Le deuxième long-métrage de Niles Atallah s’inspire d’un épisode historique insolite : l’épopée rocambolesque d’Orélie Antoine de Tounens.
Par Mathieu Macheret Publié le 29 novembre 2017 à 08h05, modifié le 29 novembre 2017 à 08h05
L’avis du « Monde » – on peut éviter
Le deuxième long-métrage de Niles Atallah, réalisateur à la double nationalité américaine et chilienne, s’inspire d’un épisode historique insolite : l’épopée rocambolesque d’Orélie Antoine de Tounens (1825-1878), avocat périgourdin qui, lors d’un voyage en Amérique du Sud, prit le titre de roi d’Araucanie et de Patagonie, fut reconnu comme tel par les indigènes Mapuche, habitants de ces territoires, écrivit la constitution de son royaume, mais fut arrêté par l’armée chilienne, reconnu comme fou par les autorités, puis définitivement renvoyé en France après plusieurs tentatives de retour.
Le film ne se présente pas comme une reconstitution de cette odyssée délirante, mais comme une variation libre et expérimentale sur le sujet, comme perçue à travers les rêves et les hallucinations des Mapuches. La longue silhouette de de Tounens se promène dans des paysages instables, cernée de visions, hantée par une voix off incantatoire, projetée dans un procès fantasque où toute l’assemblée porte des masques grotesques, lancée à la rencontre de figures titanesques et fantastiques (le peuple mythique des Patagons).
Afféteries stylistiques
L’image est passée au crible de rayures et de sautes, comme issue d’une pellicule endommagée, tandis qu’au son, les grésillements côtoient des boucles hypnotiques et des imprécations hallucinées.
Ces afféteries stylistiques, marquées d’un volontarisme pesant, peinent à faire oublier des images complètement dénuées de mystère, ainsi qu’une incapacité plus grave à toucher du doigt la folie du personnage. Plutôt que d’explorer les prolongements infinis d’un sujet aussi riche, digne d’un Werner Herzog, le film s’épuise à ressasser un seul motif, une seule idée, déjà clairement exprimée par son titre à rallonge. On n’hésitera donc pas à s’en tenir là.
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Film chilien, français, néerlandais, allemand et qatari de Niles Atallah. Avec Rodrigo Lisboa, Claudio Riveros (1 h 31). Sur le Web : www.damneddistribution.com/rey
Le premier long-métrage de l’Argentin Emiliano Torres montre une terre photogénique mais pèche par une réalisation trop appliquée.
Par Mathieu Macheret Publié le 28 juin 2017 à 07h25, modifié le 28 juin 2017 à 07h25
L’avis du « Monde » – pourquoi pas
Un vieil homme nommé Evans (Alejandro Sieveking) s’occupe seul d’un ranch perdu au fin fond de la Patagonie, pour le compte de propriétaires étrangers. Parmi une bande de travailleurs saisonniers dépêchés sur place, Evans prend en main un jeune homme, Jara (Cristian Salguero), qui doit sous peu devenir son second. Mais une fois formé à la gestion de l’exploitation (vouée à l’élevage des moutons), le nouveau venu est promu à la place de l’ancien, alors prié de plier bagage. A l’approche de l’hiver, Jara tâche de survivre, loin d’une famille qu’il a cachée à ses employeurs, dans un environnement de plus en plus hostile.
Sur le papier, ce premier long-métrage de l’Argentin Emiliano Torres, qui fut l’assistant de nombreux autres réalisateurs (Daniel Burman, Emanuele Crialese, Paz Encina, etc.), aurait pu donner un bon western, ouvrant sur une expérience des limites, liée à la rudesse et à l’isolement de son territoire – la Patagonie, toujours aussi photogénique. En lieu et place, on assiste à un drame plus restreint, plus ténu, de la transmission entre générations, virant à la concurrence parce qu’instrumentalisée par les possédants à leur propre profit.
Un solide duo de comédiens
Emiliano Torres démontre d’abord une belle assurance, sachant faire exister ses décors et ses personnages, le film devant beaucoup à la présence saillante d’un solide duo de comédiens. Sa mise en scène se caractérise toutefois, sur la durée, par la recherche sans doute illusoire d’une « bonne distance », et manifeste ainsi une sagesse de bon élève appliqué. Ce faisant, le film ne décolle qu’à de rares occasions de sa signification toute tracée (le capitalisme mondialisé organise la rivalité entre les travailleurs), alors qu’un paysage « surréel », perclus de gouffres et de menaces obscures, lui tendait les bras.
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Film argentin et français d’Emiliano Torres. Avec Alejandro Sieveking, Cristian Salguero, Adrian Fondari, Pablo Cedron, Mara Bestelli (1 h 35). Sur le Web : www.facebook.com/Tamasa-Distribution-330131643671380
Un documentaire fait résonner des siècles de luttes sociales oblitérées.
Par Mathieu Macheret Publié le 14 février 2017 à 08h40, modifié le 14 février 2017 à 08h40
L’avis du « Monde » – à voir
Existe-t-il dans notre monde surquadrillé une idée du « lointain » où l’aventure et la découverte seraient encore envisageables ? En explorant les paysages surréels de la Patagonie chilienne, à l’extrémité du monde, le photographe et chef opérateur Georgi Lazarevski, d’origine yougoslave, apporte une réponse sceptique et teintée de mélancolie : la société moderne à son stade le plus avancé, celui du tourisme, foule du pied toute terre existante et réécrit l’histoire à l’aune de ses itinéraires tout tracés.
Son beau documentaire Zona Franca, situé dans la province délaissée du détroit de Magellan, s’enroule autour de trois personnages. Le premier, Gaspar, est un vieil orpailleur vivant loin de tout dans son rancho rafistolé. L’or ne faisant plus recette, il propose aux touristes de passage de l’observer dans ses activités. Edgardo, routier très engagé politiquement, participe au blocage d’un axe touristique, en guise de manifestation contre la hausse des prix du gaz. Enfin, Patricia, gardienne silencieuse, surveille les parages de la « Zona Franca », le plus gros centre commercial de la région et espace commercial défiscalisé, où affluent les visiteurs locaux et étrangers. Chacun ouvre un point de vue différent sur les évolutions historiques, sociales, économiques de la région, mais surtout sur l’indécrottable isolement de sa population à travers les âges.
Splendeur terrible
Lors d’une visite dans un ancien abattoir réhabilité en hôtel de luxe, Edgardo rappelle que sous la domination anglaise, à la fin du XIXe siècle, les ouvriers travaillaient 14 heures par jour sans aucun droit. Un passage dans la riche demeure du pionnier et industriel Mauricio Braun, devenue musée, fait ressurgir le souvenir enfoui du génocide des aborigènes, de la spoliation des terres, de l’exploitation à tous crins – désolantes annales qu’une guide réunit sous le terme de « Patagonie tragique ».
Explorez depuis votre ordinateur les paysages sonores de Bernie Krause actuellement en exposition à la Fondation Cartier. Laissez vous guider par la voix française de l’artiste Camille ! Une expérience enrichissante, pour ceux qui n’auraient pas l’opportunité de se rendre à la Fondation Cartier avant le 17 janvier 2017.
À l’occasion de l’ exposition « Le grand orchestre des animaux » (Fondation Cartier), plongée dans l’univers sonore animal avec deux bio acousticiens : Bernie Krause et Thierry Aubin
Bernie Krause est un musicien , ingénieur du son et scientifique de l’écoute.Il consacre sa vie à connaitre et à faire connaitre la diversité , la complexité et l’extrême beauté du monde sonore animale qu’il a appelé la biophonie. Ses travaux nous enseignent quechaque espèce animale possède sa propose signature acoustique qui, à l’instar d’un instrument de musique dans un orchestre, vient s’inscrire avec précision et subtilité dans la trame de la grande partition du paysage sonore de l’écosystème où elle vit. Il est l’auteur de « Chansons animales et cacophonie humaines, Manifeste pour la sauvegarde des paysages sonores naturels » Ed Actes Sud et Fondation Cartier pour l’art contemporain.
Thierry Aubin, est bio acousticien et directeur de recherche au Cnrs et responsable de l’équipe » communication acoustique « à l’Institut des Neuroscience Paris Saclay. Il s’intéresse à l’adaptation des systèmes de communication acoustiques aux contraintes environnementales, à la sélection sexuelle liée aux communications acoustiques ou encore au rôle des communications acoustiques dans la structuration des groupes animaux.
Projection de Yamana, retour en Patagonie, un film de Fabrice Marquat (2008 – 80 min) Jeudi 10 novembre de 18h30 à 20h30 à la Médiathèque Aimé Césaire 61 rue Mirabeau, 25000 Besançon
D’où nous vient le désir d’ailleurs, de voyages et d’aventures ? Qu’attend-on de ces exils définitifs ou momentanés ? Pendant un voyage à moto en Patagonie, le réalisateur se penche sur son histoire familiale et part à la rencontre de femmes et d’hommes qui ont tout quitté pour le mythe patagon. Venus des quatre coins du monde, ils vivent la Patagonie à leur façon, entre fascination et désillusion. Carnet de route intimiste, Yamana est avant totu un regard sensible posé sur l’autre et son parcours.
Projection suivie d’une discussion avec le réalisateur