Grâce à l’invitation de Denis Laborde, directeur du festival Haizebegi, Lauriane Lemasson a pu inviter trois de ses fidèles informateurs à venir témoigner en France de leur histoire. Mirtha Salamanca, José German Gonzalez Calderon et Victor Vargas Filgueira seront donc en France (Bretagne, Bayonne et Paris) du 2 au 23 octobre 2019. Lauriane les accompagnera pendant ce séjour au programme chargé : rencontre avec l’historien spécialiste de l’histoire coloniale Pascal Blanchard (https://fr.wikipedia.org/wiki/Pascal_Blanchard_(historien)), collecte de joncs (atelier de vannerie yagan) et visite du site mégalithique de Saint Just, rencontre avec Jean-Luc Nahel à Paris (responsable des relations internationales de la Conférence des Présidents d’Université), visite du Panthéon, rencontre avec l’équipe de la bibliothèque Brou de Dampierre de l’Université de Nanterre et consultation du Fonds Anne Chapman, animation et participation à des conférences, tables rondes et ateliers (vannerie yagan) à Bayonne et San Sebastian, puis retour à Paris pour la visite du Musée de l’Homme, la conférence dans le cadre du séminaire d’études ethnomusicologiques de Sorbonne Université (dirigé par Pr. François Picard), rencontre avec l’équipe dédiée à la conservation de la collection « Amériques » du Musée du Quai Branly, et enfin seconde consultation du Fonds Anne Chapman avant le retour à Nantes et le vol de retour à Ushuaia.
Pour compléter ces informations, quelques mots de Denis Laborde, organisateur du festival et responsable de la carte blanche donnée à Lauriane Lemasson (et de fait à ses informateurs) :
« Du 10 au 20 octobre : 10 films, 5 concerts, 14 rencontres et débats, 2 colloques, 3 expositions, 5 conférences, 1 spectacle de danse contemporaine, 7 stages et ateliers et le Grand Bal Tango du 18 au Gaztetxe. Et cette « cérémonie de résilience » au Musée Basque de Bayonne, le 12 octobre à 11 heures. Ce jour-là, des membres des peuples Selk’nams et Yahgans venus d’Ushuaia, de Rio Grande et de Puerto Williams, en Terre de Feu, racontent l’histoire de leurs peuples : les exploitations, les génocides, les zoos où leurs ancêtres furent exhibés et les restes humains dans les musées du monde. Gérard Collomb, ethnologue au CNRS, sera là pour les écouter. Et Lars Christian Koch viendra leur remettre, au nom des Archives sonores de Berlin qu’il dirige, les enregistrements réalisés entre 1907 et 1923 par les missions ethnographiques en Terre de Feu. Cette cérémonie se fait sous l’égide de l’UNESCO dans le cadre de l’Année Internationale des Langues Indigènes. À Bayonne, ce 12 octobre, la voix de leurs ancêtres sera restituée aux Selk’nams et aux Yahgans.
Vous êtes étonnés que tout cela se passe au prétexte de musique ? Souvenez-vous que la musique est un art de l’écoute et que cette capacité se doit d’être mise au service d’autres dispositifs. Comme sut le dire Florence Delay lors de la première édition du festival en 2014, « il faut savoir écouter pour pouvoir s’entendre ».
Alors voilà. Le festival Haizebegi n’a d’autre ambition que d’être un tiers terme qui catalyse des rencontres. Cela est vrai pour les Selk’nams et les Yahgans, cela est vrai aussi pour les si belles photos réalisées par Lauriane Lemasson en Terre de Feu et qui sont exposées dans le cloître de la Cité des Arts, cela est vrai pour les chercheurs brésiliens qui viennent présenter les documentaires sur l’immigration musicale au Brésil, cela est vrai aussi pour le travail de photographe que Jean-Marie Colin a effectué au Centre Atherbea qui accueille les blessés de nos mondes sociaux et cherche à favoriser leur réinsertion sociale. Les portraits de résidents qu’il a réalisés seront exposés sur les rives de l’Adour. Et par ce geste artistique unique, trace de l’implication de chacun dans sa propre histoire, ces personnes que nous avons nous-mêmes tellement de mal à apercevoir retrouvent une pleine visibilité dans l’espace public. La musique, un art de l’écoute.
Denis Laborde, Directeur artistique Haizebegi«
Pour en savoir plus et connaître le programme détaillé du festival, rendez-vous sur le site https://haizebegi.eu
Quatre étudiants racontent leur incroyable expédition dans l’Antarctique
Par Maud Kenigswald Publié le 12/07/2019 à 09:49, mis à jour le 12/07/2019 à 17:46
L’équipe du projet Amazing Antarctique: de gauche à droite, Clément Tissot, Camille Amaz, Aurélie Schwartz, Robin Amaz, Frédéric, Floriane Eonnet, Jacques et Catherine Amaz.Camille Amaz
En février 2019, une équipe menée par quatre étudiants ingénieurs prenait le large pour un mois d’expérimentation scientifique en Antarctique. Six mois plus tard, de retour sur la terre ferme et forts de leur recul, ils racontent leur expédition.
Le 10 février dernier, un groupe supervisé par quatre élèves de l’IMT Mines-Albi quittait Ushuaia pour mettre le cap sur l’Antarctique, afin d’y mener une série d’expériences scientifiques. Néanmoins, leur aventure ne se circonscrit pas à ce mois passé hors du temps, elle comprend également l’année de préparation ainsi que le retour à la vie «réelle».
Ainsi, réunis sur un toit de Paris, les étudiants au cœur du projet se confient au Figaro Étudiant sur leurs péripéties: récit à quatre voix d’une épopée dans le Grand froid.
À l’origine, une soif de défis
Amazing Antarctique, c’est à l’origine quatre jeunes de 21 ans, étudiants ingénieurs à Albi: Aurélie, Clément, Floriane et Robin. Las de leur train-train quotidien, les amis se sont lancés à l’assaut du Sixième Continent, au service de la science.
Robin Amaz est à l’initiative du projet: depuis son plus jeune âge, ce Lyonnais est passionné de milieux froids et a fortiori, de sciences. Enfermé pendant ses deux années de classe préparatoire, Robin rêvait de grands espaces. Lors de sa troisième année d’études supérieures, à l’IMT Mines-Albi, il s’est lancé. Pour ce faire, il a dû constituer un groupe de choc autour de lui: Aurélie, Floriane et Clément, trois camarades de promo. Clément n’a pas hésité une seconde, voyant là une occasion de «montrer l’exemple». «Je voulais prouver qu’à 21 ans, on peut déjà accomplir des prouesses, scientifiques notamment» rapporte-t-il. Même discours pour Floriane, qui souhaitait également profiter de l’expédition «pour faire passer un message de prévention écologique».
Et le défi a commencé avant même la montée à bord du voilier: «Il s’agissait de préparer en un an une expédition que les professionnels mettent généralement cinq ans à orchestrer», raconte Robin. Une fois ce constat dressé, la course contre la montre est lancée. Il fallait donc être efficace, se répartir le travail. Pour pallier leur manque d’expérience dans le domaine, les quatre étudiants ont dû redoubler d’effort, sacrifiant tout leur temps libre à la préparation du projet. Cette année s’est donc écoulée à toute vitesse, avec la constitution du reste de l’équipe: outre les quatre élèves, le groupe comptait également Camille Amaz, biostatisticienne à Lyon, ainsi que trois «mécènes» – qui n’étaient autres que les parents de Robin et un proche de la famille Amaz – et les marins.
Départ destination ailleurs
Un jour de janvier 2019, il est déjà temps de quitter la France pour la Patagonie. Avant d’embarquer à bord du voilier, l’équipe a décidé de passer trois semaines ensemble, pour s’habituer à la promiscuité. Vingt jours plus tard, l’excitation au ventre, les huit aventuriers pénètrent dans ce qui va devenir leur fief pendant un mois, le voilier Podorange. Les équipiers découvrent les cabines, et doivent s’habituer sans broncher à faire fi de toute intimité pour (re)découvrir la vie en collectif: «Pas de portes, les cabines étaient séparées par des rideaux donc on entendait tout», explique Aurélie.
Appareillage pour le détroit de Drake, passage obligatoire pour accéder à l’Antarctique. Ce bras de mer séparant l’extrémité sud de l’Amérique du Sud et l’Antarctique est particulièrement redouté, y compris par les marins aguerris. Pour les étudiants, les quatre jours de traversée du Drake se sont apparentés à un véritable calvaire. Clément en garde des souvenirs amers: «On vivait avec un rythme de balancier non rythmé permanent, qui nous a tous rendus malades», décrit-il, les empêchant par là même d’avaler quelque aliment et les circonscrivant au seul espace de leur couchette.
Trois fois par jour, pendant deux heures, chaque binôme devait aller sur le pont pour vérifier qu’il n’y ait pas d’iceberg ou d’obstacles impromptus, que le sonar n’aurait pu repérer. «Ces tours de garde nous trempaient invariablement, on rentrait dans nos cabines frigorifiés», se rappelle Robin. L’occasion pour les étudiants d’expérimenter des mers particulièrement compliquées, et donc, d’entrer dans le «dur» de la navigation. Une fois arrivés en Antarctique, l’équipe n’a pas pris plus d’une nuit pour se reposer. L’objectif: commencer le travail scientifique au plus vite afin de mettre à profit leur environnement singulier.
Leur objectif: faire avancer science et consciences
En préparant leur expédition, la volonté des étudiants était claire: faire avancer science et consciences en rapportant des données permettant d’enrichir la réflexion sur le réchauffement climatique. Ils ont ainsi centré leurs recherches sur quatre domaines. Leur premier objet de recherche est l’étude des planctons, afin de fournir à Plankton Planet, une filiale du CNRS (Centre national de la recherche scientifique) des échantillons de plancton de cette zone, ce dont ils manquent cruellement.
De plus, Robin, Aurélie, Clément et Floriane, ont souhaité, avec l’aide d’une biostatisticienne, «étudier la réaction du corps lorsqu’il évolue dans des conditions extrêmes pendant une durée prolongée», à l’instar de ce mois sur un voilier en Antarctique. Un troisième aspect de leur recherche se concentrait sur le microplastique afin d’en observer l’évolution dans ce périmètre depuis 2018, date des dernières expérimentations sur place. Enfin, les quatre jeunes se sont intéressés aux courants océaniques: la péninsule Antarctique constituant le point de jonction des trois océans, elle est le lieu parfait pour suivre la salinité, prendre des mesures de l’eau et faire des relevés quotidiens.
Un dur retour à la réalité
À l’issue de ce mois passé hors du temps, à concentrer uniquement son attention sur les sciences et l’environnement, il était déjà temps pour toute l’équipe de revenir sur la terre ferme, puis de rejoindre l’Hexagone. Le retour à la réalité fut brutal: «On a par exemple redécouvert la couleur verte, qui est inexistante en Antarctique: en débarquant du voilier, on a directement été se rouler dans l’herbe», rapportent Clément et Robin, le ton rieur.
Ce retour s’est révélé particulièrement stressant: les étudiants devaient à la fois rattraper leur retard, notamment à l’école mais aussi, organiser les conférences et plus généralement, s’occuper de l’après-expédition.
Désormais, les perspectives sont nombreuses pour ces étudiants. «Je compte organiser des ateliers à destination des enfants pour les informer sur les bons comportements à adopter pour ne pas polluer l’environnement», explique Robin. Le deuxième pan de leur action se situe sur le terrain scolaire puisqu’ils désirent accroître le nombre de projets sur l’écologie dans leur école, l’IMT Mines-Albi. Les idées fourmillent: ils souhaitent rendre leur campus zéro-plastique, mettre en place des ruches et des ateliers pour faire son savon, son shampooing ou encore son yaourt soi-même. Là encore, il s’agit d’encourager les étudiants à prendre leurs responsabilités vis-à-vis de la Terre. «L’avenir de la planète nous appartient», conclut Robin Amaz.
Par Audrey Garric Publié le 08 avril 2019 à 17h00, modifié le 09 avril 2019 à 16h24
Vêlage (détachement d’une masse de glace) sur le glacier Hubbard, en Alaska, en août 2018. JIM MONE / AP
Partout sur le globe, les glaciers se dévêtent progressivement de leurs majestueux manteaux blancs aux nuances de bleu. Conséquence du réchauffement de l’atmosphère, ces sentinelles du climat ont perdu plus de 9 600 milliards de tonnes de glace au cours des cinquante dernières années. A eux seuls, ils ont entraîné une élévation du niveau de la mer de 2,7 cm sur la période, contribuant pour 25 % à 30 % de la hausse globale. Voilà les conclusions d’une étude parue dans Nature lundi 8 avril, extrêmement précise quant à l’observation des bouleversements qui affectent ces géants continentaux.
« Globalement, les glaciers perdent chaque année environ trois fois le volume de glace stocké dans l’ensemble des Alpes européennes », compare Michael Zemp, premier auteur de l’étude et glaciologue à l’université de Zurich (Suisse).
« Nos résultats montrent que les glaciers continentaux, notamment la Patagonie, l’Alaska ou les Alpes, sont ceux qui sont le plus affectés par le climat, davantage que les calottes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique », qui ne font pas partie de l’étude, ajoute le second auteur, Emmanuel Thibert, glaciologue à l’université Grenoble Alpes et à l’Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture.
Pour mener cette étude, qui couvre dix-neuf des régions les plus englacées du globe, l’équipe internationale de chercheurs s’est fondée sur deux types de données recueillies entre 1961 et 2016 : des photographies aériennes et satellites de 19 000 glaciers du monde, permettant de calculer leurs pertes de masse sur de longues périodes ; et des observations de terrain (carottages, mesures de précipitations et de fonte) pour 450 d’entre eux, représentatifs de massifs entiers, afin de connaître leur variation et réponse annuelle au changement climatique.
Résultat : la perte de masse s’est accélérée au cours des trente dernières années, particulièrement lors de la décennie 2006-2016, pour atteindre 335 milliards de tonnes (gigatonnes, Gt) de glace perdues chaque année. Soit davantage que la fonte du Groenland (la suite de cet article est réservée aux abonnés)
Les océans ont cessé d’être silencieux. A en croire une étude publiée dans le journal « Biology Letters », les navires sont si bruyants que les dauphins sont contraints de communiquer moins efficacement : leurs sifflements sont de moins en moins complexes.
Des dauphins.• Crédits : George Karbus Photography – Getty
L’activité humaine n’a pas seulement contribué à réchauffer les océans : elle a aussi troublé leur silence. Hélices de navires et minages océaniques polluent constamment la quiétude des fonds marins, et les animaux qui y vivent, longtemps habitués au silence, sont contraintes de modifier leurs comportements.
Selon une étude parue dans le journal Biology Letters de la Royal Society, l’équivalent de l’Académie des sciences en France, les dauphins et autres mammifères marins, comme les baleines, ont commencé à moduler leurs sifflements en fonction du bruit ambiant. L’étude, intitulée “Les Dauphins simplifient leur appels vocaux en réponse à l’accroissement du bruit ambiant” (“Dolphins simplify their vocal calls in response to increased ambient noise”), menée par les biologistes marins Helen Bailey et Leila Fouda, de l’université du Maryland, a porté sur l’analyse de plus de 200 enregistrements de cris de dauphins, collectés au cours de trois mois passés au Nord de l’océan Atlantique.
Les dauphins émettent normalement des sifflements avec un ton montant et descendant et des variations de fréquence. Les résultats obtenus montrent que, lorsque le bruit ambiant dû à des bateaux est important, plus les fréquences utilisées sont élevées et les sifflements, qui permettent aux dauphins de s’identifier, moins complexes. “La simplification de ces sifflements pourrait réduire les informations dans ces signaux acoustiques et rendre plus difficile la communication pour les dauphins”, a assuré la Dr. Leila Fouda. “C’est un peu comme essayer de répondre à une question dans un bar bruyant et, après plusieurs tentatives répétées pour être entendu, on finit par donner la réponse la plus courte possible”, a renchéri la Dr. Helen Bailey.
Plongée sonore
Dès mars 1993, l’émission Chasseurs de sons rappelait l’utilité de l’expression sonore pour les dauphins, et proposait une plongée sonore immersive dans les fonds marins, en compagnie des baleines, bélugas et rorquals :
Les dauphins émettent des ultra-sons brefs, lancés au rythme de 5 à plusieurs centaines par seconde, sur une bande de fréquence allant de 20 à 170 kHz, leur permettant d’avoir des fonctions identiques à celles d’un sonar. Mais outre ces sons inaudibles pour l’oreille humaine, ils produisent toute une panoplie de cris divers. Des cris, des sifflements, des claquements leur permettant de communiquer entre eux. Certaines expériences avec des dauphins apprivoisés ont montré que chaque individu possédait sa propre voix. Ils échangeaient des messages complexes, favorisant un développement très poussé de leur vie sociale et de leurs rapports avec l’homme.
Écouter
Chasseurs de sons (21/03/1993)
L’étude publiée de la Royal Society préconisait, quant à elle, faute de pouvoir diminuer le nombre de navires en mer ou d’en revenir aux voiliers, de réfléchir à des moyens de rendre les moteurs plus silencieux. Et de permettre aux océans de retrouver un peu de calme.
La barrière de Ross, en Antarctique, le 18 avril 2009. Michael Van Woert, NOAA/FLICKR CC 2.0
Des fréquences sonores émises par la barrière de Ross, une plateforme de glace en Antarctique, ont été enregistrées par des scientifiques américains qui ont publié le 16 octobre le résultat de leurs recherches.
“Les fréquences [des sons enregistrés] sont trop basses pour être perçues naturellement par l’homme mais, quand on les accélère, on croirait entendre le son sinistre qui annonce l’arrivée d’un monstre dans un film d’horreur.” Ainsi le site Quartz décrit-il les curieuses plaintes d’un plateau de glace de l’Antarctique.
La barrière de Ross, d’une taille comparable à celle de l’Espagne, a livré de nouveaux secrets à des scientifiques de l’université d’État du Colorado. Équipés de sismographes, ils ont repéré par hasard puis étudié, pendant deux ans, “la fréquence sonore émise par la neige alors qu’elle vibre sous les effets du vent et de la fonte”, détaille Quartz. Ces sons pourraient même permettre d’établir des prévisions sur de possibles ruptures d’iceberg liées à la fonte des glaces. Devant les perspectives inquiétantes du réchauffement climatique, particulièrement pour la hausse du niveau des océans, “peut-être le son de la vibration de la neige est-il un sinistre augure tout à fait approprié”, conclut le site d’information.