une vue aérienne de cette lagune qui a viré au rose, dans la province de Chubut, en Argentine, le 23 juillet.
Une vue aérienne de cette lagune qui a viré au rose, dans la province de Chubut, en Argentine, le 23 juillet. DANIEL FELDMAN / AFP

Une eau rose fuchsia qui inquiète les populations locales. Une lagune située dans le sud de l’Argentine conservait, dimanche 26 juillet, une teinte surprenante, due au déversement de produits chimiques par des industriels de la pêche de la région. « Pour nous, c’est l’image de la négligence des autorités de la province. Ceux qui devraient contrôler sont ceux qui autorisent l’empoisonnement des populations », a dénoncé l’écologiste Pablo Lada, interrogé par l’Agence France-Presse.

« La couleur rougeâtre ne cause pas de dommages et, dans quelques jours, elle disparaîtra », avait affirmé, la semaine précédente, Juan Micheloud, responsable du contrôle environnemental de la province. D’après lui, une société transportant des effluents d’entreprises de pêche avait « été autorisée à déverser des liquides dans la lagune de Corfo ».

« Ce n’est pas possible de minimiser quelque chose d’aussi grave », a rétorqué Sebastian de la Vallina, responsable de la planification au sein de la commune de Trelew. Cette lagune, qui s’étend sur 10 à 15 hectares, est située à 30 kilomètres de Trelew, une ville de 120 000 habitants, dans la province de Chubut.

La teinte surprenante s’explique par la présence de sulfite de sodium, un agent de conservation antibactérien utilisé pour le stockage des langoustines avant exportation, qui a contaminé les eaux souterraines du fleuve Chubut. Les habitants de la région se sont également plaints d’odeurs nauséabondes et de la prolifération d’insectes.

Une pratique qui cristallise les tensions entre industriels et populations locales

Ce n’est pas la première fois que ce cours d’eau prend cette couleur, car le fleuve Chubut est un site habituel de déversement de produits chimiques par des entreprises industrielles de la région. Mais cette pratique est devenue, ces dernières semaines, un sujet de contestations au sein de la ville proche de Rawson, capitale de la province du Chubut, alimentant les revendications en faveur de la lutte pour la préservation de l’environnement.

Las de ces pollutions à répétition et de ne pas être entendus, des habitants du quartier défavorisé Area 12 de Rawson ont bloqué le passage de camions de transport de ces déchets qui traversaient leurs rues.

« Ces liquides sont déversés sans aucun traitement dans de grandes mares artificielles construites à la va-vite pour les entreprises de pêche », a expliqué Pablo Lada, membre de l’ONG antinucléaire de Chubut. Ces produits polluants « s’infiltrent jusqu’aux nappes phréatiques. Il s’agit de dizaines de camions quotidiennement », a-t-il ajouté.

Empêchés de se débarrasser de leur cargaison à Rawson, les pêcheurs ont opté pour une solution alternative : demander l’autorisation provisoire de les déverser dans la lagune de Corfo, qui n’a jamais bénéficié d’intérêts touristique ou de loisirs. Cette initiative a provoqué un litige entre les districts de Chubut et de Trelew.

La réglementation à Chubut oblige les entreprises spécialisées dans la pêche destinée à l’exportation – en particulier la langoustine et le merlu – à préparer leurs marchandises sur place. Ce qui a généré plusieurs milliers d’emplois directs dans une province minée par de longues années de crise économique et politique.

Des dizaines de sociétés détenues par des capitaux étrangers opèrent dans cette zone de pêche située dans les eaux de l’océan Atlantique, sous juridiction argentine. « Ces entreprises gagnent des millions et ne veulent pas payer le transport de ces effluents vers une usine de traitement à Puerto Madryn, à 60 kilomètres de distance, ni construire une usine de traitement plus proche », a déploré M. Lada.

Le Monde avec AFP

https://www.lemonde.fr/international/article/2021/07/26/en-argentine-une-lagune-devenue-rose-polluee-par-des-produits-chimiques_6089548_3210.html

Au Chili, les castors ravagent le poumon végétal de la Terre de Feu (L’Obs – AFP, 23/4/2021)

Par AFP

Publié le 23 avril 2021 à 9h10·Mis à jour le 23 avril 2021 à 17h30

Terre de feu (Chile) (AFP) – Poumon de la Terre de Feu, au sud du Chili, les forêts du parc Karukinka ne sont pas directement menacées par l’homme mais par la voracité de castors nord-américains, introduits pour raisons économiques dans les années 1940.

Plus de 70 ans après l’arrivée de 10 premiers couples pour développer l’industrie de la fourrure et peupler les terres reculées de Patagonie entre Argentine et Chili, la population de castors est aujourd’hui estimée à plus de 100.000 individus.

Si les troncs robustes et longs des arbres typiques de l’écosystème des forêts des Andes et de Patagonie, des hêtres de la famille des Nothofagus (pumulio, antarctica et betuloides), ont pu être sauvés des exploitants forestiers, le castor est aujourd’hui leur plus grand prédateur.

De la même manière que dans leurs habitat d’origine au Canada, ces rongeurs construisent inlassablement des barrages sur les rivières et les lacs pour y établir leurs terriers dans un enchevêtrement de bois, d’écorces et des racines.

Or, pour récupérer de la matière première et se nourrir, cet herbivore fait tomber grâce à ses dents ciselées des arbres qui ont mis près de 100 ans pour atteindre leur maturité.

“Les castors, comme nous les humains, sont appelés ingénieurs de l’écosystème, ce qui signifie que pour habiter un environnement, ils doivent le modifier pour l’adapter aux conditions dont ils ont besoin pour survivre”, explique à l’AFP Cristobal Arredondo, chercheur à la Wildlife Conservation Society (WCS) du Chili, en charge du suivi des espèces pour le parc Karukinka et la Terre de Feu.

Dans l’immensité de la Patagonie, “plus de 90 % des cours d’eau de l’île de la Terre de Feu, côté chilien, sont habités par des castors, ce qui a un impact très important sur les écosystèmes”, explique-t-il.

– Puits à carbone –

Malheureusement, les forêts de Patagonie ne se régénèrent pas aussi vite que celles des grandes plaines du nord du Canada.

Et une fois que le castor s’attaque à ces forêts, le carbone “qui a été capturé par les arbres pendant des centaines d’années est finalement libéré dans l’atmosphère lorsqu’ils meurent”, explique Felipe Guerra qui coordonne pour le Fonds pour l’environnement mondial (FEM) les mesures de gestion, de prévention et de contrôle du castor.

Or, les forêts et les tourbières du parc de Karukinka “sont de grands puits qui stockent de grandes quantités de carbone et d’autres gaz à effet de serre comme le méthane”, ajoute-t-il.

En sept décennies d’implantation des castors dans cette région, l’impact socio-économique s’élève à 73 millions de dollars, selon les estimations officielles.

La chasse au castor est autorisée mais insuffisante pour réguler leur nombre et la controverse porte davantage sur les moyens de limiter leur prolifération, les pièges aquatiques étant considérés comme “cruels” par l’Union pour la défense des droits des animaux de Punta Arenas, en Patagonie.

Eve Crowley, représentante de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) au Chili, ne mâche pas ses mots : “les espèces exotiques envahissantes sont l’une des principales causes de la perte de biodiversité, dégradant nos écosystèmes”, dit-elle à AFP.

Elle rappelle que “la conservation et la restauration de nos puits de carbone naturels, c’est-à-dire nos sols, nos forêts et nos zones humides, sont tout aussi importantes, voire plus, que la réduction des gaz à effet de serre afin de limiter le réchauffement de la planète”.

Argentine : le plus grand dinosaure jamais découvert a-t-il été mis au jour ? (Le Monde – AFP, 21/1/2021)

Selon les premières analyses, les os de ce sauropode géant de 98 millions d’années seraient « 10 % à 20 % plus grands » que ceux du « Titan de Patagonie », le plus grand dinosaure connu à ce jour.

Le Monde avec AFP Publié le 21 janvier 2021 à 14h29, modifié le 26 janvier 2021 à 18h59

https://www.lemonde.fr/sciences/article/2021/01/21/argentine-le-plus-grand-dinosaure-jamais-decouvert-a-t-il-ete-mis-au-jour_6067086_1650684.html

L’équipe de chercheurs dégage des os de dinosaure lors de fouilles dans la vallée de la rivière Neuquén en Argentine, en janvier.
L’équipe de chercheurs dégage des os de dinosaure lors de fouilles dans la vallée de la rivière Neuquén en Argentine, en janvier. JOSE LUIS CARBALLIDO/CTYS-UNLAM/AFP

Le squelette n’est pas complet, mais les premiers éléments analysés laissent présager que les fossiles découverts en 2012 dans le sud-ouest de l’Argentine sont ceux du plus grand dinosaure jamais mis au jour, selon une étude publiée mercredi 20 janvier. « Ce qui a été trouvé jusqu’à présent sont les 24 premières vertèbres de la queue, des éléments de la ceinture pelvienne, de la ceinture pectorale », a déclaré Alejandro Otero, auteur principal de la première communication sur ce titanosaure, un groupe de dinosaures au long cou dont on trouve des représentants sur tous les continents, parue dans la revue scientifique Cretaceous Research.

M. Otero a cependant expliqué que les os longs, tels que l’humérus ou le fémur, qui sont traditionnellement utilisés pour faire des estimations précises de la masse corporelle, n’avaient pas été extraits de la roche dans laquelle ils sont prisonniers. Mais selon les premières analyses, les os de ce sauropode géant de 98 millions d’années, datant du crétacé supérieur, seraient ainsi « 10 % à 20 % plus grands » que ceux du Patagotitan mayorum, le « Titan de Patagonie », le plus grand dinosaure connu à ce jour, a expliqué le chercheur à la division de paléontologie des vertébrés du Musée de La Plata, dans un rapport publié par l’Université nationale de La Matanza.

Le spécimen a été localisé presque par hasard en 2012 au milieu de la vallée de la rivière Neuquén, le plus important cours d’eau de la Patagonie argentine, mais les travaux d’excavation n’ont commencé qu’en 2015. « C’est un beau spécimen car il est pratiquement articulé et nous avons plus de la moitié de la queue, beaucoup d’os de la hanche. Maintenant il est encore majoritairement enfoui dans la roche et nous en avons encore pour quelques années de fouilles », a déclaré José Luis Carballido, chercheur qui avait dirigé les études sur le Patagotitan mayorum.

« Un spécimen presque complet »

L’équipe de chercheurs dégage des os de dinosaure lors de fouilles dans la vallée de la rivière Neuquén en Argentine, en janvier.
L’équipe de chercheurs dégage des os de dinosaure lors de fouilles dans la vallée de la rivière Neuquén en Argentine, en janvier. JOSE LUIS CARBALLIDO/CTYS-UNLAM/AFP

« Nous soupçonnons que le spécimen pourra être extrait complet ou presque complet. Tout dépendra de la façon dont les fouilles se poursuivront. Mais au-delà du fait qu’il soit le plus grand ou non, le fait qu’un dinosaure articulé apparaisse, un dinosaure de ces dimensions, est quelque chose d’extraordinaire », se réjouit Alberto Garrido, directeur du Musée des sciences naturelles de Zapala, dans la province de Neuquén.

L’analyse anatomique effectuée « ne permet pas actuellement de le considérer comme une nouvelle espèce », explique les chercheurs dans le rapport, « mais la disparité morphologique et l’absence d’éléments équivalents par rapport aux fossiles contemporains nous empêchent également d’attribuer [les ossements] à des genres déjà connus », soulignent-ils.

Découvert en 2017, également en Argentine, le Patagotitan mayorum pesait environ 70 tonnes, soit dix éléphants d’Afrique, mesurait environ 40 mètres de long et avait un cou très long. L’Argentine compte de très nombreux fossiles issus des trois périodes de l’ère mésozoïque (secondaire) – le trias, le jurassique et le crétacé. Ils appartiennent à des animaux différents de ceux rencontrés dans l’hémisphère Nord. En Argentine, les gisements de fossiles de dinosaures les plus importants se trouvent en Patagonie (Sud), dans les régions de La Rioja et de San Juan (Ouest) et dans la province de Salta (Nord).

Le Monde avec AFP

https://www.lemonde.fr/sciences/article/2021/01/21/argentine-le-plus-grand-dinosaure-jamais-decouvert-a-t-il-ete-mis-au-jour_6067086_1650684.html

Eclipse totale du soleil au Chili et en Argentine: et soudain, l’obscurité ! (L’Obs – AFP, 14/12/2020)

Publié le 14 décembre 2020 à 18h50·Mis à jour le 15 décembre 2020 à 12h35

Pucon (Chili) (AFP) – Le sud du Chili et de l’Argentine ont été plongés dans l’obscurité pendant plus de deux minutes lundi en début d’après-midi, quand la lune a totalement recouvert le disque solaire.

Le spectacle a été total en Argentine, dans la région de Bariloche (sud) où étaient rassemblés sous un ciel maculé de bleu des milliers de personnes portant des lunettes de protection contre les rayons solaires.

En revanche le spectacle a été en partie gâché au Chili, à 800 km au sud de la capitale Santiago, par une pluie tombée sans discontinuer, de gros nuages noirs empêchant de distinctement voir la partie de cache-cache entre le Soleil et la Lune.

Dans la ville touristique de Pucon, au pied du lac Villarrica, les averses n’ont cessé d’augmenter en intensité au cours de la matinée, laissant peu d’espoirs d’entrevoir l’alignement Terre-Lune-Soleil, prévu à 13H00 locales, soit 16H00 GMT, pendant précisément deux minutes et neuf secondes.

Mais au moment de l’éclipse, les nuages ont perdu en épaisseur au dessus de la plage du lac où étaient réunies des milliers de personnes couvertes de vêtements de protection contre la pluie.

“C’était magnifique, unique. On n’avait pas beaucoup d’espoir de la voir à cause des nuages, mais c’était unique quand le ciel s’est ouvert. Un miracle!”, s’est enthousiasmé Matias Tordecilla, 18 ans, transcendé par le spectacle qu’il a vécu.

“C’est quelque chose que vous ne pouvez pas seulement voir avec vos yeux mais que vous pouvez sentir avec votre corps”, a ajouté le jeune homme, qui a fait plus de 10 heures de route en famille pour vivre ce spectacle cosmique.

Cinthia Vega, une habitante de Pucon, dit avoir senti ses “poils se hérisser” sur sa peau au moment où l’obscurité s’est faite.

Des dizaines de scientifiques amateurs ou professionnels étaient arrivés depuis plusieurs jours pour installer leurs télescopes sur les flancs du volcan Villarrica, l’un des plus actifs du Chili, au milieu de la riche végétation du sud du pays.

Ils n’ont pas été récompensés comme en juillet 2019, lors de l’éclipse totale dans un ciel pur du nord du Chili, au milieu du désert de l’Atacama où se trouvent plusieurs observatoires astronomiques.

– Spectacle total –

A Carahue, plus proche de la côte pacifique, l’éclipse a été vécue en prières par les membres de la communauté indigène des Mapuches, la plus importante du Chili, qui voient dans ce phénomène la fin d’une époque et le début d’un nouveau processus.

Dans la région de la capitale Santiago, où vivent sept des quinze millions d’habitants frappés de restrictions de déplacement à cause de l’augmentation des cas de coronavirus, la pénombre a été passagère et la température a légèrement baissé.

La trajectoire de l’ombre lunaire, cette bande étroite de 90 km où le noir a été total, a débuté dans l’océan Pacifique, a atteint les terres chiliennes avant de traverser la Cordillère des Andes, puis a parcouru le sud de l’Argentine d’ouest en est avant de se poursuivre dans l’océan Atlantique sud.

Près de la ville touristique de Bariloche, en Patagonie, plusieurs familles ont attendu avec anxiété l’arrivée de l’éclipse. Un groupe de touristes américains espérait ne pas avoir effectué pour rien de complexes démarches administratives et de nombreux tests de détection du Covid-19 avant de bénéficier des autorisations pour atteindre la ville.

Mais le ciel est resté immaculé de nuages quand la lune a commencé à grignoter le soleil, plongeant les chanceux dans des sourires radieux derrières leurs lunettes de protection, jusqu’au point culminant où le soleil a disparu.

Chaque année, il y a deux éclipses totales du Soleil, mais selon la période de l’année et le moment de la journée elles sont plus ou moins visibles pour la population.

Source : https://www.nouvelobs.com/monde/20201214.AFP3480/eclipse-totale-du-soleil-au-chili-et-en-argentine-et-soudain-l-obscurite.html

Au Chili, la traque du castor, la plaie qui met en péril les forêts de Patagonie (L’Obs – AFP, 22/4/2020)

Publié le 22 avril 2020 à 10h00·Mis à jour le 22 avril 2020 à 13h00

Puerto Williams (Chili) (AFP) – Armé de son fusil, Miguel Gallardo fait face à une tâche colossale: traquer le castor, introduit dans la région dans les années 1940 et devenu depuis une plaie qui menace les forêts de la Patagonie chilienne.

A partir des 10 couples introduits en 1946, on compte aujourd’hui quelque 100.000 individus dans la zone de la Terre de feu, partagée entre le Chili et l’Argentine. Marcelo, lui, ne parvient à en abattre qu’une soixantaine à chaque saison.

“Le castor est très mignon, très intelligent, mais malheureusement, les dommages qu’il est en train de causer sur la végétation indigène et la faune sont énormes”, déclare à l’AFP ce chasseur qui a 15 ans d’expérience et organise aussi des visites touristiques sur l’Ile Navarino, à proximité de Puerto Williams, à l’extrême sud du Chili.

Avec leurs puissantes dents et leurs talents de bâtisseurs, le castors se sont parfaitement acclimatés à ce nouvel habitat, totalement dépourvu de prédateurs.

“Il faut les éradiquer, mais il ne s’agit pas non plus d’arriver et de leur tirer dessus dans l’eau et qu’ils y pourrissent”, ajoute ce chasseur, qui récupère les spécimens abattus pour utiliser leur fourrure “de très bonne qualité et assez chaude”.

En 1946, des militaires argentins ont rapporté d’Amérique du Nord dix couples de castors du Canada (castor canadensis) dans le but de monter une affaire de peaux et de fourrures en Terre de feu. Mais cela n’a finalement pas marché et ces castors ont été relâchés dans la nature.

Les deux pays voisins effectuent depuis les années 1980 des campagnes de contrôle pour tenter de réduire les populations de ces rongeurs, par des pièges ou des abattages. En face, les ONG de protection de l’environnement, comme l’Union de défense du droit animal de Punta Arenas, dénoncent la cruauté de ces méthodes ainsi que leur manque d’efficacité.

“Les défenseurs des animaux, je les comprends; je comprends que tuer un être vivant, un petit animal intelligent, c’est douloureux. Mais malheureusement, si nous ne prenons pas de mesures concernant le castor, nous allons nous retrouver sans forêt et sans végétation”, met en garde Miguel Gallardo.

– 23.000 hectares dévastés –

“Penser à éradiquer le castor n’est en rien un combat contre le castor mais un besoin de protéger le patrimoine naturel de notre pays”, abonde Charif Tala Gonzalez, responsable du département de conservation des espèces au ministère de l’Environnement.

En quelques années, ces rongeurs semi-aquatiques au pelage marron qui peuvent mesurer jusqu’à un mètre et peser 32 kilos ont fini par coloniser tout l’archipel de la Terre de feu.

Outre qu’il n’a pas de prédateurs naturels dans cette partie du globe, le castor vit en général longtemps, de 10 à 12 ans, durant lesquels il peut avoir 5 à 6 petits chaque année.

Cet animal est connu pour construire des barrages à partir de la végétation existante. Il installe ensuite sa tanière au milieu de la retenue qui se forme alors.

Cette montée des eaux fait mourir la végétation indigène et le peu d’arbres qui survivent sont abattus par les castors pour renforcer leur construction. Ils raffolent particulièrement des lengas centenaires, également appelés hêtres de la Terre de feu, et des coihues, connus sous le nom de hêtres de Magellan.

“La forêt ne peut pas se défendre (…) Tout ce qui reste au milieu de l’eau meurt, car nos forêts ne sont pas préparées à l’excès d’eau”, explique Miguel, le chasseur.

Les autorités chiliennes estiment que depuis leur introduction, les castors ont dévasté plus de 23.000 hectares de végétation indigène, entraînant un manque à gagner évalué à 62,7 millions de dollars à cause de la destruction du bois.

Ils ont également eu un effet sur l’ensemble de la flore et la faune de la zone, leurs barrages provoquant des inondations qui ont coupé des routes, des zones de pâturage et de culture.

“Les écosystèmes de la Patagonie sont uniques (…) Pour qu’ils redeviennent pleinement des forêts, nous parlons en centaines d’années, si les conditions sont réunies”, souligne Charif Tala Gonzalez.

Source : https://www.nouvelobs.com/topnews/20200422.AFP5823/au-chili-la-traque-du-castor-la-plaie-qui-met-en-peril-les-forets-de-patagonie.html